Dakarmidi – En ce 15 mai 2018, le paysage universitaire se réveilla dans l’émoi après avoir subi la loi de la folie meurtrière des forces du « désordre ». FALLOU SENE ne verra plus ainsi sa femme et son enfant et Patar perdait ainsi sûrement un futur digne Serviteur de la République.
Les faits sont têtus et les chaînes de responsabilité sont facilement situables. En effet, l’ancien Recteur B.K ne pouvait aucunement méprendre que la loi du 07 novembre 1994 relative aux libertés et franchises universitaires ne place point le Campus social sous sa Tutelle en matière de police administrative et limite cette autonomie de police au Campus Pédagogique comprenant les facultés, les unités de formation et de Recherche… Au moment où il paraphait la note administrative N°009/UGB/CAB.R, le Recteur allait sans doute signer l’acte devant occasionner la furia des forces de l’ordre sur la communauté estudiantine qui, au même moment, célébrait l’anniversaire de son futur martyr. Quel Hasard !
Outre le décor sur la compétence ou non du Recteur à inscrire cet acte unilatéral dans la légalité interne comme externe, c’est le lieu, au-delà des affects et protestations publiques, de jeter le rétroviseur sur la gestion calamiteuse et médiocre des conditions sociales des étudiants Sanarois et de l’étudiant sénégalais de façon beaucoup plus globale. Sanar comme Dakar ont comme point commun : deux Directeurs des centres universitaires mouillés dans des pratiques peu orthodoxes et aux antipodes de l’élégance républicaine ainsi qu’une profonde politisation de la gestion du service public social et du personnel. Et pourtant l’histoire les rattrape tout le temps : au moment où les étudiants réclament un mieux-être existentiel et une alimentation dans la sûreté et la dignité, ils sont plus aptes à haranguer leurs militants et demeurent des moulins à liasses. L’argent public distribué de gauche à droite pouvait pourtant aider à inscrire la vie estudiantine dans des conditions optimales de dignité. La neutralité républicaine et la transparence sérieusement assommées, les étudiants souffrent ainsi d’un personnel de service public peu qualifié et une politisation qui installe le Campus dans la division entre franges Pro et Anti.
Les cas Mary Teuw et Aly Ngouille Ndiaye?
La lutte estudiantine pour une justice sociale et une dignité retrouvée suite au meurtre de l’enfant de Patar a vécu au rythme de deux revendications phares qui seront certainement des pommes de discorde entre l’étudiant et le gouvernement : les têtes de Mary Teuw et Aly Ngouille ? Une arlésienne, nous souffle-t-on ? Pourtant, l’un des slogans forts de l’ancien maire de Fatick a été de mettre la Partie avant tout. Mais il faut se rendre à l’évidence et admettre que le Chef de l’Etat est un pur politicien qui a du mal à choisir la volonté populaire et qui protège toujours ses hommes de base et de confiance. La mobilisation estudiantine homogène a eu pour le moment et partiellement effets escomptés- départs de B. K et I. D- et que la magie du clic a fait mouche et emportera sûrement la folie des flics par le jugement imminent de l’auteur de l’acte macabre, mais il ne faut point se mettre le doigt dans l’œil au point de croire que le Président-politicien Jr va sabrer les têtes de Mary Teuw et Aly Ngouille. Somme toute, cette crise aura fini par entériner cette tâche noire du régime : le syndrome de la mal-communication avec des propos déplacés et incohérents qui n’ont pas servi à éteindre le feu qui couve le front social.
Quid de Fallou SENE?
Fallou est parti, lui qui réclamait juste son dû: une bourse à payer à temps. Les hommages de Ndoumbélane ont plu comme du jamais vu, mais comme le rappela un ancien locataire du palais » les sénégalais ont de la peine à se rappeler de leur dîner de veille ». Ne soyons pas oublieux de la mémoire de Fallou qui est une victime de plus des agents chargés du maintien de l’ordre. Les limogeages de B. K et I. D ne doivent point servir de calmants, mais d’une bataille de plus gagnée dans la guerre contre cette injustice gouvernementale subie par l’étudiant. Prendre en charge la défunte famille relève d’un minimalisme évident, mais assurer que l’enfant même de Fallou puisse rêver d’un espace universitaire futur apaisé et prospère est meilleur encore.
