“Libération” révèle que le parquet de Dakar a ouvert une information judiciaire pour blanchiment de capitaux, abus de biens sociaux et escroquerie dans le cadre d’une rocambolesque affaire qui oppose la mairie de Dakar à l’homme d’affaires Pape Abdoul Bâ et Corfitex. Pourtant, tous les témoins entendus dans le cadre de de l’enquête policière conduite par la Sûreté urbaine, ont déchargé Pape Abdoul Bâ.
Selon les informations de Libération, le parquet de Dakar a ouvert une information judiciaire pour blanchiment de capitaux, abus de biens sociaux et escroquerie contre l’homme d’affaires Pape abdoul Bâ et Cortifex, à la suite d’une enquête de la Sûreté urbaine (Su). Une inculpation a été requise.
Partie civile dans cette rocambolesque affaire, la mairie de Dakar soutient, via Babacar Sadikh Seck, maire des Hlm et représentant de la ville dans le Conseil d’administration de Cortifex, que cette société a comme actionnaires la municipalité, Oldrich international limited et Sci Ama Invest. Elle avait, d’après sa déposition face aux policiers, émis un emprunt obligataire pour construire le centre commercial 4C. C’est dans cette perspective que Cortifex avait donné ses titres fonciers en garantie au Fagace dont les Etats, parmi lesquels le Sénégal, sont les seuls actionnaires. En effet, Fagace s’était porté caution auprès de la Société générale de banque du Sénégal (Sgbs).
Par la suite, Pape abdoul Bâ aurait fait intervenir dans le capital de Corifex Sa, Sci Ama invest dont il est actionnaire avec ses enfants. Il a aussi affirmé que ce dernier est actionnaire d’Oldrich international limited qui a prêté à Cortifex Sa, la somme de six millions d’euros pour rembourser les créanciers obligataires. Ayant fait entrer ces deux sociétés dans le capital, Pape abdoul Bâ s’est autoproclamé de fait, Président du conseil d’administration, selon la partie civile.
D’après elle, Bâ et son fils ont fait ainsi acheter à la Sci Ama Invest, les terrains de Cortifex Sa à un prix minoré, avant même l’arrivée du terme de remboursement, ce qui n’a pas permis de rétribuer le prêt de la société Oldrich international limited. En outre, une somme de 350 millions de Fcfa a été remise à Pape Abdoul Bâ par le comptable de Cortifex, «sans aucun justificatif » d’après Babacar Sadikh Seck, qui soutient que cette transaction aurait été dénoncée par les auditeurs.
Entendu comme témoin, Me Pape Sambaré Diop démolit les accusations de la mairie de Dakar.
Toujours selon lui, par pv de réunion du Conseil d’administration de Cortifex Sa en date du 7 mars 2017, présidé par Pape abdoul Bâ, la créance des trois actionnaires qui y étaient présents, à savoir Oldrich international limited, Sci Ama invest et Seydi Guindo (la mairie de Dakar absente pour convocation irrégulière, selon le plaignant), a été arrêtée à la somme de 8,8 milliards de FCfa à l’égard de ladite société. Cette situation financière a donné lieu à l’augmentation du capital décidé par l’assemblée générale pour apurer les dettes fictives et réduire les actions des deux autres actionnaires, la mairie de Dakar et Seydi Guindo, pratiquement à moins du tiers du capital social de Cortifex Sa.
Cette assemblée générale a été le prétexte, selon le plaignant, pour Bâ, son fils et le commissaire aux comptes qui a formellement démenti l’accusation, pour préparer et convoquer l’ag du 4 mai 2017, afin de ramener les actions de la mairie de 15190 à 1800, la dépouillant ainsi de 3,640 milliards, montant pour lequel elle avait souscrit les actions suivant délibération du conseil municipal en date du 14 juillet 2003.
Malgré la mise en demeure en date du 23 juin 2017 servie par la mairie de Dakar à Pape Abdoul Bâ pour annuler l’ag «illégale et mafieuse » selon le plaignant, les procès-verbaux de délibération de celle-ci ont été déposés le 15 septembre 2017, au rang des minutes du notaire Pape Sambaré Diop.
Interrogé comme témoin, Pape Sambaré Diop a contredit la ville de Dakar en assurant que tous les actes posés par Pape Abdoul Bâ, sont légaux. De même, il assure que les deux ag en cause ont été régulièrement convoqués, contrairement aux dires de la mairie de Dakar. En résumé, dans cette affaire, on ne peut rien reprocher, d’après lui, à Bâ qui a aussi rejeté toutes les accusations de la partie civile, en produisant plusieurs documents.
Concernant d’ailleurs, les 350 millions qui lui ont été remis, le comptable a assuré aussi aux policiers que cette transaction était régulière et que même l’Inspection générale des finances (Igf) qui a enquêté sur Cortifex, n’a pas retenu ce fait dans son rapport. Bâ précise d’ailleurs avoir déposé l’argent dans son compte, pour éviter les saisies qui étaient devenues récurrentes. Une affaire à suivre.