Dakarmidi – Fatima était la plus jeune des filles du Prophète (paix et bénédiction d’Allah soient sur lui) . Elle est née cinq années avant le début de la révélation ; le jour même où les Quraysh choisirent son père pour la pose de la pierre noire au terme de la reconstruction de la Kaaba.
Elle vécut heureuse auprès de son père, de sa mère, et de ses soeurs, en particulier Zaynab qui joua, pour elle, le rôle de mère. Fatima devait se séparer de ses soeurs, l’une après l’autre, à la suite du mariage de chacune d’elle.
Elle était encore toute jeune lorsque la révélation descendit sur son père. Elle vécut avec le fils de son oncle paternel, Ali Ibn Abu Talib, que le Prophète (paix et bénédiction d’Allah soient sur lui) joignit à sa famille et considéra comme son fils. ‘Ali, qui n’avait que quatre ans de plus qu’elle, fut donc pour Fatima un frère et un compagnon. Témoin des peines endurées par son père
Dès la cinquième année de son âge, Fatima devait, malgré elle, affronter les durs heurts soulevés par les idolâtres contre la nouvelle religion qu’était l’Islam. C’est dire que, sans regretter cette période, elle ne connut pas une enfance tranquille.
Fatima était présente lorsque ‘Aqaba ibn Abu Mu’it arriva, portant dans un sac les entrailles d’un mouton. Il les jeta sur le dos de l’Envoyé de Dieu (paix et bénédiction d’Allah soient sur lui) , au moment où il se prosternait. Il ne leva pas la tête jusqu’au moment où sa fille Fatima s’approcha de lui, prit la saleté jetée sur son père et la jeta sur ‘Aqaba. A ce moment, il releva la tête et lança la malédiction contre Abu Jahl, ‘Ataba et d’autres encore. Cette malédiction fit peur aux associateurs. Ils stoppèrent leurs arraquent et laissèrent le père de Fatima poursuivre sa prière. Après quoi, le Prophète (paix et bénédiction d’Allah soient sur lui) et sa fille quittèrent les lieux, la main dans la main et se dirigèrent vers leur maison.
A une autre occasion, Fatima était avec le Prophète (paix et bénédiction d’Allah soient sur lui) alors qu’il faisait le « Tawâf » autour de la Kabah. Une foule de Quraysh se réunit autour de lui, le saisirent et essayèrent de l’étrangler avec ses propres vêtements. Fatima cria et appela à l’aide. Abu Bakr accouru et réussit à libérer le Prophète (paix et bénédiction d’Allah soient sur lui) . Il implorait alors: ‘Tueriez-vous un homme qui dit : ‘Mon seigneur est Allah’. Au lieu de baisser les bras, la foule se tourna vers Abu Bakr et commença à le battre jusqu’à ce que le sang coule de sa tête et de son visage.
Emigration à Médine
Ce fut dans ce contexte que Fatima grandit jusqu’au jour où sa famille subit le blocus des mécréants. Elle vécut donc dans le campement avec les privations et les souffrances et ressortit comme tous les autres pour retourner à la Mecque. Elle fut alors témoin de la mort de sa mère Khadija. Quelques temps après, elle suivit son père à Médine à la suite de son émigration avec d’autres Compagnons. ‘Ali, qui resta à la Mecque pour surveiller et protéger les arrières du Prophète (paix et bénédiction d’Allah soient sur lui) , rejoindra ce dernier trois jour après.
Le voyage de Fatima et de sa soeur Umm Kaltoum à Médine ne se fit pas sans difficulté. Des associateurs les rattrapèrent en cours de route. Al Huwayrath Ibn ‘Abd Ibn Qassi, un de ceux qui firent le plus de mal à leur père à la Mecque, piqua de sa lance le chameau monté par Fatima. Celle-ci fut déséquilibrée et tomba sur le sol. A cette époque, c’était une jeune fille frêle et faible de corps.
Fatima finira, en fin de compte par arriver à Médine. Elle fut témoin de la fraternité que son père avait suscitée entre les Muhajirin et leurs hôtes les Ansars. Ce fut une fraternité concrétisée par des actes tangibles. Le Prophète , lanca cet appel :
– « Soyez frères en Dieu, Que chacun prenne un frère. Quant à moi, voici mon frère » et il désigna Ali.
