Dakarmidi – Une plainte a été déposée lundi contre Moses Thomas, chef de l’unité anti-terroriste sous l’ancien président Samuel Doe. Il est soupçonné d’être l’un des auteurs de la tuerie de 1990, ayant fait 600 morts.
Ils avaient choisi un dimanche pour attaquer l’Église luthérienne Saint-Pierre de Monrovia. Ce 29 juillet 1990, plus de 2 000 hommes, femmes et enfants sont entassés dans ce lieu sacré, espérant y trouver un refuge. La plupart d’entre eux sont d’ethnie Mano et Gio, ils se savent suspectés de soutenir les rebelles de Charles Taylor et les hommes de Prince Johnson, désormais aux portes de la capitale. Les troupes du président Samuel Doe sont encerclées. Et aux abois.
Elles commettent alors l’un des plus importants massacres de la guerre civile libérienne : des soldats pénètrent dans l’Église et tuent pendant plusieurs heures. 600 personnes y trouvent la mort.
Plainte pour meurtre, torture, crime de guerre et crime contre l’humanité
Aujourd’hui, leurs restes reposent toujours dans des fosses communes à côté de l’Église luthérienne. Personne n’a jamais été jugé pour cette tuerie. Mais désormais, les rescapés vont pouvoir espérer obtenir une part de justice.
Au nom de quatre survivants, le Centre pour la justice et la responsabilité (CJA), une organisation américaine des droits de l’homme, a porté plainte ce lundi 12 février contre Moses Thomas pour meurtre, torture, crime de guerre et crime contre l’humanité aux États-Unis. Une procédure qui ouvre la voie à des poursuites judiciaires. Le suspect, qui est toujours en liberté, doit désormais être prochainement entendu par un juge.
Des années d’enquêtes
28 ans après, c’est en effet près de Philadelphie que des associations de victimes sont parvenues à localiser l’un des suspects de ce massacre. À l’époque, Moses Thomas était un des colonels des Forces armées du Liberia (AFL). Proche de l’ancien président Samuel Doe, il commandait l’unité spéciale anti-terroriste.
Dès 2000, Moses Thomas était en réalité entré sur le sol américain sous une fausse identité
Sa trace a ensuite été perdue jusqu’en 2012, où des rumeurs au sein de la communauté libérienne faisaient état de sa présence sur le sol américain – il y était en réalité entré sous une fausse identité dès 2000. Des années d’enquêtes ont été nécessaires à plusieurs organisations des droits de l’homme américaines, suisse et libérienne pour le retrouver, recueillir des témoignages et monter un dossier.
Procédures judiciaires
À ce jour, les seules procédures judiciaires ouvertes l’ont été à l’extérieur du Liberia : aux États-Unis – où Chuckie Taylor, le fils de Charles Taylor, a été condamné à 97 ans, en Belgique, en Suisse ou encore en Grande-Bretagne. D’autres plaintes seront prochainement déposées.
Charles Taylor, l’ancien président, n’a quant à lui été jugé que pour les crimes de guerre commis en Sierra Leone. Il purge une peine de 50 ans de prison en Grande-Bretagne.
Au Liberia, où personne n’a jamais été jugé pour les crimes commis pendant les 14 années de guerre civile qui ont fait au moins 150 000 morts, l’impunité continue de régner. Prince Johnson, ancien chef de guerre devenu célèbre pour avoir torturé devant des caméras l’ancien président Doe, en est l’une des incarnations.
Sénateur depuis 2005, il a recueilli 8 % des voix à la dernière présidentielle, et a apporté son soutien à George Weah, élu le 26 décembre dernier. Le nouveau président libérien, superstar du football, n’a jamais abordé la question de la justice lors de sa campagne.
Source; JeuneAfrique