Même le roi des Zoulous n’a pas réussi à le convaincre de partir. Jacob Zuma, attaqué de toutes parts pour les affaires de corruption dans lesquelles il est empêtré, s’entête à rester au pouvoir. Le Président sud-africain, en quarante-huit heures, vient de neutraliser une nouvelle tentative pour le pousser à démissionner. Mardi, la présidente de l’Assemblée nationale, Baleka Mbete, a pris la décision historique de reporter sine die le discours annuel du chef de l’Etat devant le Parlement, initialement prévu pour jeudi. « Nous avons pensé qu’il était nécessaire d’assurer un climat politique plus propice » à la tenue de ce discours, a-t-elle déclaré.
Jacob Zuma n’est jamais aussi redoutable que lorsqu’il est en danger.
Le président a déjà refusé plusieurs fois de démissionner, clamant avoir le soutien du peuple et être victime de forces étrangères. Pour Marianne Séverin, «il est dans le déni. Il sait qu’une fois le pouvoir perdu, plus rien ne le séparera de la case prison. Il ne joue pas seulement sa survie politique, mais aussi sa survie tout court ». Et il a encore quelques cartes en mains.
Nombre de ses soutiens au Parlement ou dans les administrations sont eux-mêmes impliqués dans des enquêtes pour corruption, et lui sont donc dévoués corps et âme. « C’est la panique à bord. S’il saute, cela va mettre des centaines d’administrateurs au chômage. Beaucoup font partie de la clientèle des Gupta par exemple. » Dix ans d’infiltration patiente des administrations par ses affidés portent aujourd’hui ses fruits. Alors que le Président ne bénéficie pas, comme en France, d’une immunité présidentielle, il a réussi à s’affranchir temporairement des quelque 700 charges pour fraude et corruption qui pesaient sur lui grâce à leur annulation par un proche procureur général en 2008.
Il s’estime donc en position suffisamment forte pour conditionner son départ à l’obtention de l’immunité judiciaire pour sa famille, un certain nombre de ses ministres, et lui-même. Pas sûr, donc, qu’il parte de sitôt, même si la réunion du Comité national exécutif, jeudi, risque d’être décisive. « De toute façon, la société civile est vent debout pour défendre sa toute jeune démocratie. Les juges sont prêts à se faire Zuma. Même s’il ne tombe pas demain, ils ne le lâcheront pas », affirme Marianne.
La rédaction
Source : Libération