Son mariage avec ‘Ali
A cette période, Fatima s’approchait de sa dix-huitième année. Ce n’était plus la fille qui, toute jeune, disait à sa mère qu’elle ne se marierait jamais car elle ne tenait pas à se séparer de ses parents comme ses soeurs l’avaient fait. Cependant, elle atteint l’âge de la maturité et savait que le mariage est un état naturel depuis Eve jusqu’à sa mère et ses soeurs. Elle avait à ses côtés ‘Ali qu’elle voyait quotidiennement. Celui-ci avait des vues sur elle mais il n’osait pas les exprimer ouvertement.
En l’an II de l’Hégire, elle reçut des propositions de mariage par l’intermédiaire de son père, dont deux furent rejetées. Ali, le fils d’Abu Tâlib, rassembla alors son courage et vint demander sa main au Prophète. En présence du Prophète (paix et bénédiction d’Allah soient sur lui) pourtant, il se laissa intimider et perdit sa langue. Il ne quitta pas le sol des yeux et ne put dire un mot. Le Prophète (paix et bénédiction d’Allah soient sur lui) lui demanda alors :
– ‘Pourquoi es-tu venu ? As-tu besoin de quelque chose ?’
Ali ne pouvait toujours pas parler, alors le Prophète (paix et bénédiction d’Allah soient sur lui) suggéra :
– ‘Peut-être es-tu venu pour demander Fatima en mariage ?’
– ‘Oui’ répondit Ali.
Le Prophète (paix et bénédiction d’Allah soient sur lui) dit simplement : ‘Marhaban wa ahlan – Bienvenue dans la famille’ et cela fut prit comme l’approbation du Prophète (paix et bénédiction d’Allah soient sur lui) par Ali et par les Ansars qui l’attendaient dehors. On rapporte aussi que le Prophète approuva et demanda à Ali s’il avait quelque chose à donner en dot. Ali répondit que non. Le Prophète (paix et bénédiction d’Allah soient sur lui) lui rappela qu’il avait un bouclier qu’il pouvait vendre.
Ali vendit le bouclier à Uthman pour quatre dirhams et pendant qu’il se dépêchait de retourner chez le Prophète (paix et bénédiction d’Allah soient sur lui) pour lui remettre la dot, Uthman l’arrêta et lui dit :
‘Je te rends ton bouclier comme cadeau de ma part pour ton mariage avec Fatima’.
Le Prophète lui-même dirigea la cérémonie du mariage. Pour le « Walîmah », on servit aux invités des dattes, des figues et une mixture de dattes et de beurre gras appelé hais. Un membre dirigeant des Ansars offrit un bélier et d’autres firent des dons de céréales. Tout Médine se réjouit.
Pour son mariage, on rapporte que le Prophète (paix et bénédiction d’Allah soient sur lui) offrit à Fatima et à Ali, un lit de bois entrelacé de feuilles de palmes, une couverture de lit en velours, un coussin en cuir rempli de fibres de palmes, une peau de mouton, une marmite, une outre en peau et une meule manuelle pour moudre le grain.
Les difficultés matérielles
La vie de Fatima avec Ali fut aussi simple et sobre qu’elle l’avait été chez son père. En fait, en ce qui concerne le confort matériel, c’était une vie de difficultés et de privations. Durant leur vie commune, Ali resta pauvre car il n’attachait que peu d’importance aux richesses matérielles.
Fatima était la seule parmi ses sœurs à ne pas avoir épouser un homme riche.
En fait, on pourrait dire que la vie de Fatima avec Ali était même plus rigoureuse que celle qu’elle eut chez son père. Au moins, avant le mariage, il y avait toujours dans la famille du Prophète (paix et bénédiction d’Allah soient sur lui) une quantité de mains prêtes à aider. Mais maintenant elle devait faire face seule, de fait. Pour soulager leur pauvreté extrême, Ali travaillait comme peintre et porteur d’eau et elle comme broyeuse de céréales. Un jour, elle dit à Ali : ‘J’ai moulu jusqu’à ce que mes mains se couvrent de cloques’. ‘J’ai puisé de l’eau jusqu’à en avoir mal à la poitrine’ répliqua Ali.
Celui-ci suggéra à Fatima ‘Dieu a donné à ton père quelques prisonniers de guerre, va lui demander de te donner une servante’.
A contrecœur, elle alla chez le Prophète (paix et bénédiction d’Allah soient sur lui) qui lui dit : ‘qu’est-ce qui t’amène ici, ma petite fille ?’ ‘Je suis venue te donner le Salam’ dit-elle de peur qu’il ne puisse lui donner ce qu’elle avait l’intention de demander.
