La plainte de Aliou Sall contre la BBC. On en a tellement parlé depuis des jours, certains allant même jusqu’à douter de son existence. Finalement, nous sommes en mesure de vous dire qu’elle existe bel et bien, et qu’elle a été transmise à qui de droit : le Médiateur Interne de la BBC, la première instance à saisir, avant d’aller, en cas d’insatisfaction, au sommet, à savoir l’Ofcom, le régulateur de l’audiovisuel dans tout le Royaume-Uni. Mieux, nous vous livrons en exclusivité et in extenso le contenu de cette plainte
Le dimanche 02 juin 2019, la BBC News Afrique a diffusé un reportage intitulé : «Un scandale à 10 milliards de dollars», présenté par la journaliste Mayeni Jones.
L’analyse de l’élément laisse apparaitre très nettement que ce reportage a été réalisé en violation manifeste des règles éthiques et déontologiques qui encadrent l’exercice du journalisme.
En effet, plusieurs passages revêtent un caractère diffamatoire qui portent atteinte à l’honneur et à la considération du citoyen sénégalais Monsieur Aliou Sall.
Nous devons porter à votre haute attention les éléments matériels qui indiquent que la journaliste Mayeni Jones n’a pas respecté en l’espèce toutes les règles de prudence que requiert une production fiable respectueuse des droits et libertés de la personne humaine.
Vous constaterez avec nous que le principe du contradictoire a été manifestement violé, car l’auteur a sciemment et sérieusement tronqué le document écrit portant les réponses de Monsieur Aliou Sall à ses interpellations.
Madame Mayeni Jones accuse Monsieur Aliou Sall :
D’avoir usé de son influence en sa qualité de frère du Président de la République du Sénégal pour faire bénéficier à l’homme d’affaire roumain Frank TIMIS de contrats de recherches et de partage de production de pétrole et de gaz dans notre pays en contrepartie d’actions dans les sociétés de ce dernier d’une valeur de 03 millions de dollars.
D’avoir dans les mêmes circonstances indument bénéficié d’un salaire de 25 000 dollars américains par mois pendant cinq ans versés par l’entreprise de Monsieur Frank Timis.
D’avoir également reçu un versement de 250 000 dollars américains viré par le même Monsieur Frank Timis dans le compte de Agritrans, la société de Monsieur Aliou Sall.
Nous devons rappeler que ces allégations ne correspondent pas à la vérité.
Nous reprochons à Madame Mayeni Jones d’avoir omis de procéder à un recoupement rigoureux de ses sources, de s’être précipitée à donner la parole à des accusateurs intéressés et en prenant soin de ne pas laisser entendre la voix de la personne incriminée dans le reportage, en l’occurrence Monsieur Aliou Sall.
déséquilibré où les faits relatés sont pour une large part erronés appelle les précisions suivantes :
Timis corporation a obtenu l’accord du gouvernement du Sénégal pour l’octroi des permis pétroliers Saint-Louis Offshore Profond et Cayar Offshore Profond dès le 17 janvier 2012, soit près de trois mois avant la prestation de serment du nouveau Président élu, Monsieur Macky Sall, frère de Monsieur Aliou Sall. En vertu du principe constitutionnel relatif à la continuité de l’Etat, ce dernier n’a fait qu’approuver, entre autres décrets, une décision déjà prise par son prédécesseur. C’est d’ailleurs durant cette période transitoire que les décrets 2012-596 et 2012-597 portant approbation desdits contrats ont été naturellement signés par le nouveau Chef de l’Etat. Il est donc établi que Monsieur Aliou Sall n’a pas été à la base de l’octroi de contrats de concession à Timis Corporation. Monsieur Aliou Sall n’a jamais intercédé en faveur de Monsieur Frank Timis en contrepartie de l’octroi d’actions d’une valeur de 3 000 000 de dollars américains dans les sociétés de Monsieur Frank Timis. Les 25 000 dollars dont fait par ailleurs état Madame Mayeni Jones dans ce reportage résultent de salaires régulièrement perçus par Monsieur Aliou Sall en sa qualité de chef du bureau de représentation d’une société présente au Sénégal. Aucun conflit d’intérêt ni aucune violation de la loi ne peut donc être reproché à Monsieur Aliou Sall. Nous tenons à préciser qu’un tel salaire pour une telle fonction est en deçà des rémunérations versées dans le secteur pétrolier à l’époque de sa nomination.
S’agissant du prétendu virement de 250 000 dollars américains allégué, il nous plait de redire avec force que cette affirmation ne repose sur aucun fondement sérieux. Cette fausse accusation a fini de jeter l’opprobre sur Monsieur Aliou Sall, car, ce dernier n’a jamais reçu une telle somme destinée à le corrompre pour faciliter les actions de prospections et de recherches de Timis Corporation au Sénégal. Sur cet aspect très important du reportage, Madame Mayeni Jones a fait fi de la version de Monsieur Aliou Sall contenue dans un document écrit transmis à la journaliste par le cabinet d’avocats Shillings de Londres. La journaliste Madame Mayeni Jones dit détenir la preuve de la corruption d’un mail échangé entre British pétrolium (Bp) et Monsieur Franck Timis au travers duquel ce dernier aurait réclamé 250 000 dollars au titre des impôts à payer au Sénégal. C’est sur la base de cet e-mail qui ne concernerait en rien Monsieur Aliou Sall que la journaliste a voulu asseoir l’effectivité de la remise d’une telle somme, ce qui ne résulte que de son imagination fertile. Il n’y a jamais eu un transfert de 250 000 dollars américains effectué par Monsieur Frank Timis dans les comptes de la société Agritrans.
L’exposé des faits ci-dessus indique selon notre point de vue, que la journaliste Madame Mayeni Jones a méconnu les règles élémentaires de son métier, et a violé les principes éthiques et déontologiques essentiels pourtant consacrés par le code de diffusion de l’Ofcom notamment :
l’exigence d’impartialité, la recherche de l’équilibre dans le traitement des nouvelles
l’exactitude de l’information à diffuser ;
le respect des droits individuels
le respect du contradictoire
Nous estimons que Madame Mayeni Jones a également porté atteinte aux règles établies par la Charte de Munich de 1971 relative aux droits et devoirs du journaliste en ses points 3, 4 et 8 :
«Publier seulement les informations dont l’origine est connue ou les accompagner, si c’est nécessaire, des réserves qui s’imposent ; ne pas supprimer les informations essentielles et ne pas altérer les textes et les documents.»
«Ne pas user de méthodes déloyales pour obtenir des informations, des photographies et des documents»
8- «S’interdire le plagiat, la calomnie, la diffamation, les accusations sans fondement ainsi que de recevoir un quelconque avantage en raison de la publication ou de la suppression d’une information.»
Pour toutes ces raisons et toutes autres à déduire ou à suppléer s’il échet, nous avons estimé nécessaire de saisir votre autorité afin qu’une enquête soit diligentée sur les faits portés à votre connaissance.
Recevez les assurances de ma très haute considération.”
Maître Mouhamadou Moustapha DIENG
Avocat au Barreau du Sénégal