Dakarmidi – La capitale malienne, Bamako, va abriter du 13 au 14 janvier 2017, le 27e Sommet France-Afrique. Selon la presse malienne, 38 Chefs d’Etat et plusieurs grands acteurs internationaux ont déjà confirmé leur participation. Certains observateurs estiment que ce sommet apportera une valeur ajoutée dans les relations entre la France et l’Afrique, tant plusieurs forums réclament la prise en compte des intérêts des populations africaines. Mais, la non-tenue des engagements pris lors des précédents sommets pousse au pessimisme.
lacé sous le signe de la paix et la sécurité, le 27e Sommet France-Afrique a été précédé par le Forum Genre et Développement, tenu en décembre dernier ; la 12ème édition du Forum des peuples du Mali, organisée le 7 janvier dernier ; et la Plateforme des organisations de la société civile organise, ouverte hier et qui prendra fin demain 12 janvier à Bamako.Au cours du Forum Genre et Développement, les acteurs du développement et de l’entrepreneuriat dans le secteur de l’agro-business ont réfléchi sur le thème : «L’entreprenariat féminin dans le domaine de l’agro-business – comment développer l’agro-business, clé de l’émergence de l’Afrique?». Ils ont précisément mené leurs réflexions sur les outils d’une autonomisation socio-économique effective des femmes ; l’impact de l’environnement et des facteurs climatiques sur les activités agricoles des femmes entrepreneures ; l’accès de la femme à la propriété foncière.
Mais aussi sur la prise en compte du rôle de la femme entrepreneure dans la réalisation des ODD ; le renforcement des capacités managériales des femmes entrepreneures dans le domaine de l’agro-business ; l’apport d’une contribution des femmes aux thématiques du Sommet; la mise en exergue des questions du dividende démographique ; la proposition de solutions.
Le Forum des peuples du Mali, quant à lui, a eu pour thème : «Les peuples du sud exigent des alternatives pour un nouveau partenariat économique, sociale et sécuritaire entre la France et les Etats africains». Il a rassemblé plus de 800 participants venus d’Afrique, d’Europe, d’Asie et d’Amérique. Cette rencontre visait à contribuer à la consolidation et à la pérennisation des espèces, d’expression populaire sur les préoccupations légitimes des peuples, «des principes et pratiques néolibérales en faveur de la renaissance africaine, par le biais de l’autodétermination des peuples pour leur développement durable».
Du 10 au 12 janvier, se tient, à Bamako, une rencontre alternative des organisations de la société civile, dénommé «Sommet des peuples France-Afrique» pour se faire entendre. Les participants se penchent sur le foncier, la souveraineté alimentaire, la gouvernance et la sécurité. Selon les organisateurs, la rencontre a pour objectif de de faire entendre les voix des couches sociales exclues du développement.
Le président du forum de la société civile, Bakary Doumbia, a justifié l’intérêt de ce forum en disant que «si l’Afrique porte en elle l’espoir d’un avenir prometteur, elle doit l’être d’abord pour et par les peuples». Et d’ajouter : «L’Afrique colonisée, puis ajustée par de nombreux plans et maintenant à nouveau convoitée, subit depuis plusieurs années un retour offensif des puissances financières et des multinationales».
Pour les participants à ces différents forums, il est question de construire des partenariats stratégiques pour l’Afrique, la paix et la sécurité, les alternatives à l’installation des bases étrangères, les alternatives au franc CFA. Bref, construire des politiques publiques et de gouvernance pour une prospérité équitable et une paix durable en Afrique.
Les recommandations issues de ces forums seront remises aux Chefs d’Etat et de gouvernement. Des membres de la société civile militent pour une coopération entre la France et l’Afrique qui tende beaucoup plus vers une relation de dialogue, fondée sur des intérêts mutuels. Les manifestations organisées, le week-end dernier, contre le franc CFA en Afrique, en France, en Europe et aux Etats-Unis pour se défaire de cette «monnaie coloniale» sont l’expression du ras-le-bol des peuples africains.
Aussi peut-on penser qu’à la différence des premiers sommets France-Afrique, la rencontre de Bamako, qualifiée par certains observateurs de «hautement politique», va apporter un plus dans les relations entre la France et l’Afrique. En effet, depuis 1973, les grands enjeux du sommet France-Afrique portent, surtout, sur la paix, la sécurité, le développement et l’émergence. Depuis quelques années, les Africains semblent en avoir marre.
Les Africains attendent de la France la réelle reconnaissance de l’indépendance de leurs pays respectifs, précisément des ex-colonies françaises. En 2008 au Cap, devant le Parlement sud-africain, l’ancien président français, Nicolas Sarkozy, affirmait en substance l’ancien modèle de relations entre la France et l’Afrique n’était plus compris par les nouvelles générations d’Africains, comme d’ailleurs par l’opinion publique française. Il ajoutait que de nouveaux rapports devraient être fondés non plus sur l’inégalité, l’exploitation et le ressentiment, mais sur le respect et la reconnaissance des intérêts mutuels.
En octobre 2012, au Sénégal, son successeur François Hollande promettait que le temps de la Françafrique était révolu, que la France et l’Afrique étaient deux entités distinctes dont les rapports devraient être désormais fondés sur «le respect, la clarté et la solidarité».
Seulement, les changements tant attendus dans la coopération franco-africaine sont restés au stade des discours. La France est de plus en plus questionnée en Afrique. Un rapport publié récemment indique que, plutôt que d’apporter de solutions, les opérations militaires françaises en Afrique alimentent l’instabilité régionale et traduisent un retour en force de la France au Sahel. «Bien loin de résoudre les crises, ces opérations contribuent à les aggraver et à en créer de nouvelles», affirme une association de lutte contre la Françafrique.
Gall Mombeti