‘Que faisais-tu ?’ demanda Ali lorsqu’elle repartit seule.
‘J’avais honte de lui demander’ dit-elle. Alors tous deux vinrent ensemble mais le Prophète (paix et bénédiction d’Allah soient sur lui) sentit qu’ils étaient moins dans le besoin que d’autres.
‘Je ne vais pas vous le donner’ dit-il ‘et laisser les Ahl as-Suffah (pauvres musulmans restés dans la mosquée) tourmentés par la faim. Je n’ai pas assez pour leur nourriture…’
Ali et Fatima rentrèrent chez eux, et se sentirent quelque peu découragés mais cette nuit, après qu’ils soient allés se coucher, ils entendirent la voix du Prophète (paix et bénédiction d’Allah soient sur lui) leur demandant la permission d’entrer. Pour l’accueillir, ils se levèrent, mais le Prophète (paix et bénédiction d’Allah soient sur lui)leur dit :
‘Restez où vous êtes’ et il s’assit à côté d’eux ‘Ne vous indiquerais-je pas quelque chose de meilleur que ce que vous êtes venus me demander ?’ demanda-t-il et ils lui dirent ‘Si’, il dit : ‘Les mots que Jibril m’a enseignés, que vous pouvez dire : ‘Subhana Allah’ dix fois après la prière, et dix fois « Al hamdu lillah’ et dix fois « Allahu Akbar ». Et avant de dormir, il faut que vous le disiez 33 fois chacun.
Ali dit plus tard : ‘Je n’ai jamais manqué de le faire depuis que le Messager de Dieu nous l’a enseigné’.
Quelques disputes conjugales
Entre temps, il arrivait que l’entente ne règne pas entre Ali et Fatima. Un jour, une dispute s’envenima et les opposa si violemment que les voix des deux conjoints parvenaient jusqu’aux oreilles de l’Envoyé de Dieu (paix et bénédiction d’Allah soient sur lui) . Ce fut ainsi que celui-ci accourut chez eux. Il y resta un certain moment et sortit, le visage rayonnant de joie. Quand un Compagnon lui demanda les raisons de cette jovialité, il répondit :
– « Comment voulez vous que je ne sois pas content alors que je viens de réconcilier les deux personnes que j’aime le plus ?
Perte de sa soeur
Au milieu de la seconde année suivant la Hijrah sa sœur Ruqayyah tomba malade: Elle fut prise par la fièvre et la rougeole. Ce fut peu de temps avant la bataille de Badr. Uthman, son mari, resta à ses côtés et manqua la bataille. Ruqayyah mourut juste avant le retour de son père. De retour à Médine, une des premières choses qu’il fit fut de se rendre sur sa tombe.
Fatima y alla avec lui. C’était la première perte qu’ils subirent au sein de leur proche famille depuis la mort de Khadîdjah. Fatima fut énormément touchée par la mort de sa sœur. Les larmes coulèrent de ses yeux dès qu’elle s’assit à côté de son père sur le bord de la tombe, et il la consola et chercha à sécher ses larmes avec le coin de son manteau.
Le Prophète (paix et bénédiction d’Allah soient sur lui) avait auparavant parlé des lamentations de la mort, mais cela avait amené un malentendu et quand il revinrent du cimetière, la voix d’Umar en colère fut entendue, contre les femmes qui pleuraient pour les martyrs de Badr et pour Ruqayyah. ‘Umar laisse-les pleurer’ dit le Prophète Mouhammad (paix et bénédiction d’Allah soient sur lui) et il ajouta : ‘Ce qui vient du cœur et des yeux, cela vient d’Allah et de sa miséricorde, mais ce qui vient des mains et de la langue, cela vient de Satan’ – par « les mains », il faisait allusion au fait de se frapper la poitrine et de se gifler les joues et par « la langue », aux cris en cœur lancés par les femmes, comme une marque publique de sympathie.
Naissance de ses fils
La perte dont souffrit la famille avec la mort de Ruqayya fut suivie par la joie quand, au grand plaisir de tous les croyants, Fatima donna naissance à un garçon au mois de Ramadan de la troisième année après l’hégire. Le Prophète (paix et bénédiction d’Allah soient sur lui) prononça l’Adhan dans l’oreille du nouveau-né et l’appela Al-Hasan, ce qui signifie le beau.
