D’abord rapportée à l’AFP par des sources sécuritaires, l’attaque qui a visé la base militaire de N’dotré, au nord d’Abidjan, a été confirmée mercredi midi par l’armée dans un communiqué laconique qui ne donne aucune indication sur son origine ou ses motivations.
« Dans la nuit du 20 au 21 avril, aux environs de 1 heure, des individus non identifiés ont ouvert le feu sur les postes de garde de la base militaire de N’dotré, dans la commune d’Abobo, avec l’intention certaine d’y pénétrer de force. La réaction immédiate des sentinelles de faction a donné lieu à des échanges de tirs nourris, obligeant les assaillants à prendre la fuite », déclare dans ce communiqué le chef d’état-major général des armées, le général Lassina Doumbia. « Le bilan provisoire fait état d’un blessé léger côté ami, de trois tués et un blessé fait prisonnier côté ennemi », selon le communiqué, qui précise que « des opérations militaires de ratissage ont été engagées sur le terrain et se poursuivent » et que « la situation sécuritaire reste sous contrôle ».
Selon une source sécuritaire s’exprimant sous couvert d’anonymat, l’attaque a été menée par « un groupe d’individus venus à bord d’un véhicule type 4×4 de couleur noire et de taxis ». Sur les réseaux sociaux, des photos montrant les corps de trois hommes en civil morts, étendus aux pieds de soldats, circulaient mercredi. Un passeport et un permis de conduire du Liberia ont été retrouvés sur deux des assaillants tués, selon des sources sécuritaires.
Un engin explosif improvisé
Cette mystérieuse attaque intervient trois semaines après un double assaut meurtrier contre les forces de défense et de sécurité dans le nord de la Côte d’Ivoire, non loin de la frontière avec le Burkina Faso, un pays ravagé par les exactions de nombreux groupes islamistes. Le 29 mars, « une soixantaine de terroristes lourdement armés venant du Burkina Faso » avaient attaqué une position de l’armée à Kafolo, tuant deux soldats et en blessant quatre, tandis que trois « terroristes » avaient été tués et quatre arrêtés, selon l’armée. La seconde attaque avait visé un poste de gendarmerie à Kolobougou, localité également frontalière du Burkina. Un gendarme avait été tué et un autre blessé, selon l’armée. Ces attaques n’avaient pas été revendiquées.
Deux semaines plus tard, le 12 avril, un engin explosif improvisé avait explosé, sans faire de victime, au passage d’un véhicule de la gendarmerie ivoirienne dans la même zone. Il s’agissait de la première attaque de ce type sur le sol ivoirien. En juin 2020, une précédente attaque d’envergure à Kafolo, attribuée aux djihadistes du Burkina, avait fait quatorze morts dans les rangs de l’armée ivoirienne. La toute première action djihadiste meurtrière sur le sol ivoirien avait été l’attentat de Grand-Bassam en 2016, qui avait fait 19 morts, dont de nombreux Occidentaux.
Par ailleurs, en 2017, des mutineries d’anciens membres de la rébellion ivoirienne des années 2000 intégrés dans l’armée avaient ébranlé la Côte d’Ivoire. Cette crise avait terni l’image de stabilité retrouvée du pays après la crise politico-militaire de 2010-2011 et fragilisé le président Alassane Ouattara.
Le chef de l’Etat a été réélu en octobre 2020 pour un troisième mandat controversé, lors d’un scrutin boycotté par l’opposition, qui avait appelé à la « désobéissance civile ». La présidentielle a donné lieu à une violente crise électorale qui a fait une centaine de morts et un demi-millier de blessés entre août et novembre 2020. L’ancien chef de la rébellion Guillaume Soro, ex-allié devenu adversaire d’Alassane Ouattara, avait lancé un appel à la rébellion générale, non suivi d’effet. M. Soro est réputé conserver certains soutiens parmi les anciens rebelles. La tension en Côte d’Ivoire est néanmoins retombée depuis, les élections législatives de mars s’étant déroulées dans le calme et avec la participation des principaux partis d’opposition.