Dakarmidi – ‘’S’informer dans dix ans’’. Tel est le thème des désormais traditionnelles Assises de la presse française prévues pour se tenir à Tours (centre ouest de la France) les 15, 16 et 17 mars 2017. La question est d’autant plus grave qu’elle semble interroger sur la place et le rôle que le journalisme tiendra encore dans le système d’information déjà, de plus en plus, investi avec force, parfois de force, par le journalisme qui se définit lui-même comme ‘’nouveau’’, traitant de ‘’classique’’ le journalisme tel que le monde l’a connu jusqu’à nos jours, ère de l’internet où un ordinateur et une connexion à un réseau social ou autre permet à n’importe qui de diffuser tout et n’importe quoi. Ajoutons-y ‘’n’importe comment’’ : désinformation, manipulation, sous information, malgré l’abondance et la diversité des moyens et canaux de diffusion de l’information.
Nous l’avons vérifié lors de la crise en Gambie : la pluralité des moyens de sa diffusion n’a pas été fiabilité de l’information. Hélas. Parce que se sont mêlés à ce ‘’sabar ‘’ (séance de tam-tam sénégalais) plein de dangereux (pour l’information) individus qui n’ont pas vocation à être là ; à être non pas vecteurs, mais consommateurs. Et la diffusion de l’information de se transformer en une auberge espagnole dont la définition est que chacun mange ce qu’il apporte. Peut-être qu’il viendra un jour, une époque où on arrêtera la musique, vérifiera la légitimité des uns et des autres à être là et à revenir à une auberge normale.
Certains voudraient, bien sûr, rester dans l’ambiance ‘’espagnole’’, c’est-à-dire répandre l’information sans connaître ni accepter les exigences éthiques, légales, déontologiques que ce travail requiert. Parce que, justement, grisés par la puissance que leur donnent les nouveaux outils qui ont, depuis Renaudot, semblé être l’apanage des journalistes.
Pas plus tard qu’avant hier, un éminent aîné du Cesti, Sié Offi Somé, du Burkina Faso, réagissant à l’‘’Avis d’inexpert’’ de la semaine dernière écrivait : ‘’les outils modernes de collecte, de traitement et de diffusion de l’information ne doivent pas nous faire oublier que ce qui fait l’information, c’est la capacité de traitement par le journaliste (selon les bonnes vieilles « règles de pertinence, de proximité, de reliance, d’actualité, ..) qui lui donne de la crédibilité, de la valeur du fait de sa véracité, de sa fiabilité avérée. Les moyens ne peuvent pas remplacer la connaissance d’un professionnel de l’information digne de ce nom. Alors, ne nous laissons pas décourager par le flot impétueux des réseaux sociaux. Plus que jamais et plus actuellement d’ailleurs, la contribution du journaliste s’avère nécessaire pour nous préserver de cette désinformation à grande échelle, du fait des Tic. (…) Redoublons d’efforts pour ne pas donner raison à la suprématie de l’outil sur le cerveau’’. Voilà qui est bien dit par un ancien du Cesti, qui fut un des meilleurs étudiants de cette école de journalisme.
Le champ que se propose de labourer le thème des Assises de la presse française à Tours est bien vaste et pourrait bien intégrer ce qui s’est écrit ci-dessus par Sié Offi Somé. Et bien d’autres aspects encore. Les Tics (technologies de l’information et de la communication) ont apporté une solution dans l’exercice de la profession, mais lui ont aussi laissé plein de problèmes. En cela, ils sont comme une langue d’Esope, c’est-à-dire porteur à la fois du remède et du mal.
Post-scriptum : J’ai bien aimé une émission religieuse de Radio France internationale, il y a deux semaines, et dans laquelle un invité rappelait un mot de Rabbi Nahman de Braslav (1772-1810), à savoir : ‘’Ne demande jamais ton chemin à quelqu’un qui le connaît, car tu pourrais ne pas t’égarer.’’ Autrement dit ou insinué, le fourvoiement a du bon, s’il vous permet de découvrir l’ailleurs, l’autre ; que ‘’la voie du changement passe par des chemins inconnus, imprévisibles et inattendues’’. Baudelaire, le grand poète français, renchérira bien plus tard en préconisant d’aller vers l’inconnu pour trouver du nouveau’’. Un conseil déroutant mais véridique quand on médite bien là-dessus.
Notons aussi le conseil peu éclairé de l’ancien international sénégalais de football, Victor Diagne, consultant de la télévision public RTS1 pour la Coupe d’Afrique des Nations. Commentant le but d’un footballeur bissau-guinéen contre le Cameroun, Diagne estime qu’un joueur camerounais aurait pu commettre une faute contre le Bissau-Guinéen ; cette alternative étant préférable au but. Ce n’aurait pas été éthique, sportif, cela.