Dakarmidi – Le livre qui éventre la gestion du football sénégalais comme jamais.
Le journaliste et écrivain-essayiste sénégalais Cheikh Mbacké Sène vient de publier un livre sur la gestion du football sénégalais durant la décennie écoulée. Intitulé « Lions de la Téranga : Vérités et contre-vérités sur les échecs répétés (2003-2013) », cet essai de près de 200 pages publié aux Editions du Net (France) est une analyse critique sur les faits majeurs et détails qui ont défini la gestion du football national durant les années d’après le Mondial 2002 durant lequel le Sénégal avait brillé, en atteignant les quarts de finale pour une première participation.
Très en verve lorsqu’il s’agit du sport sénégalais et de l’Afrique, Cheikh Mbacké Sène est un journaliste-écrivain-essayiste connu pour son engagement. Bannir le silence coupable, tel est l’objectif de cet ouvrage, fait-il savoir.
«La décennie 2003-2013 qui aurait dû voir se poursuivre l’œuvre de deux hommes venus d’ailleurs (Peter Schnittger et Bruno Metsu), accomplie de connivence avec des nationaux engagés comme Ousmane Paye, El Hadji Malick Sy « Souris » ou encore le défunt Omar Seck et nous valoir un titre continental », regrette-t-il. Le Sénégal a pris le chemin inverse, alignant contre-performances sur contre performances.
Pourquoi les «Lions» n’ont-ils jamais pu aller plus loin qu’en 2002 ? Pourquoi ne parviennent-ils pas à sortir la tête de l’eau malgré les efforts colossaux et les multiples dons de soi ? Qu’est-ce qui empêche le Sénégal de confirmer sa « grandeur » footballistique ?
« Les guerres intestines, le maraboutage, l’amateurisme et le manque de conviction », comme seuls facteurs bloquant du football sénégalais selon l’auteur.
Dans le livre, l’auteur dénonce les guerres de positionnement qui ont balayé ou entravé les ambitions et projets de certains hommes de conviction. Des clivages tout azimut qui partent des milieux politico-administratifs pour arriver dans la « Tanière des Lions » et implique assez souvent journalistes, supporters… Cheikh Mbacké Sène insiste que, sur la base de son intime conviction et au regard des talents produits dans la décennie écoulée, « le Sénégal pouvait sans conteste s’imposer sur le continent et faire mieux que l’Egypte ». Mais dans « les guerres des dirigeants souvent des amateurs, la dualité stérile entre ministère de tutelle et la fédération, les sélectionneurs mercenaires sans grande conviction enrôlés sur des critères lugubres, et des joueurs qui prennent la sélection pour le Club Med et le maillot national pour un string », le Sénégal ne pouvait espérer mieux que ces interminables déconvenues.
« Guy Stephan, Kasperczak, Pierre Lechantre ont fait beaucoup de mal aux Lions »
Les sélectionneurs comme Guy Stephan, Henryk Kasperczak, Pierre Lechantre y ont fortement pris pour leur grades. L’auteur les considère plus pour des « gens qui n’avaient rien à foutre du football Sénégal. Ils ont causé plus de mal qu’ils ont rendu service ».
L’auteur souligne que « le Français jouait sur deux tableaux pour faire monter les enchères avec son club Al Arabi de Doha (Qatar), mais n’avait jamais eu l’intention véritablement d’entraîner le Sénégal. (…) Guy Stephan a dénaturé le football des Lions (…) et Henrik Kasperczak était moins impliqué et peu inspiré ». En 2008 « Henrik Kasperczak s’était rendu au Ghana dans un climat qui laissait perplexe. Face aux alertes du président de la FSF de l’époque, Mbaye Ndoye, et de nombreux autres observateurs par rapport au jeu peu convaincant des Lions, le Polonais est resté calfeutré dans une suffisance arrogante et coutumière. Il débarque au Ghana avec « ses » certitudes, lesquelles sonnent creux dans les oreilles de tout le monde sauf dans celles de ses thuriféraires qui refusent de voir la réalité en face et rêvent de miracle », écrit-il.
Le maraboutage est touché du doigt « là où certains veulent se murer derrière le rationnel ». « Dans mon intime conviction, n’importe quelle équipe aurait battu cette équipe du Sénégal bien « ligotée » par les « maras » recrutés jusqu’au fin fond du continent. Refuser d’accepter la partition du maraboutage dans le football sénégalais pour ne pas dire africain, c’est comme voir un Lébou ou un Sérère renier son statut de Sénégalais », écrit-il. Comment, dès lors, ne pas pointer du doigt le maraboutage si l’on sait que le Sénégal n’a gagné le moindre match depuis la CAN 2006 ? L’auteur pose dans le livre des faits réels auxquels l’on ne peut coller aucune explication rationnelle. Ils donnent des exemples de méfiances entre joueurs et des faits connus de tous les pensionnaires de la tanière de l’époque.
Non sans vouloir stigmatiser, l’auteur invite après lecteur de cet ouvrage à la réflexion.
« Le bien-fondé de cet essai est d’inciter chaque acteur, à quelque échelle qu’il soit, joueur, entraîneur, dirigeant, autorité sportive, supporter et journaliste, à se remettre en question afin que les erreurs du passé puissent servir à l’avenir et qu’on puisse enfin œuvrer tous et foncièrement de concert. C’est comme cela seulement que nous parviendrons à stopper l’éternel recommencement des « relances sans retombées » et à réussir tous ensemble à faire du Sénégal enfin… un champion d’Afrique », conclut l’auteur, non sans citer Winston Churchill qui disait : « Plus loin on regarde vers le passé, plus loin on voit l’avenir ».
Un livre riche en faits, avec une analyse intéressante des facteurs bloquants qui éventre le football sénégalais comme jamais cela ne s’était fait auparavant. Pour la première fois, on touche du doigt les vrais maux du football sénégalais.