Ils peuvent être des porteurs sains, devenir malades de la maladie du Covid-19 ou contracter d’autres affections. Dans le cadre de la riposte, Ansouma Dione, infatigable défenseur des malades mentaux, invite à l’Etat à se pencher sur le sort de ces citoyens errants qui peuvent être de véritables vecteurs de propagation du virus tant redouté.
Ils vivent parmi nous, et sont en nombre non négligeable. Eux, ce sont les malades mentaux errants dont la situation est, évidemment, particulière. Ne serait-ce que parce qu’ils mangent dans les poubelles, dorment à la belle étoile et ne se préoccupent pas de leur hygiène. Une situation qui les expose au coronavirus. Ils risquent d’avoir le virus en eux et d’assurer la transmission communautaire. Une alerte faite par le docteur Souleymane Loucar, psychiatre à l’hôpital régional de Louga, et Ansoumana Dione, président de l’Association sénégalaise de soutien et d’assistance aux malades mentaux (Assamm), selon qui, ces déficients mentaux peuvent être de véritables vecteurs de propagation de la pandémie de covid-19 au Sénégal.
Pire, des agents de la transmission communautaire tant redoutée. « Un seul malade mental contaminé peut propager la maladie chez beaucoup de citoyens. Un fois contaminé, le malade mental peut ne pas présenter de symptôme, ni de signe. Il peut, en quelque sorte, être un porteur sain, et en même temps transmettre la maladie en douceur. Comme il pourrait aussi développer une forme plus sévère de la maladie. Un seul objet ramassé quelque part puis abandonné plus loin, ou un malade qui touche à la porte d’une maison peut contaminer plusieurs membres d’une même famille sans que celle-ci s’en rende compte. C’est là où ça devient extrêmement dangereux », soutient M. Dione.
Selon le Dr Loucar, si rien n’est fait, on ne devrait pas s’étonner de voir un malade mental errant mourir du virus dans la rue. Tout comme le président de Assamm, le psychiatre souligne que tout ce qui est jeté dans la poubelle peut être source de contamination du virus. Pire encore, dit-il, les malades mentaux errants peuvent entretenir cette transmission communautaire tant redoutée. Car « en squattant les maisons, les poubelles, les surfaces, ils constituent carrément des vecteurs de cette transmission communautaire », selon ce spécialiste de la santé mentale. D’où l’urgence de prendre en charge ces malades mentaux errants.
Ansoumana Dione et Dr Loucar sont formels. Si on veut vraiment gagner la guerre sanitaire enclenchée contre le Covid 19, l’Etat devrait impérativement se pencher sur la situation de ces milliers de malades qui errent dans les rues à travers le pays. Pour les protéger contre le virus et aussi éviter qu’ils ne le propagent, le psychiatre de l’hôpital de Louga propose de les protéger. « Et c’est à l’Etat de prendre ses dispositions pour qu’il n’y ait personne dans la rue. Puisqu’ils peuvent se contaminer et certains peuvent en devenir des malades et d’autres des porteurs asymptomatiques. Ils peuvent toujours entretenir la présence du virus sur notre territoire à travers la rue. Or, tant que le virus est dans la rue, il y a possibilité qu’une contamination se fasse. Il est important de prendre en charge ces malades mentaux, de les protéger et d’éviter qu’ils soient porteurs ou malades de ce virus », a alerté Dr Loucar qui propose de mettre l’accent sur la prévention.
Bientôt, l’errance des malades mentaux sera un mauvais souvenir
Une doléance qui ne semble pas tomber dans l’oreille d’un sourd. Puisque avec le ministère de la Santé, « on n’y travaille dans un comité », dixit le président de l’Association de soutien et de suivi aux malades mentaux (Assamm). D’après Ansoumana Dione, « tout cela va bientôt être un mauvais souvenir puisque d’ici quelques jours, ces malades mentaux devront être pris en charge ». « Je devais laisser la primeur au président de la République, au ministre de la Santé ou aux autorités compétentes de livrer cette information, mais je dois reconnaître que votre journal a la primeur de cette information par rapport à la prise en charge des malades mentaux errants. Je suis en train de travailler là-dessus avec les services du ministère de la Santé. Depuis un certain temps, je suis en contact direct avec nos autorités sanitaires qui sont conscientes de la nécessité de la prise en charge et de l’insertion sociale de ces personnes vulnérables. Au sein du ministère de la Santé et de l’Action sociale, notamment avec la direction générale de l’Action sociale que dirige le Dr Arame Top, des dispositions sont en train d’être prise dans ce sens. Dans les tout prochains jours, les Sénégalais verront la situation des 3000 malades mentaux errants s’améliorer. Avec la directrice générale de l’Action sociale et son équipe, nous sommes en train de travailler pour la protection de cette couche vulnérable. C’est dans le cadre d’un comité de suivi interne dans la riposte au covid-19 » révèle Ansoumana Dione.
…Et le centre de Kaolack restitué à l’Assamm « Nous devons faire en sorte que ces malades soient à l’abri de la population en les prenant en charge au niveau de notre structure de Kaolack qui pourrait nous être restituée pour que ces malades puissent être traités à tour de rôle. La priorité sera donnée aux départements les plus affectés au covid 19. Aujourd’hui la ville de Touba et les régions de Dakar, de Saint Louis et de Ziguinchor, entre autres, devront être prioritaires par rapport à ces malades mentaux. Nous allons récupérer l’ensemble des malades qui se trouvent dans ces départements pour les faire interner dans notre structure pour que, une fois stabilisés, ils puissent regagner leurs familles d’origine. Ensuite, nous mettrons d’autres malades qui errent dans les rues des autres régions affectées pour qu’ils puissent eux aussi accéder aux soins, bénéficier d’un soutien. Ils peuvent propager la maladie sans pour autant en souffrir c’est-à-dire la transmettre en douceur. Ce sont non seulement des personnes à risque, mais encore ces malades peuvent aussi transmettre la maladie à d’autres individus en cas de contamination ».
En outre, Ansoumana dit regretter le fait que le chef de l’Etat ait reçu une partie des forces vives de la Nation en ignorant ceux-là qui devaient être les premiers à être reçus au palais pour une meilleure réponse face au virus qui affole toute la planète. Un avis partagé par Dr Loucar selon qui il fallait associer tout le monde à ces audiences au Palais. Car, soutient-il, « ce sont tous les citoyens qui doivent faire bloc pour faire face à cette pandémie ».