Un an plus tard, elle donna naissance à un autre garçon, qui fut appelé Al-Husayn, ce qui signifie le petit Hassan ou ‘le petit beau’. Fatima emmenait souvent ses deux fils voir leur grand-père qui les aimait excessivement. Plus tard il les emmenait à la Mosquée et ils grimpaient sur son dos quand il se prosternait. Il fit de même avec sa petite-fille, Umamah, la fille de Zaynab.
En l’an cinq de l’hégire, Fatima donna naissance à un troisième enfant, une fille qu’elle nomma comme sa sœur aînée Zaynab, qui était décédée peu avant sa naissance. Cette Zaynab grandit et fut l’héroïne de Karbala. Le quatrième enfant de Fatima naquit l’année d’ensuite. L’enfant était aussi une fille et elle l’appela Umm Kulthum comme sa sœur qui mourut l’année précédente d’une maladie. Ainsi, l’Envoyé de Dieu garda dans sa pensée la mémoire de ses deux filles défuntes.
Vers la conquête de la Mecque
Le temps permit à Fatima d’être témoin de l’héroisme de son père qui allait de victoire en victoire, répandant une nouvelle lumière sur le monde, et s’approchait de cette victoire finale que Dieu avait promise à lui et aux croyants. Ce fut ainsi que l’image de la Mecque traversa son esprit. Huit années s’étaient déjà écoulées depuis son arrivée à Médine.
Le jour arriva où le Prophète (paix et bénédiction d’Allah soient sur lui) s’avança vers la « Mère des cités » à la tête d’une dizaine de milliers de musulmans. L’entrée victorieuse de l’armée musulmane se fit sous une clameur aussi extraordinaire et qu’exceptionnelle. Dix mille voix scandaient :
Allahu Akbar ! Allahu Akbar ! Allahu Akbar ! Il n’y a point de divinité que Dieu ! Il a fait triompher Ses serviteurs, a renforcé la puissance de Ses soldats et a défait Seul la coalition. Il n’y a de divinité que Dieu. Allahu Akbar !
En arrivant à la Mecque, Fatima souhaita revoir la maison où elle était née et avait grandi, de même que ‘Ali. Après son émigration, elle était devenue celle d’Uqayl Ibn Abu Talib. Aussi, se demanda-t-elle quelle serait la maison que son père leur choisirait à la Mecque. Les Ansârs aussi se posaient la même question : Est ce que l’Envoyé de Dieu allait les quitter et séjourner définitivement dans sa ville natale ? La grande joie, qui s’empara de lui en revoyant sa patrie après une si longue absence, leur fit croire qu’il ne retournerait point à Médine; l’un d’eux fit cette remarque :
– Par Dieu ! L’Envoyé de Dieu a retrouvé son peuple !
Fatima entendit tous les murmures des Ansars, puis le Prophète(paix et bénédiction d’Allah soient sur lui) demanda à les faire rassembler. Il leur tint ce discours après avoir distribué un butin de guerre essentiellement aux Qurayshites, ce qui souleva le mécontentement des Médinois :
– Ô assemblée des Ansars ! Vos propos me sont parvenus ! Comment avez vous pensé de moi ce qui est dans vos coeurs ? Ne suis-je pas venu à vous alors que vous étiez égarés et que Dieu vous a guidés ? N’étiez vous pas pauvres et Dieu vous a enrichis ? N’étiez vous pas ennemis les uns aux autres et Dieu a réuni vos coeurs ? Vous êtes en droit de me dire : Tu es venu à nous alors que ton peuple te traitait de menteur tandis que nous, nous avons cru en toi et nous t’avons donné un refuge !…
– Ô assemblée des Ansars ! Ne voulez vous pas que des gens partent avec du bétail et des chameaux au moment où vous, vous retournerez chez vous en compagnie de l’Envoyé de Dieu ? Par Celui qui détient l’âme d Muhammad dans Sa main, si ce n’était l’émigration, j’aurais été un homme des Ansars. Si je devais choisir un peuple, j’opterai pour celui des Ansars. Ô Seigneur Dieu ! Accorde ta miséricorde aux Ansars, aux fils des Ansars, aux fils des fils des Ansars.
