Dakarmidi – Qu’il me soit permis à l’entame de mon propos de lever toute équivoque sur une volonté de polémiquer avec le doyen Mody Niang à propos des différentes postures de l’épouse du chef de l’Etat Mariéme Faye Sall. J’avoue que je voue un grand respect au doyen pour l’ensemble de son parcours et de son engagement pour la démocratie sénégalaise.
Mais il me semble contraint par devoir et surtout par plaisir de témoigner sur une dame que j’ai pu admirer dans une proximité que de rares Sénégalais ont pu avoir la chance d’obtenir. De mes fréquents séjours saint-louisiens en compagnie de ma seconde épouse native de la vieillie cité, j’ai été surpris de savoir que la famille maternelle de Marième Faye Sall habitait en face de celle de mon épouse au quartier Ndiollofène. Le voisinage faisant le reste, ces deux familles ont fini de dissiper toute barrière depuis des générations et des générations. Alors ma surprise, disais-je, a été par le hasard d’un calendrier de séjours qui coïncida à St-Louis, de retrouver la Première dame assise à même le sol sur une natte dans la cour de sa famille st-louisienne, sans garde du corps.
Ces derniers étaient restés dans leurs véhicules. Aucun policier devant la maison. Elle fut entourée de sa famille, mais aussi des amies d’enfance qui habitent encore dans le quartier. Un décor qui surprend, puisqu’il ne permet pas d’établir un distinguo entre Marième Faye Sall et sa famille ainsi que ses voisins. Assurément, cette posture faite de sobriété, d’humilité, est accompagnée d’une capacité d’écoute pour prêter une certaine attention à toute personne sollicitant une petite attention, mais aussi un soutien. Marième Faye Sall passe ainsi ses journées saint-louisiennes à redonner une certaine dignité à une proximité qui pensait qu’elle allait les toiser, mais elle a démontré que malgré son statut, elle reste cette femme sénégalaise pouponnant tout le monde.
Mon admiration de la Première dame provient fondamentalement de ce vécu que j’ai pu apprécier personnellement. Mais il reste que l’épouse de Macky Sall est d’une autre dynamique, en rupture avec ses devancières. C’est en connaissance de cause que je parle du fait que j’ai eu la chance, à travers mes activités de soutien aux œuvres sociales des Premières dames, de développer une proximité avec Elisabeth Diouf, puis avec Viviane Wade. Que l’on puisse reprocher –et d’ailleurs injustement- à Marième Faye Sall, des largesses à l’endroit des populations, on n’épargnerait guère ses devancières répondant d’un même statut. Il est vrai que mère Thérésa a été canonisée par l’église pour services rendus à son prochain à travers des gestes simples, mais très affectueux. Si cette grande icône de la religion catholique a pu être sacralisée pour services rendus à son prochain, c’est qu’elle a obtenu le soutien moral et financier du chef de l’église, à l’époque Jean Paul II. Les Premières dames pour la plupart, ne s’éloignent guère de la fécondité heureuse de mère Thérésa. Elles œuvrent aux côtés de leurs époux de chefs d’Etat, souvent dans le social à travers l’humanitaire pour les populations surtout les plus démunies. Est-ce un délit ?
C’est grâce à cet engagement que l’ex Première dame Elisabeth Diouf a pu consruire à travers le pays, une chaîne de centres de santé portant son nom. La Fondation Solidarité Partage de Mme Diouf a doté notre pays d’environ 9 maternités qui 17 ans après le départ du pouvoir du couple Diouf, continuent de fonctionner en plein régime sur l’ensemble du territoire. Elles participent à enrichir le plateau infrastructurel médical de notre pays. Mme Elisabeth Diouf n’avait pas de fortune lui permettant de construire et d’équiper ces maternités. Des mécènes comme moi, Bara Tall, Fakhry (savonneries) et tant d’autres, ont beaucoup soutenu et continuent encore de soutenir ces maternités en équipements divers. Mme Viviane Wade s’est aussi engouffrée dans cette dynamique pendant tout le temps du mandat du président Wade, à travers sa Fondation Education Santé, qui avait fait de la promotion de la santé de la mère et de l’enfant au Sénégal, son domaine d’activité de 2003 à 2011. Mais il faut dire que pour Mme Wade, bien avant l’arrivée de son mari au pouvoir, elle s’activait à soutenir les couches sociales du pays. On retiendra l’activité d’apprentissage aux femmes de Malika dans la banlieue dakaroise, à la broderie. En France, Danielle Mitterrand a attendu l’arrivée de son époux François Mitterrand au pouvoir pour créer et animer une fondation au service des plus démunis en France et dans le monde.
Alors, Marième Faye Sall ne pouvait ne pas s’installer dans une pratique dont elle ne pouvait guère échapper. Cette dame qui attire par son sourire sympathique, a réussi à s’installer très rapidement dans le cœur de tous les Sénégalais. Non, lui faire la querelle de l’utilisation des instruments financiers et techniques de l’Etat pour mener à bien sa mission, c’est assurément lui faire un mauvais procès. Parce que figurez-vous, que comme ses devancières, elle bénéficie de nombreux soutiens financiers et matériels de mécènes qui cherchent peut-être à recevoir le retour de l’ascenseur – (cela a été toujours ainsi depuis que le monde est monde, et cela le restera comme disait Idrissa Seck, jusqu’ à l’extinction du soleil. Et Dieu ne donne pas directement, il le fait par le biais de quelqu’un ou à travers quelque chose). Etant entendu que les pouvoirs publics ne peuvent pas tout faire, les fondations des Premières dames participent d’une certaine manière à prolonger l’action de l’Etat.
Cette dame portant taille basse, ndokett, mame boye et grands boubous lors de cérémonies officielles et privées nous renvoie parfaitement à notre sénégalité. N’hésitant guère à aller vers les couches les plus défavorisées, à s’asseoir avec elles dans leurs foyers et à entamer un dialogue direct avec les populations, et sans intermédiaires, elle déroule une posture qui a fini de séduire, nonobstant les critiques. C’est ce qui fait son charme, parce que ne faisant pas dans la démagogie, Marième Faye Sall démontre chaque jour que la fonction de Première dame n’a pas de prise sur elle. Sur ce registre, elle se différencie énormément de ses devancières. Alors, il est clair que chez Marième Faye Sall, il y aura une vie après le pouvoir. Une telle perspective se perçoit nettement dans les actes posés quotidiennement par l’épouse du chef de l’Etat. Ce qui fait que son statut ne prime pas sur son savoir-être.
Baba TANDIAN