Dakarmidi- Le guide de la communauté chiite Mozdahir, Mouhammad Ali Aïdara, propose le modèle Mozdahir International pour lutter contre la mendicité des enfants. Depuis plus de 18 ans, l’Ong créée par ce guide religieux œuvre dans la construction de « daraas » modernes et la formation des maîtres coraniques.
Il est le président fondateur de l’Institut Mozdahir international. Depuis plus de 18 ans, Chérif Mouhamed Ali Aïdara, guide de la communauté chiite Mozdahir, œuvre dans le social. Son projet humanitaire tourne autour de l’enseignement islamique avec la construction au Sénégal et dans beaucoup de pays de la sous-région d’écoles où des jeunes apprennent à mémoriser le Coran. Selon le fondateur de l’institut qui a ouvert les portes de son institut sis à FannRési- dence au quotidien national « le Soleil », Mozdahir international qui est une Organisation non gouvernementale (Ong) est « un outil pour la communauté chiite Mozdahir ».
Elle intervient dans les domaines de l’éducation, de la santé et du développement durable. « Je suis né dans le Sud du Sénégal à Darou Hijiratou. J’avais constaté que, chaque année, il y avait de la famine dans cette zone. On appelait cette période, la période de soudure. C’est ce qui a marqué mon enfance. Finalement, je réfléchissais sur cette question : comment faire pour changer la situation ? Avec le temps, avec les recherches, j’ai compris que le sous-développement dans nos régions était mental et multidimensionnel. C’était difficile pour moi de comprendre qu’il y ait de l’eau, de la terre fertile et que les gens meurent de faim», explique le guide de la communauté chiite Mozdahir.
Après des moments de réflexion et de recherche, Chérif Mouhamed Ali Aïdara a finalement décidé de mettre en place l’Ong Mozdahir internatio- nal. Son projet est centré sur l’humain. Depuis sa création, l’Institut Mozdahir international œuvre dans la modernisation de l’enseignement islamique et le retrait des enfants de la rue. Ce travail de modernisation, renseigne le guide religieux, a commencé par des séminaires de formation pour les maîtres coraniques. Ces derniers dont la plupart sont formés en Mauritanie, au Fouta, ont mémorisé le Coran.
Des milliers d’enfants fixés chez eux
Toutefois, le chef religieux précise qu’il ne suffit pas seulement de mémoriser le livre pour avoir un emploi. C’est pourquoi, dès le départ, l’Ong Mozdahir International a misé sur la formation pour rehausser le niveau de ces enseignants. «On a constaté, pendant ces formations, que beaucoup parmi eux avaient le potentiel. Nous avons formé certains jusqu’au niveau bac en arabe.
Nous avons réussi à envoyer d’autres dans les universités à l’étranger pour qu’ils fassent des études supérieures. Aujourd’hui, nous avons des jeunes qui sont à Strasbourg, en France, en Suède, dans les pays arabes alors qu’ils étaient destinés à être des maîtres coraniques qui envoyaient des talibés dans la rue», informe le guide. Il renseigne que des milliers de maîtres coraniques ont été formés par l’Institut Mozdahir depuis plus de 18 ans. Ceux qui n’avaient pas la chance de rejoindre l’extérieur pour y continuer leurs études ont obtenu, dit-il, un accompagnement de l’Institut qui a construit des écoles pour l’enseignement islamique et arabe. «L’Ong leur donne des aides mensuelles ce qui leur permet de rester chez eux et de garder les talibés dans leur environnement», ajoute Mouhammad Ali Aïdara.
Après la formation des maîtres coraniques, l’Institut Mozdahir a entamé, selon le chef religieux, un vaste programme de construction d’écoles et de mosquées partout à travers le Sénégal et dans la sous-région. Selon Mouhammad Ali Aïdara, plus de 300 écoles sont construites par l’Ong à Louga, à Kaolack, à Kaf- frine, à Dahra Djolof, à Kolda et en Guinée-Bissau. « Comme vous le savez, la plupart des talibés viennent du Sud du Sénégal et de la Guinée-Bissau. Je peux vous dire que 80 à 90% viennent de ces régions. J’ai construit beaucoup d’écoles en Guinée-Bissau, à Bafata et dans les villages. Ainsi, on a réussi à fixer des milliers d’enfants qui, normalement, devraient être aujourd’hui à Dakar, à Kaolack ou à Saint-Louis. Par ce programme, nous avons réussi à les garder chez eux», informe le guide religieux. « On ne prétend pas pouvoir régler tout le problème, mais nous essayons juste de faire des projets pilotes pour montrer que c’est possible de régler le problème de la mendicité des enfants dans la rue, mais il faut qu’il y ait une volonté de tous, qu’il y ait les moyens nécessaires », ajoute-t-il.
Régler le problème des maîtres coraniques
De l’avis du guide, on ne peut pas régler le problème de la mendicité des enfants sans, au préalable, commencer par celui des maîtres coraniques. Chérif Mouhamed Ali Aïdara invite les enseignants à « accepter de se former ». Même s’il reconnaît les efforts du gouvernement dans le retrait des enfants de la rue, le chef religieux précise, toutefois, que « la bonne solution » n’est pas seulement de récupérer les enfants talibés et de les remettre à leurs parents. «Souvent, les parents eux-mêmes n’ont pas les moyens de pouvoir entretenir cet enfant. Ils préfèrent leur enfant à Dakar avec leur maître coranique que de les garder aux villages sans pouvoir leur donner à manger. Finalement, l’enfant qui est ramassé est traumatisé et perturbé. Une semaine après, les parents le renvoient à Dakar. L’enfant devient un jouet. C’est dommage et cela doit s’arrêter », dénonce le guide. Il appelle à des « concertations » pour trouver de meilleures solutions. « Je ne peux pas faire des recommandations au gouvernement car un Etat a des spécialistes qui réfléchissent sur toutes les questions. Mais ce que l’Ong Mozdahir International est en train de faire marche est un modèle qui marche», signale Chérif Mouhamed Ali Aïdara.
AliouNgamby NDIAYE