Dakarmidi – Demain 24Mai ; M, Macky Sall entrera (paraît-il) pour la deuxième fois dans l’histoire, la première étant son accession à la magistrature suprême de ce pays en 2012.
Cette fois c’est peut-être par la porte de l’écriture. L’écriture d’un livre en trois tomes, intitulés « Conviction républicaines ».
En grande pompe on nous a annoncé sur les ondes qu’un symposium sera organisé à cette occasion. Un symposium où les participants auront une lecture « sans concession, neutre » sur le travail de Macky Sall assure le Président du comité scientifique le Pr Mame Moussé Diagne.
Et à notre doyen – cinéaste Cheikh Ngaido Ba, vice-président de ce même comité de renchérir en déclamant avec la verve qu’on lui connaît « pour la première fois un Président décide d’écrire un livre pendant qu’il est au pouvoir, alors que les autres nous ont habitué aux mémoires après l’exercice du pouvoir ».
Sékou Touré (syndicaliste, presque autodidacte), mort au pouvoir en 1984 ; (qui n’a donc pas eu l’occasion d’écrire ses mémoires) est auteur d’au moins vingt-huit livres. Abdoulaye Wade a publié trois livres dont deux en étant Président du Sénégal,
Pourtant l’Histoire ne retient pas le nom de ces deux grandes figures de l’Afrique contemporaine comme des Ecrivains, mais plutôt pour leur parcours syndical et politique.
La porte de l’Histoire par l’écriture n’est donc pas automatiquement ouverte pour Macky Sall. Il ne suffit pas seulement de publier un livre où même plusieurs livres pour être Ecrivain. Sartre dira ; « je ne suis pas romancier, je suis Ecrivain ».
Il ne suffit pas seulement de remplir des feuilles blanches par des phrases fussent-elles sensées pour être un Ecrivain; faudrait-il encore que sa production intellectuelle soit de nature à apporter de la plus-value à la pensée universelle ; même si c’est de manière romancée.
El Hadj Malick SY dira « bu nu waxee ni diw boroom xam xam la ; na nu laaj ndax boroom xam xam ya noo ko wax – si nous entendons qu’un tel est un érudit ; posons la question est ce que ce sont les érudits qui l’ont accrédité ?». A l’issue de ce symposium les 60 universitaires et autres érudits conviés à cette occasion nous diront….. , surtout que Mame Moussé Diagne nous assure que «le Président a pris le risque de consigner dans un texte écrit un ensemble de propositions sur son action». Et puis « les regards que nous allons porter nous-mêmes sur ce faisceau de propos et de contre propos seront de manière à pouvoir sortir des points de vue qui ne cèderont rien à une démarche consensuelle à priori. ».
Espérons que (Macky écrivain ou pas) ; le symposium en vaudra son pesant d’or massif (présentation au terrou bi avec l’argent du contribuable).
Je veux dire même si les ouvrages de Macky Sall ne s’avèrent pas être de la production intellectuelle de haute facture littéraire et ou scientifique; qu’ils constituent au moins de la bonne matière digne d’être débattue par cette parterre de personnalités du monde universitaire pour l’intérêt du Sénégal. Autrement ça serait un dommage de plus.
Le premier (grand) dommage que le président Macky Sall a fait subir au Sénégal (son économie, son image, son histoire) par le biais de cette publication, est de se faire publier par les éditions Lafont ; une entreprise française. L’ouvrage se vend (après subvention du Président) à 7500 F CFA. Nous pouvons déjà présent jurer que tous les Ministres, les Conseillers, le Directeurs généraux, les responsables de l’APR, et autres laudateurs de la république (même si peu parmi ce beau monde liront le livre) achèteront plusieurs exemplaires du livre (avec l’argent du contribuable) pour eux même et pour les militants. C’est d’autant plus regrettable qu’en ce moment précis les sénégalais se plaignent et déplorent l’omniprésence des entreprises Françaises qu’ils considèrent comme une nouvelle colonisation.
Voire leur Président payer de leurs deniers une entreprise française pour publier un livre dont le contenu les concerne exclusivement, n’est certainement pas la meilleure manière de les consoler, et surtout de les guider vers le chemin de l’émergence.
Lorsque l’idée de publier ce livre chez Lafont a germé, où se trouvaient ses conseillers, El Hadj Amidou Kasse surtout, lui qui est ‘’écrivain’’. Le Président et ses conseillers n’ont –ils pas trouvé dans ce pays un éditeur a la hauteur de sa ‘’pensée’’. Si oui, sur quels critères s’est-il donc basé pour porter son choix sur les éditions Lafont. Si non, quel sentiment doit l’animer de savoir qu’aucun parmi les 15 millions d’hommes et de femmes qu’il dirige n’est capable de donner corps à ses idées sous la formes d’un livre ? Où compte-t-il alors mener ce peuple ‘’d’ idiots’’ qu’il dirige ?
L’activité intellectuelle qui est l’apanage des gens qui constituent la crème de toute nation civilisée et qui a le livre comme véhicule par excellence a-t-elle une place dans la politique (qu’il a consignée dans son livre) de Macky Sall ?
J’ose simplement espérer que les députés même Aperistes, vont interpeller le gouvernement sur le fait que le Président ait associé des étrangers (travail éditorial) à sa production intellectuelle qui puissé-je concerne les sénégalais au premier chef, avant de le soumettre à l’appréciation de l’intelligentsia sénégalaise.
Macky Sall qui publie. Ça devient une question de souveraineté nationale.
Mustafaa Saitque
Poète – Ecrivain – Réalisateur
saitque@yahoo.fr