Dakarmidi – Le Prophète occupe une place unique dans la conscience et la vie des musulmans du monde entier. Il est notre modèle, notre exemple à suivre et notre boussole sur le chemin qui mène à Dieu : « Vous avez certes dans l’envoyé de Dieu, un si bel exemple pour celui qui espère en Dieu et au jour du jugement dernier » (Coran 33/21).
Le prophète Muhammad était habité par Dieu et imbibé de Sa présence. Il ne vivait que par LUI et pour LUI. En dépit de l’ampleur parfois hallucinante des adversités qu’il allait constamment affronter, les batailles qu’il devait livrer à ses ennemis, les sollicitations de ses compagnons qu’il fallait aider, orienter et parfois défendre et malgré toutes ses autres occupations nombreuses et variées, il trouvait le temps pour passer une partie de ses nuits non pas à se reposer mais à pleurer, méditer et prier. Ses chevilles étaient gonflées et tachées de sang à cause de ses prières nocturnes qui n’en finissaient pas (1). Il prolongeait tellement ses prosternations au point que parfois, on le croyait mort (2). Inquiète pour lui, ‘Aisha, son épouse lui dit un jour : « N’exagères tu pas un peu alors que Dieu a pardonné tous tes péchés »: « J’essaye d’être un digne serviteur et adorateur de Dieu, de LE remercier et de LUI (3) rendre un honneur digne de LUI », répondit le prophète.
Le prophète Muhammad était profondément attaché à la paix. Arrivé à Médine en 622, après des années de persécution et de tension, ses toutes premières paroles mettaient les musulmans devant leurs responsabilités fondamentales : « Répandez la paix, donnez à manger à ceux qui ont faim, honorez les liens de parenté, priez alors que les gens dorment, vous entrerez au paradis en paix », disait-il aux nombreux musulmans venus l’accueillir. Presque tous les enseignements spirituels du prophète sont contenus dans ces courtes phrases.
Le prophète Muhammad était d’une infinie douceur et d’une profonde tendresse. Il était élégant, courtois, facile d’accès, ouvert d’esprit, naturel, accueillant et bienveillant. Un jour, un homme lui demanda : « Ô envoyé de Dieu! Si je commets un péché, sera-t-il inscrit (dans le registre des mauvaises actions) ? Il le sera ! Répondit le Prophète. Et si je m’en repentais? Il sera effacé, dit le prophète (Psl). Et si je le commettais une nouvelle fois? Il sera inscrit, dit-il. Et si je m’en repentais ? Il sera effacé, dit le prophète (Psl). Et si je le commettais à nouveau ? Il sera inscrit, dit-il. Et si je m’en repentais ? Il sera effacé, dit le prophète (Psl). Jusqu’à quand sera-t-il effacé ? dit l’homme. « Dieu ne se lassera de te pardonner, que lorsque tu te lasseras de lui demander pardon », répondit le Prophète.
Le prophète Muhamed était très respectueux de la diversité religieuse que le Coran considère comme une volonté Divine (4). Dès son installation à Médine, il rédige un pacte établissant les relations entre les musulmans et les autres communautés (5) : « Ils ont les mêmes droits et les mêmes devoirs que nous », et appelle au respect foncier des autres croyants : « Quiconque fait du mal à un chrétien ou à un juif sera mon ennemi le jour du Jugement. »
C’est pour toutes ces raisons que nous devons aimer le prophète plus que nous mêmes. Cet amour, considéré comme un acte d’adoration, nous permet de donner un sens à notre vie, de lutter au quotidien contre les forces les plus négatives de notre être et de vivre en paix avec les autres, musulmans ou pas, croyants ou pas.
Malheureusement, quand j’étais jeune, la plupart des biographies du prophète (Psl) disponibles sur le marché et qu’utilisaient mes enseignants d’éducation islamique à la mosquée et l’école, ne faisaient que relater les campagnes militaires du prophète (psl). On devait apprendre par cœur les dates des batailles, les détails sur les combats, le nombre de morts côté musulmans et non musulmans, les prisonniers …
De cette période, j’ai retenu du prophète, l’image d’un homme guerrier brandissant son épée et maniant parfaitement ses arcs et ses flèches. Les dimensions de la paix, l’amour, la miséricorde, le pardon, le combat intérieur, la spiritualité et le respect de la diversité religieuse citées plus haut, étaient complètement occultés, plus par ignorance et non-consciences que par calcul stratégique.
Plus de 20 ans après, on continue d’enseigner ici et là, la vie du prophète à des enfants et des adolescents avec les mêmes méthodes, les mêmes discours et donc les mêmes erreurs. On leur inculque la culture de l’interdit et la victimisation, on les enferme dans des clôtures dogmatiques et des tabous qui ne sont que des constructions humaines et ce faisant on les isole petit à petit au point de les déconnecter de la réalité de leur pays. Le résultat, on le connait.
Il n’est pas question ici de généraliser, ni de simplifier trop rapidement certaines problématiques complexes et compliquées, mais il faut reconnaitre que beaucoup de mosquées, d’écoles de langue arabe et d’éducation islamique, sont malheureusement toujours confrontées à cette situation aux conséquences désastreuses pour l’avenir de nos enfants.
Aujourd’hui, les préoccupations, les discours et les actions des responsables musulmans se rattachent tous à la formation des imams. Cette formation est certes nécessaire, voire indispensable mais combien insuffisante.
Les penseurs, intellectuels et théologiens musulmans de France doivent assumer pleinement leur responsabilité devant l’histoire. Ils doivent apprendre à se respecter, à débattre et à travailler ensemble pour revoir notamment les livres qui traitent de la vie du prophète et qui trahissent les enseignements transmis par le prophète de la miséricorde.