Dakarmidi – le président de la République Macky Sall a dissout hier le gouvernement car, pense-t-il, « un changement s’impose ». Un aveu d’échec de son fast-track et de la suppression, dans la foulée, du poste de Premier ministre. Décryptage !
C’était dans l’air du temps depuis la période d’explosion de la Covid-19 et bien avant même, c’est maintenant officiel. Le président de la République vient de procéder à la dissolution de l’attelage gouvernemental. Macky Sall l’a annoncé lors du conseil des ministres de ce mercredi et plusieurs départs seraient attendus.
Placé sous le sceau du Fast-Track, le gouvernement Macky Sall II mis en place officiellement le 6 avril 2019, au lendemain de sa réélection au soir du 24 février 2019, a consacré des changements de taille dans la nomenclature gouvernementale avec de profonds impacts sur l’architecture institutionnelle et constitutionnelle. Des décisions majeures qui avaient pris tout le monde de court, avaient été prises.
Le changement majeur reste la suppression, par voie parlementaire, du poste de premier ministre jusqu’alors assuré par Mahammed Boun Abdalah Dionne devenu, suite à cette réforme, Ministre d’Etat secrétaire général de la présidence de la République.
Au moins, 22 articles de la constitution avaient été modifiés par la loi constitutionnelle n 07/2019, adoptée par l’Assemblée nationale, le 4 mai 2019, malgré les nombreuses contestations aussi bien de l’opposition que de la société civile.
Le fast-track, une fausse couche !
Le président de la République, fraîchement réélu, avait annoncé la couleur lors de sa cérémonie d’investiture le 2 avril 2019. « Dans bien des cas, trop de routine, trop de lenteurs, de procédures et de formalités indues continuent d’enterrer l’efficacité du service public et la compétitivité de notre économie », avait-il constaté pour le déplorer.
« Dans la nouvelle dynamique que je compte imprimer a la conduite des affaires publiques, poursuit-il, j’ai la ferme intention d’inscrire toutes les actions de l’Etat en mode fast-track ». « Nous l’avons déjà? réussi pour des projets et initiatives majeurs. Il nous faut généraliser ces meilleures pratiques. Quand on aspire a? l’émergence et qu’on est tenu par l’impératif du résultat, l’urgence des tâches a? accomplir requiert de la diligence dans le travail. Ce qui doit être fait aujourd’hui ne peut être remis a? demain. Voila? le cap que j’entends fixer aux équipes qui m’accompagneront dans ce nouvel élan de réformes transformatives », indique Macky Sall.
Le cap est alors fixé. S’ensuit un chamboulement en profondeur. Le poste de premier ministre est sacrifié sous l’autel du Fast-track dont l’objectif principal était d’insuffler la rapidité et l’efficacité dans la diligence des affaires publiques.
Ainsi les services qui gravitaient autour de la primature ont été rattachés aux ministères ou à la présidence. Dans la même foulée de la recherche de l’efficacité, 16 des 32 agences de l’Etat ont été dissoutes, d’autres fusionnées.
L’intention était louable, mais au final, force est de reconnaître que la mayonnaise n’a pas pris. L’absence d’un métronome capable de mettre en musique tout cet orchestre, s’est fortement fait ressentir. Et les fausses notes aussi bien sur le plan de l’exécution des politiques que sur le plan de la communication, ont été frappantes. Et la crise de la Covid-19 avec une récession économique évitée de justesse (2,2% de taux de croissance en 2020) est venue mettre à nu les faiblesses d’un gouvernement qui avait du mal à faire sien l’esprit et la méthode de cette réforme du Fast-Track qui s’est avéré une fausse couche.
Retour du poste de Pm ?
Aujourd’hui c’est le président de la République himself qui déclare en toute honnêteté qu’un « changement s’impose ». « Ce n’est pas évident de servir son pays. Parfois ça marche, parfois il y a des soucis. Je ne suis pas un homme pressé. On parle depuis plusieurs mois de remaniement. J’ai pris le temps d’évaluer, d’analyser … et un changement s’impose. Je vais faire des changements en profondeur, aujourd’hui (hier) mercredi ou demain (aujourd’hui) jeudi dans le gouvernement et les Institutions », a-t-il avoué hier en conseil des ministres.
Le retour du poste de premier ministre dont la suppression a été visiblement une très mauvaise idée, fera-t-il partie de ces « changements en profondeur » annoncés par Macky Sall ? Certains le pensent. Mais il faudra d’abord -parallélisme des formes oblige-, retourner à l’Assemblée nationale pour une nouvelle réforme constitutionnelle.