Ce discours fit pleurer les Ansars ainsi que les habitants de la Mecque. Ainsi l’Envoyé de Dieu (paix et bénédiction d’Allah soient sur lui) a choisit la demeure de l’émigration. Il ne restait plus à Fatima qu’à faire ses adieux à la maison de son enfance et visiter une derniere fois la tombe de sa mère, avant de s’engager, avec son père, sur la route de Médine. Elle n’y séjourna que deux mois et quelques jours.
Arrivée à Médine, elle passa encore deux mois de bonheur auprès de son père dont l’affection, pour elle, son mari et ses enfants, n’avait faibli à aucun moment. Pendant cette période, elle avait repris des forces. Elle s’occupait davantage de l’éducation de ses enfants, laissant les travaux de la maison à une servante que ‘Ali, enrichi quelque peu par le produit du butin de la conquête de la Mecque, avait mis à sa disposition.
Maladie et mort du Prophète
En l’an XI de l’hégire, le père de Fatima se plaignit d’un mal qui le faisait souffrir. Les membres de la Maison et les musulmans pensaient que ce n’était qu’un mauvais moment à passer et, ensuite, tout rentrerait dans l’ordre. Personne ne se doutait que cette maladie allait l’entraîner vers la mort. Mais Fatima se rappela le moment où elle se rendit chez son père qui se trouvait dans la chambre de ‘Aisha. Après que son père, affaibli par sa maladie, l’embrassa et la fit asseoir à sa droite, il lui fit comprendre que sa vie avait atteint son terme. Elle éclata en sanglots et pour la consoler, il lui dit :
– Tu seras la première des membres de ma Maison qui me rejoindra dans la tombe. Il ajouta : N’accepterais-tu pas d’être la sayyida de cette Communauté ?
Fatima sourit de cette nouvelle. Aisha qui rapporta cette scène, dit qu’elle n’avait jamais vu une joie aussi proche de la tristesse. Elle demanda à Fatima la raison de ce changement brusque d’humeur. Celle ci lui avait répondu sur le moment qu’elle ne pouvait pas révéler un secret que le Prophète (paix et bénédiction d’Allah soient sur lui) lui dévoilait.
Quelques jours après, la maladie du Prophète (paix et bénédiction d’Allah soient sur lui) empira. La peur se mêla à l’angoisse. Fatima entoura son père de toute son attention, ne cessant pas d’implorer Dieu de renforcer son courage et sa patience. Fatima sentit que l’état de son père empirait quand elle le vit prendre de l’eau de sa main et le renverser lentement sur sa tête. Elle l’entendit lui dire de ne pas être triste après sa mort. Quelques temps après, l’Envoyé de Dieu (paix et bénédiction d’Allah soient sur lui) , quitta ce monde, les musulmans et les êtres les plus chers de sa famille.
Fatima s’évanouit. Elle ne sortit complètement de son évanouissement qu’après le serment d’allégeance prêté à Abu Bakr, soit 48 heures après la mort de son père. Elle alla se recueillir sur sa tombe et revint à la maison où elle fut accueillie par Anas Ibn Malik, le serviteur de l’Envoyé. Celui-ci ne pouvait que lui demander de se montrer patiente à la suite de cette perte qui a endeuillé toute la Communauté musulmane. Elle lui répondit :
– Comment ton coeur t’a permis d’abandonner à la terre le cadavre de l’Envoyé de Dieu ?
Malik éclata en sanglots. Il ne pouvait pas contenir ses larmes alors qu’il conseillait la patience à d’autres. Entre temps, ‘Ali arriva et lui fit part que beaucoup de musulmans déclaraient que le califat aurait dû lui revenir. Cependant, les décisions s’étaient précipitées. Non seulement, l’Islam n’avait jamais prescrit que le califat devait être héréditaire, mais il était trop tard pour revenir sur le premier serment d’allégeance accordé à Abu Bakr. Ce fut ce que des Compagnons avaient dit à Fatima :
« Ô fille de l’envoyé de Dieu ! Notre serment d’allégeance a été donné à Abu Bakr. Si ton mari, fils de ton oncle paternel, s’était présenté plus tôt à nous, nous n’aurions pas préféré un autre à lui. »
Mais ‘Ali avait répondu : « Devais je abandonner l’Envoyé de Dieu dans sa maison sans l’enterrer, et sortir pour disputer le pouvoir à d’autres ? »
Abu Bakr demanda à Umar de l’accompagner chez Fatima afin de la convaincre d’accepter le fait accompli, d’autant plus, qu’en sa qualité de premier calife de l’Islam, il lui avait refusé d’hériter de son père, partant du principe qu’on n’hérite pas des prophètes. Arrivé sur les lieux, Abu Bakr prit la parole en disant :
– Ô Bien-aimé de l’Envoyé de Dieu ! Par Dieu ! Ta parenté à l’Envoyé de Dieu est meilleure, pour moi, que ma parenté. Mon affection pour toi est plus forte que celle que je porte à ma fille ‘Aisha. Le jour où ton père est mort, j’aurais aimé mourir ce jour-là et ne pas rester en vie après lui. Je reconnais ton mérite et ta dignité. Si je t’ai privé d’hériter de l’Envoyé de Dieu (paix et bénédiction d’Allah soient sur lui), c’est parce que je l’ai entendu dire, parlant des prophètes : « Personne n’hérite de nous. Ce que nous possédons doit être distribué en aumônes. »
Fatima rennonca donc à sa demande d’hériter. Par contre, elle s’isola dans sa tristesse et son deuil, pleurant la mort de son père. Il ne lui restait plus qu’à le rejoindre ainsi qu’il le lui avait annoncé quelques temps avant d’aller à la rencontre de son Créateur.