De manière factuelle, un symbolisme positif doit tendre vers une place dédiée à ce martyr. Ne cherchons pas loin même, car la Place mythique Tour de l’Oeuf est une piste et le lieu du drame est à quelques encablures de là.
La date même du 15 mai pourrait être une formidable innovation avec l’organisation d’une journée nationale de l’étudiant en cette date. Occasion sera saisie pour juger l’état d’avancement des réformes du LMD, son évaluation et revenir sur le statut de l’étudiant et son importance grandissante pour le progrès socioéconomique de nos sociétés.
Le syndicalisme estudiantin en triomphe ?
L’un des satisfecit du grand vent debout voire tsunami médiatique a été le constat d’un niveau de maturité des leaders estudiantins dans la gestion de cette crise inédite dans l’histoire de Ndoumbélane. Après avoir mené avec stratégie et opiniâtreté la bataille des lacrymogènes, la communication des étudiants a été stratégique et laisse positivement pantois plus d’un observateur tant par la bonne maîtrise des problèmes sociaux et pédagogiques de l’étudiant par les leaders, et la magie du clic a submergé la folie meurtrière des flics et dévisagé les thuriféraires mal sincères venus de camps politiques épars. Le défi de l’évitement de la politisation ou récupération politicienne du combat de la Justice pour fallou a été plus ou moins réussi.
Mais au-delà même de ce dynamisme positif, il faut aller vers une définition homogène de la cartographie du syndicalisme estudiantin national en convergeant les revendications et miser plus même sur la qualité de la formation des étudiants et répertorier les pratiques peu orthodoxes au sein des campus. Faut-il aller vers une forme de complicité-dénonciation entre étudiants et organes de contrôle ? Time Will tell !
La formation des forces de l’ordre en question ?
Après les meurtres impunis de Bassirou Faye, Balla GAYE et Mamadou Diop, on pensait que la récrimination de ces actes barbares et macabres allait avoir effets escomptés, même si leur impunité manifeste faisait douter et dégoûter plus d’un. La haine viscérale et la brutalité policière des agents de l’ordre laissent perplexes et sont un coup donné à l’image de grande démocratie du pays. Faut-il situer avec promptitude les responsabilités et revoir le contenu de la formation des gendarmes et policiers ? Les prochains mois nous édifieront ?
Le choix des directeurs et recteurs chahuté ?
Enfin, la problématique du retard de paiement des bourses a sans doute remis en selle la lancinante question du choix des responsables universitaires. C’est inimaginable qu’au 21e siècle que notre pays se distingue par une politisation à outrance des centres universitaires et un délit contre la méritocratie au moment de pourvoir certaines fonctions publiques. Encore que les actuels nominés seraient plus ou moins des proches de quelques barons du régime.
Au-delà de l’émotivité et de la réactivité, cette bavure meurtrière qui a emporté Fallou SENE aura surtout révélé que le peuple sénégalais, mobilisé pour un seul et unique but, a une force de frappe lourde de conséquences et son gourdin électoral est en effet une convoitise des politiques qui ont, d’une surprenante manière, réglée l’horloge des inputs ou demandes sociales dans une année pré-électorale.
Que dire des étudiants sénégalais unis comme un Seul Peuple et prêts à aller au charbon ?
In fine, la plus grande victoire sur les démons de la médiocrité politiquement organisée et de l’incompétence des gouvernants qui se sont succédé à apporter des réponses satisfaisantes aux demandes sociales sera sans doute de fournir à Ndoumbélane d’ici des années une générations d’étudiants brillants, compétents et patriotes, sinon l’enfant de Fallou vivra dans un pays tout sauf émergent.
Paradis Noir