Dakarmidi – Commercialisé début novembre, l’iPhone X, le nouveau smartphone phare d’Apple, s’annonce comme un grand succès. Selon le cabinet TrendForce, il devrait s’écouler à 27 millions d’exemplaires d’ici à la fin 2017 et les ventes devraient s’amplifier en 2018. Une perspective qui va bénéficier à la firme à pomme, mais aussi à ses 200 fournisseurs dans le monde. La France est bien placée pour en tirer parti. Car l’iPhone X comporte une part française bien plus importante que dans les anciennes générations d’iPhone. Yole Développement, un cabinet français d’études de marchés électroniques, a désossé le terminal puis analysé et évalué son contenu Made in France pour L’Usine Nouvelle. Le résultat fait ressortir deux grands gagnants, STMicroelectronics et Soitec, ainsi que la PME normande Eldim.
STMicroelectronics signe quatre composants majeurs, dont le détecteur infrarouge à temps de vol de la caméra 3D TrueDepth, qui assure le déverrouillage automatique du terminal par reconnaissance faciale, principale innovation de l’iPhone X. Le fabricant franco-italien de semiconducteurs est le fournisseur exclusif du capteur de proximité, du détecteur infrarouge de la caméra 3D à 1,4 mégapixel, du circuit de contrôle tactile 3D et de la puce de gestion de la consommation de courant de l’écran Oled. Ces composants sont réalisés sur le site de Crolles, près de Grenoble (Isère). Yole Développement estime leur valeur à 8 dollars. Dans l’iPhone 7, l’entreprise est présente uniquement avec le capteur de proximité à 2 dollars. Pour le capteur de proximité, le groupe, dirigé par Carlo Bozotti, ne se contente pas de fournir le détecteur infrarouge à temps de vol. Il agit aussi en ensemblier en l’assemblant dans un module complet de caméra avec d’autres composants venant notamment de Philips pour la diode Vcsel et Texas Instruements pour son circuit pilote. C’est grâce à ce travail d’intégration, qui réclame un grand savoir-faire selon Jean-Marc Chery, le numéro deux du groupe, que STMicroelectronics passe d’un composant qui coûte environ 20 cents de dollars à un module de 2 dollars.
Soitec est présent dans le détecteur de la caméra 3D et dans le frontal radiofréquence, le module situé juste avant l’antenne du mobile. En effet, il fournit le substrat de silicium sur isolant de deux composants : le détecteur infrarouge de STMicroelectronics dans la caméra 3D, premier du genre sur le marché à s’appuyer sur du silicium sur isolant, et le module radiofréquence combinant commutateurs de fréquence et tuners d’antenne fournis à Apple par l’américain Skyworks. Au total, cela représente environ 60 mm2 de silicium sur isolant et une valeur de 50 cents de dollar par appareil, selon Yole Développement. En comparaison, dans l’iPhone 7, Soitec est présent uniquement dans le module radiofréquence, avec 27 mm2 de silicium sur isolant de 35 centimes de dollars.
« Par rapport au détecteur infrarouge dans le capteur de proximité, le détecteur infrarouge de la caméra 3D est bien plus complexe et plus gros, estime Pierre Cambou, analyste chez Yole Développement. Le recours au silicium sur isolant plutôt qu’au silicium massif traditionnel améliore les performances en sensibilité et bruit, répondant aux exigences d’Apple. C’est grâce à cela que ST a emporté le marché. » Il fournit une image de 1,4 mégapixels, tient dans une puce de 25 mm2, contre 2 mm2 pour le détecteur infrarouge à un point du capteur de proximité, et revient à 3 dollars, selon le cabinet français.
Eldim n’est pas présente dans l’iPhone X. Mais cette PME normande de 40 personnes réalise l’instrumentation optique nécessaire au test, à l’assemblage et au packaging du module de caméra 3D. Elle fournit des équipements sur mesure au coréen LG Innotek, identifié par Yole Développement comme l’acteur qui teste, assemble et conditionne le module caméra 3D de l’iPhone X. Ce contrat représenterait quelques millions de dollars et serait susceptible de passer à quelques dizaines de millions de dollars en 2018 quand d’autres constructeurs de mobiles auront repris la technologie de caméra 3D d’Apple, selon Pierre Cambou.
Il faut ajouter les technologies de compression d’images, de sans-contact ou d’interface radio, embarquées sous forme de licences de brevets de Technicolor, Orange, Alcatel-Lucent (aujourd’hui Nokia) ou encore du CEA.
La part française de l’iPhone X est estimée par Yole Développement à 8,5 dollars pour le matériel, auxquels s’ajoute 1,5 dollar de redevances de brevets, selon L’Usine Nouvelle, ce qui fait un total de 10 dollars par téléphone. Pour les industriels tricolores, les perspectives de développement vont au-delà de l’iPhone X. « Apple a toujours servi d’aiguillon dans les mobiles, explique Jean-Christophe Eloy, le PDG de Yole Développement. Ce qu’il fait sur l’iPhone X avec la caméra 3D sera repris par Samsung, Huawei, Xiaomi… On l’a vu avec le capteur de proximité de -STMicroelectronics. D’abord embarqué sur l’iPhone 7, il équipe aujourd’hui 25 smartphones différents. »
Les composants made in France