Ce fut ainsi que le lundi, le deuxième jour du mois de ramadan, an XI, Fatima embrassa les membres de sa famille, emplissant ses yeux de larmes chaudes. Puis, elle appela Um Rafi’, la protégée de son père et lui dit, d’une voix basse, à peine perceptible, de lui préparer de l’eau. Elle se lava ainsi qu’elle le faisait elle-même auparavant, vêtit des habits neufs, remplaçant ceux du deuil qu’elle portait, puis elle dit à Umm Rafi’ de poser sa literie au mileu de la chambre. Elle s’allongea, ferma les yeux et s’endormit. Ce fut ainsi qu’elle mourut.
‘Ali l’ensevelit en pleurant et l’enterra dans le cimetière al-Baqi. Il lui fit ses adieux et retourna, l’air abattu, dans cette maison devenue lugubre depuis la disparition de son épouse.
Fatima « la resplendissante » n’avait que 29 ans.
Ses mérites
Le Prophète (paix et bénédiction d’Allah soient sur lui) avait un profond amour pour Fatima , il dit une fois : « Quiconque plait à Fatima plait en réalité à Dieu, et quiconque cause sa colère cause en réalité celle de Dieu. Fatima est une partie de moi. Ce qui lui plait me plait aussi, et ce qui l’a met en colère me met aussi en colère »
Il (paix et bénédiction d’Allah soient sur lui) dit aussi : « Les meilleures femmes au monde sont au nombre de quatre : la vierge Marie, Assiya la femme de Pharaon, Khadija la mère des croyants, et Fatima, la fille de Muhammad. »
On donna à Fatima le titre de az-Zahra, ce qui signifie la Resplendissante, en rapport avec son visage radieux, qui semblait diffuser de la lumière. On dit que lorsqu’elle se levait pour la prière, le mihrab reflétait la lumière de son visage. On l’appelait aussi al-Batul, en raison de son ascèse. Au lieu de passer son temps en compagnie d’autres femmes, elle passait beaucoup de son temps en prière, à lire le Coran ou à d’autres actes d’adoration.
Fatima avait une forte ressemblance avec son père, le Messager de Dieu (paix et bénédiction d’Allah soient sur lui) . Aisha , l’épouse du Prophète(paix et bénédiction d’Allah soient sur lui), dit d’elle : « Je n’ai jamais vu une créature de Dieu qui ressemblait davantage au Messager de Dieu dans son langage, sa conversation et sa façon de s’asseoir que Fatima. »
Les bonnes manières de Fatima , son doux langage, faisaient partie de sa ravissante et sympathique personnalité. Elle était particulièrement gentille avec les pauvres et les nécessiteux, et donnait souvent toute la nourriture qu’elle avait à quelqu’un qui se trouvait dans le besoin même si elle-même restait sur sa faim. Elle n’avait aucun amour pour les ornements, ni pour le luxe et le confort de la vie.
Elle a hérité de son père une éloquence convaincante, puisée dans la sagesse. Quand elle parlait, les gens étaient souvent émus aux larmes. Elle avait la capacité et la sincérité pour créer des émotions, émouvoir les gens aux larmes, et emplir leur cœur de louange et de gratitude pour Dieu pour ses faveurs et sa générosité inestimable.