Dakarmidi – Rarement perte humaine n’a été profondément ressentie comme la disparition du Vénéré Serigne Saliou Mbacké, survenue dans la nuit du 27 au 28 décembre 2007. C’était un jour obscur, morose et couvert d’un nuage de tristesse et d’amertume. Tout le monde est informé de la triste nouvelle, soit très tôt par une communication de bouche à oreille, soit plus tard par les ondes de toutes les radios qui diffusaient le message entrecoupé d’émouvant récital du coran. Chacun était au courant mais chacun refusait de croire à la vérité : l’Eternel Serigne Saliou a disparu loin de nos yeux ! Une véritable foudre qui s’abattait sur les coeurs !
En moins de vingt quatre heures Touba, la ville sainte accueillit une foule monstre qui venait se recueillir devant la lumière de Serigne Saliou. Des bousculades, des cris, des transes, des chants, des crispations? tels étaient les sentiments les mieux partagés ce jour là sur la Terre de Touba, qui plongeait déjà dans une totale confusion. Chacun sentait au plus profond de soi-même un vide, un dépeuplement, un manque qu’il ne pourra jamais combler. On considérait avec commisération les enfants comme les grands perdants ou les orphelins les plus dépossédés. Mais les plus avertis savaient que ce nuage de douleur allait vite dissiper. Car Serigne Saliou n’était pas mortel mais éternel, pour le coeur de celui qui est éclairé ! En effet, Serigne Mouhamadou Lamine Diop « Dagana » avait magnifié en ces termes la venue au monde de Serigne Saliou en 1915 à Diourbel : « Que Dieu en fasse un soleil éternel dans le ciel de son époque, effaçant ainsi la face obscurcie de celle-ci ».
Il n’existe pas un jour ou une nuit dont on ne se souvient pas de Serigne Saliou, en prononçant son nom ou en magnifiant son oeuvre, un patrimoine gigantesque. L’annonce de son nom fut communiquée pour la première fois à Serigne Mouhamadou Lamine Diop « Dagana » par son Vénéré père Serigne Touba : Aççâliha ! Un nom qui était l’étendard même de sa mission. Donc le pur, le probe, ou encore le vertueux Serigne Saliou avait fait de sa vie une adoration exclusive de Dieu et une observance sans faille des préceptes de l’islam, jusqu’à devenir un exemple universel pour toute la génération de son époque. Cet homme de Dieu était alors investi pour assurer la pérennité de l’oeuvre grandiose de Serigne Touba Khadimoul Rassoul. Ce dernier avait même annoncé dans l’un de ses khassaides que c’est Serigne Saliou qui parachèvera ses oeuvres et ses nobles intentions.
Serigne Saliou Mbacké a fait l’unanimité sur un point : un homme de Dieu d’une sainteté inégalable ! Sa pureté de coeur, son détachement des mondanités terrestres et son amour constamment renouvelé à Dieu, avaient fait de lui le point focal de l’humanité vers lequel convergeaient tous les bienfaits. Toutes les personnes de races, d’ethnies, de nations et même de religions différentes lui vouaient une révérence pour ce qu’il était. Tout le monde était convaincu et convenu de son statut d’homme multidimensionnel pétri de foi inébranlable en Dieu. C’est ainsi qu’on lui concédait volontiers les termes d’adorateur de Dieu, d’éducateur, de guide, de fédérateur, de bâtisseur, d’acteur de développement, pour n’en citer que ceux-ci.
Avez-vous vu ou entendu un dirigeant ou un chef quelconque qui a réalisé des travaux pour l’épanouissement et le bien être de sa communauté durant son règne sans gaspillage ni détournement si minime soit-il ? Oui c’est bien Serigne Saliou 5ième Calife de Serigne Touba fondateur du mouridisme. En seize ans seulement, le Vénéré Serigne Saliou a entamé et terminé de grands travaux à l’envergure d’un Etat souverain. Il était rigoureux dans la gestion des deniers de Touba, la ville sainte des mourides. Après sa disparition, son fils Serigne Moustapha Saliou a fait un acte plus que symbolique qui servira de leçon à tout gouvernant soucieux de transparence et de bonne gouvernance. En effet, Serigne Moustapha Saliou avait fait un « transfert de documents et désengagement » sur tous les fonds et biens que son défunt père gérait sous le couvert de Serigne Touba, au 6ième Calife Serigne Mouhamadou Lamine Bara Falilou Mbacké, en mars 2008. En résumé, Serigne Saliou avait fait des réalisations d’un coup global de plus de quatre milliards de Francs CFA et avait légué à la communauté Mouride un montant de plus de seize milliards de Francs CFA. Quel bel exemple pour les générations futures ! Quelle belle mission accomplie !
L’investissement humain le plus productif est sans nul doute l’éducation et la formation, et Serigne Saliou Mbacké a joué un rôle remarquable dans ses secteurs de développement durable. Il est rare ou peu connu dans le monde de voir des enfants et adultes de tout âge pris entièrement en charge dans des centres de formation et d’éducation. En effet, Serigne Saliou Mbacké avait fondé à travers tout le pays 28 centres d’éducation et de formation communément appelés « daara » internant des milliers d’individus à qui il assurait nourriture et couverture gratuitement. Son oeuvre est immense et colossal tant sur le plan éducationnel qu’économique. A son époque, il était le premier producteur d’arachide et de mil au Sénégal voire l’Afrique, car son vaste champ de Khelcom d’une superficie d’environ 50 000 hectares était un véritable grenier pour le pays.
En somme, Serigne Saliou Mbacké était un homme d’une dimension spirituelle incontestablement supérieure. Il était un véritable fédérateur qui rassemblait autour de lui des personnes d’origines diverses. Il a éduqué, dressé voire façonné des milliers d’hommes, des enfants surtout, à travers ses « daara » uniques en son genre. Les pensionnaires de sa grande et haute cour pédagogique n’ont jamais à envier les autres qui ne l’ont pas fréquenté. Il faisait l’unanimité et nul n’ignorait sa magnanimité. Il avait la suprématie de sauver à distance, le coeur même d’un individu en réticence. Les témoins sont patents comme le soleil levant : Serigne Saliou était une utilité publique.
Je me rappelle du premier jour où j’ai vu Serigne Saliou Mbacké à Touba, tout blanc vêtu reflétant un coeur immaculé à travers un radieux visage qui rappelle tous les caractères d’un Saint. Un contact de sa main, m’a permis de s’abreuver de sa source inépuisable et intarissable de bienfaits. Que Dieu Récompense Serigne Saliou Mbacké en agréant son oeuvre « bi barakati » Serigne Touba, le Serviteur Eternel du Prophète Mouhamed, Paix et Salut sur eux. Dieureudjeuf Serigne Saliou Mbacké.
Cheikh Ibrahima LO
Docteur en Microbiologie
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Source : Majalis.org