Dakarmidi – Je reste résolument attaché à la défense du droit fondamental de suffrage du citoyen que des politiciens ont tendance à placer en dessous de leurs intérêts dont le vrai sens est parfois méconnu.
Je suis habitué à recevoir des réactions fondées sur des préjugés et des présupposés. J’en suis nullement ébranlé. Des coups, j’en reçois depuis le collège et lorsque que je dirigeais, en 1991, le foyer socio du lycée El Hadj Malick SY.
J’ai aussi suffisamment côtoyé les acteurs politiques pour comprendre que nombre d’entre eux ne se battent pas pour des principes. En effet, leur reflex se construit non pas en partant de ce que le peuple gagne ou perd mais bien au contraire, il se bâtit sur la sauvegarde de leur propre investissement et ce qu’il espèrent tirer de la confusion ou du chaos.
Faudrait-il rappeler les épisodes de la révision et de l’adoption du code électoral de 2014 avec « les petits calculs » qui finir par une défection pour ne pas dire une trahison au sein de notre groupe (opposition et non alignés). Malgré toutes les tentatives de déstabilisation et de diabolisation, nous avions fermement et lucidement poursuivi le combat de principe jusqu’à amener le Président de la République à recourir à un jargon inconnu du dispositif juridique sénégalais ( cf. Arrêt de la Cour Suprême n*27 du 22/5/14). Ainsi se décida-t-il de « fondre » en un seul les décrets que j’avais attaqués en annulation devant la chambre administrative de cette juridiction !
Comme lors du référendum, aucun des camps politiques ne voulut entendre notre appel pour des concertations en vue d’un consensus sur le projet de révision constitutionnelle et sur les règles d’organisation du scrutin. Parce que chaque camp espérait prendre l’autre par surprise au point de dévoyer le véritable sens de la consultation. Mais plus grave encore, l’opposition refusa le seul compromis devant permettre à 163.000 électeurs dûment inscrits et dont les cartes n’ont pu être éditées par les manquements de l’administration.
Aujourd’hui encore, disposant d’éléments d’appréciation fiables et ayant mesuré l’ampleur des défis que nous n’avons jamais cessés de rappeler, il nous était apparu nécessaire, un mois après la consolidation de listes électorales et à un mois du scrutin, de formuler, en tant qu’experts en la matière, des propositions que nous jugeons les plus appropriées pour la conduite d’un processus électoral transparent, inclusif et équitable.
Nous considérons que notre argumentaire, qui loin d’ignorer les principes de l’élection, s’attache au respect tout aussi fondamental du droit de suffrage. Certes il revient aux pouvoirs publics de garantir l’exercice de ce droit conformément aux instruments juridiques internationaux et aux normes nationales, mais notre conviction demeure que nous devons y veiller tous.
Telle est la justification de notre démarche.
Au fond, qui intérêt à installer et à organiser une lenteur voire une rétention dans la délivrance des cartes d’électeur ?
A qui profiterait réellement une lourdeur dans les conditions de vote?
En tout état de cause, il est certain que le parti présidentiel dispose de plus de ressources humaines, financières et logistiques pour encadrer ses militants et sympathisants depuis la phase d’enrôlement des électeurs jusqu’au scrutin en passant par la distribution des cartes.
Est-il vraiment si difficile d’apprécier à juste mesure notre proposition de décaler la date des élections tout en favorisant un climat de dialogue et de restauration de la confiance entre les acteurs?
Certains observateurs, en toute bonne foi, se demandent pourquoi maintenant.
Il est vrai qu’il y a un mois, lorsque je fus interpellé sur la question en tant que l’invité du JT de 20 h sur la Tfm le 23 mai, j’avais refusé d’admettre l’idée d’un report des élections même si j’eus des réserves sur la situation des cartes électeurs d’alors (moins d’un (1) million de cartes distribuées sur 2,7 millions). Cette position fut réitérée à travers plusieurs de mes sorties, notamment sur Walf Tv et Sud Fm.
A la dernière semaine de juin, le nombre total de cartes produites était de 4,5 millions dont près de 60% distribuées. Ce qui équivaut à une production de 1,8 millions de carte en un mois. Or il reste malgré la démultiplication des commissions environs 2 millions de cartes à distribution en plus du gap de 2 millions à éditer le tout durant le mois de juillet. On nous signale qu’actuellement en moyenne 500.000 cartes/semaine (70.000/jour). D’où la question principale qui se pose tous les acteurs du processus électoral y compris le citoyen qui demeure au centre de ce processus :
Le système mis en place est-il capable de garantir à tout électeur de disposer de sa carte d’identité/électeur et d’exercer son droit de vote le 30 juillet 2017 ?
Au vu de tout ce qui précède et partant des problèmes éventuels d’accessibilité des certains lieux de vote liés à l’hivernage mais aussi considérant du refus manifeste de l’opposition d’accepter, lors du référendum de mars 2016, le vote sur présentation uniquement de la carte national d’identité (CNI) numérisée -croisement des données avec la carte d’électeur- ; il ne semble rester que deux options:
1. Renforcer le dispositif de production et de distribution,
2. Décaler la date des élections
Pour les motifs évoqués plus haut, nous avons considéré la seconde options plus judicieuse. Sans avoir nullement la prétention de tenir le monopole de la vérité, notre vocation est d’anticiper sur toute réforme appropriée de notre système électoral ou solution de simplification du processus électoral.
Dans cette perspective, j’avais préconisé des dispositions pratiques devant permettre aux détenus d’accomplir leur droit de suffrage. C’est la même dynamique qui, au lendemain du dépôt des candidatures, m’avait amené à inventer de nouvelles méthodes de vote telle que le système des 5 bulletins de vote ou le placement des bulletins à l’isoloir.
Dans certaines situations, il revient à l’État de prendre ses responsabilités comme ce fut le cas en 2011, lorsque le Gouvernement décida d’autoriser l’inscription sur les liste électorales sur la base du récépissé de la carte nationale d’identité (CNI). Ce fut une mesure jugée unilatérale mais salutaire face à la lenteur dans la délivrance des CNI.
Ndiaga SYLLA, Expert électoral