Le Sénégal célèbre ce 3 mai, avec l’ensemble des pays du monde, la journée internationale
de la liberté de la presse. C’est l’occasion, pour les acteurs des médias sénégalais, réunis au
sein de la Coordination des Associations de Presse (CAP), de faire l’état des lieux en matière
de liberté de la presse au Sénégal.
Malheureusement, beaucoup d’atteintes à la liberté de presse ont eu lieu au Sénégal ces
derniers temps, notamment au mois de mars 2021, lors des évènements de l’affaire
Ousmane Sonko – Adji Sarr. En quelques jours, les menaces, les attaques, violences
exacerbées et atteintes à l’endroit des journalistes, techniciens et maisons de presse se sont
enchainées et se sont présentées sous différentes formes.
Le Préfet de Dakar a donné l’ordre aux forces de défense et de sécurité de charger les
journalistes et techniciens des médias, qui couvraient le cortège du député Ousmane Sonko,
en route pour répondre à une convocation du juge d’instruction. Cet acte de violence
physique, ordonné par une autorité administrative à l’encontre de journalistes et techniciens
des médias, est une grave atteinte à la liberté de presse, en voulant empêcher aux
journalistes de faire leur travail.
De la même manière, la presse a été interdite d’accès à l’Assemblée nationale pour la
couverture de la session parlementaire sur la levée de l’immunité du député Ousmane
Sonko. C’est là aussi une violation flagrante de la liberté de la presse, quand les débats de la
représentation nationale se font à l’insu des citoyens qu’ils sont censés représenter.
Le summum des violations de la liberté de la presse a été atteint avec la décision illégale du
CNRA de couper le signal des télévisions privées Sen-TV et Walf-TV, alors que la procédure
prévue en la matière n’a pas été respectée. L’organe de régulation de l’audiovisuel a violé les
textes qui le régissent, qui encadrent et organisent l’exercice du métier de journalisme au
Sénégal.
Ce terrible mois de mars pour la liberté de la presse a aussi vu des menaces proférées contre
des journalistes, des destructions de matériels des femmes et hommes des médias, des
saccages des maisons de presse. Le monde des médias a vécu des jours sombres avec un
monstre qui s’est démultiplié et s’est présenté sous plusieurs pour intimider, museler tout
un secteur.
Toutes ces violations de la liberté de la presse se font en toute impunité sans qu’aucune
enquête ne soit jamais diligentée, encore moins des poursuites ou la traduction de ces
fossoyeurs de la démocratie devant les tribunaux. A l’exception des nervis qui ont attaqué et
vandalisé les locaux du journal «Les Échos» le 3 août 2020 qui sont actuellement dans les
liens de la détention.
Cette situation de la liberté de la presse n’honore pas notre pays et cela représente une
grave et forte menace pour notre démocratie. Elle va encore, malheureusement, impactée
fortement la position du Sénégal dans le prochain classement de Reporters Sans Frontière
(RSF). Déjà dans l’édition 2020, notre pays a perdu deux places en chutant de la 49 e place.
Par ailleurs, c’est tout le sens du sit-in que nous organisons en guise d’alertes, en cette
journée internationale de la liberté de la presse.
L’émergence d’un État de droit au Sénégal ne saurait s’accommoder des violations de la
liberté de la presse.
Nous, acteurs des médias, nous en appelons à tous les Sénégalais, pour préserver une presse
libre et indépendante, dans le strict respect de la loi. Une presse libre et indépendante est le
garant d’une stabilité politique et sociale qui a toujours prévalu au Sénégal. C’est cette
presse libre et indépendante qui nous a valu deux alternances politiques en 2000 et 2012.
Autant les atteintes à la liberté de la presse sont une menace pour la démocratie
sénégalaise, autant la crise économique et sociale aigüe en est une autre. C’est pourquoi
nous lançons un appel au président de la République pour l’adoption de tous les textes
d’application du Code de la presse, sans lesquels les conditions d’une presse
économiquement viable ne sont pas assurées. Plusieurs lois essentielles ne sont toujours pas
adoptées sur : la publicité ; le nouvel organe de régulation défini par le Code de la presse, la
Haute Autorité de Régulation de la Communication audiovisuelle (HARCA) ; le financement
de l’audiovisuel public ; loi sur l’accès à l’information…
Préservons la liberté de la presse. Créons les conditions d’une presse économiquement
viable. Sauvegardons les conditions pour une presse libre et indépendante, gage de
pluralisme politique.
La presse sénégalaise.
Membre de l’anpels – Association nationale des professionnels de la presse en ligne du Sénégal