Être en vacances du pays ? Gageons que le président Macky Sall et ses ministres n’y songent même pas. Vent, soleil et plages s’éloignent. Août, c’est bientôt. Mais les aoûtiens, comprenez les adeptes des vacances d’été durant le huitième mois de l’année, vont devoir s’abstenir de toute envie de farniente. Urgences gouvernementales oblige.
Il est vrai que Senghor, le premier président du Sénégal avait l’habitude de prendre ses vacances en août en se retirant en Normandie. Depuis, il y a une sorte de tradition républicaine consistant, pour le chef de l’Etat du Sénégal et son gouvernement, à prendre leurs vacances pendant cette période de l’année. Pas cette fois. Surtout pas ! Deux raisons. La première est que la Covid-19 nous a déjà tous, peu ou prou, envoyés… en vacances depuis très longtemps. Et pour d’aucuns, mieux ou pire, en chômage. Le Coronavirus est bien la maladie de la dérégulation. Un seul virus se manifeste et tout est déréglé. La seconde raison est justement une question de raison : on ne peut pas rouvrir les classes, le 25 juin et probablement programmer les examens et autres épreuves d’évaluation (entre août et septembre) et se permettre d’aller en vacances. Aucun gouvernement responsable ne commettrait une telle faute. Politique, sociale, sociétale et économique à la fois. D’ailleurs, le président de la République n’est-il pas le premier parent d’élèves du pays ? Assurément !
À coup sûr, ne pas partir en vacances en rangeant dossiers et tablettes serait un bon point de marqué pour les gouvernants. Avec l’année scolaire qui recommence, à condition, en passant, que la rentrée du 25 ne soit pas un rendez-vous manqué comme le fut celle du 2 juin, ce n’est pas du boulot qui fera défaut aux ministres et à leur patron. En effet, on devine aisément, pour les enseignants, élèves, étudiants et parents, toutes les incommodités liées à la reprise du chemin des écoles et des amphithéâtres en pleine saison des pluies. En ville comme en campagne, les risques d’inondations, aggravés par un système d’évacuation des eaux pluviales défaillant, sont suffisamment élevés pour se payer le luxe de s’absenter. Ce n’est qu’un exemple. En plus, le risque de contamination et de propagation de la pandémie dans les établissements scolaires n’en est pas moins préoccupant.
L’éducation, la santé, l’eau, l’énergie, l’économie… Ces grands dossiers doivent être considérés comme des dossiers brûlants de la prochaine rentrée gouvernementale et des vacances qui ne doivent surtout pas avoir lieu. Quelle pédagogie par l’exemple et quelle belle image, si cette période de crise multiforme était mise à propos par le président Macky Sall et ses ministres pour aller cultiver les champs ! Passer de « paysans du dimanche » à paysans tout court. Des « vacances citoyennes » d’un autre genre. En termes de symbole, ce serait un retour vers l’agriculture et vers la terre que les Sénégalais ne manqueraient pas d’apprécier. Avouons qu’une telle volonté politique forte de valorisation de la terre est largement préférable à l’impopulaire boulimie foncière. Un double intérêt : vaincre le complexe de la terre et, cerise sur l’épi de mil ou de riz, sonner le top départ d’une vraie révolution agricole qui garantirait l’autosuffisance alimentaire. Nous devons consommer ce que nous produisons non ? Savoir compter sur nous-mêmes est la principale leçon à tirer de la crise actuelle. Ce ne sont pas les opportunités qui manquent.