Dakarmidi – Les mutineries en cours en Côte d’Ivoire ouvrent la boite aux pandores sur les plaies béantes de l’armée ivoirienne. Des divergences profondes qu’un coup d’œil dans le rétroviseur permet de comprendre aisément.
C’est un truisme de parler d’armée mexicaine sous l’ère Ouattara tant l’armée ivoirienne est un ensemble hétéroclite au traitement à géométrie variable. Ce caractère hybride trouve ses racines dans le récent passé du pays. Les Forces armées nationales de Côte d’Ivoire (Fanci) sous l’ère Houphouet, avaient la réputation d’une armée apolitique représentative de toutes les ethnies.
La disparition du père de la nation en 1993 va sonner la fin de cette image avec en point d’orgue le limogeage de certains officiers par le successeur Henri Konan Bédié au profit des siens. Les autres étant jugés proches du défunt père fondateur ou d’Alassane Ouattara, alors Premier ministre.
Des clivages sociopolitiques découle un coup d’Etat le 24 décembre 1999. Si ce coup du général Robert Guei est salué par certains, il n’empêche qu’il a fissuré l’armée. La fierté des hommes forts de la junte militaire contraste avec l’aigreur des proches du président déchu. En marge de ce combat à fleurets mouchetés, un autre groupe proche d’Alassane Ouattara rumine sa colère en silence.
Après plusieurs tentatives de coups d’Etat, les masques tombent. Les troubles consécutifs à l’élection de l’opposant Laurent Gbagbo en 2000 divisent à nouveau l’armée. La rébellion née le 19 septembre 2002 finit par faire éclater les antagonismes.
Le cap de caisse de résonance passé, l’armée est désormais au premier rang. Des branches armées et milices naissent à côté des partis politiques. Après 10 années de crise militaro-politique, leur corollaire d’atrocités et la victoire du camp Ouattara sur le camp Gbagbo, il n’existe que deux camps protagonistes.
Le changement de vocable Forces armées des forces nouvelles (Fafn, ex-rebellion) et Forces de défense et de sécurité (Fds) ne changera rien. Il existe deux armées. Les ex-rebelles sont devenus les forces loyalistes et les ex-loyalistes font face à cette réalité.
Armée multicéphale au traitement à géométrie variable
Le recours au commandant en second de la Garde républicaine, Issiaka Ouattara alias Wattao, en lieu et place des supérieurs hiérarchiques de l’armée pour les négociations avec les mutins témoigne de l’influence de ce dernier au sein de cette grande ‘‘muette’’ si elle l’est toujours, constituée des hommes de Ouattara, ceux de Soro, ceux d’Ibrahim Coulibaly (IB) et ceux de Gbagbo.
La Côte d’Ivoire vit certes les conséquences de la guerre et de la crise postélectorale selon les propos du ministre de l’intérieur et de la sécurité, Hamed Bakoyoko. Mais c’est également reconnaitre que le chantier de la reconstruction de l’armée, voire de la réconciliation nationale reste entier.