Vous avez de la peine à accéder au Président ? Passez par la Première Dame ! Vous avez un problème social ? La First Lady est là pour vous ! L’épouse d’un Chef d’État, femme au cœur de la République ?
En tous cas, un statut jamais clair et rarement tranché. Pas seulement sous nos cieux. Ailleurs aussi, la place de celle qui chuchote à l’oreille du Président, partage ses émotions et subit ses humeurs, fait débat. Et parfois même polémique.
Il y a quelques années, dans un pays bien connu, le Landerneau politico-médiatique était mis sens dessus-dessous par le beau lâchage d’une célèbre Première Dame… de son époux de Président fraîchement élu. A la surprise générale, elle disait adieu au pouvoir et à ses lambris d’or. La bonne et belle dame n’avait pas attendu l’officialisation du divorce pour partir vivre sa passion amoureuse avec son Richard de publicitaire qui porte bien son nom. Bonjour les paillettes et les néons ! Le pauvre Président était contraint de noyer son chagrin d’amour dans la voix mélodieuse d’une non moins célèbre chanteuse devenue épouse et Première Dame. La première nommée suivait ainsi son cœur. Sachant que le cœur a ses raisons que la raison ignore, abstenons-nous de commentaires.
Première Dame, une épouse comme les autres ? Oui et non à la fois. Une institution ? Mieux, une « Présidente de la République » bis ? De jure, elle n’est ni l’une ni l’autre. Mais de fait, la réalité est tout autre. Alors quel statut pour cette femme pas ordinaire ? La question reste ouverte.
Marième Faye Sall, puisqu’il faut parler d’elle, la seconde moitié du Président Macky Sall n’est pas du genre à jouer les seconds rôles. Du moins ses actes tendent à démentir le dicton populaire. « Derrière chaque grand homme se cache une femme », sans qu’on sache d’ailleurs trop pourquoi. Le contraire est-il valable ? En se rendant dans les zones inondées de la banlieue de Dakar, munie de ses vivres et de ses motopompes et bien avant tout le monde, Mme Sall se met assurément devant. Et vent debout ! Non pas en opposition avec son mari de Président mais en complément. C’est une évidence de dire que le couple présidentiel est en bonne intelligence dans la stratégie. Il affectionne même le jeu de rôles : « tu me devances et je viens après » ou « je te devance et tu viens après ». Le résultat est identique. La stratégie peut être payante.
En effet, la descente de la Première Dame en éclaireuse dans des zones a priori hostiles pourrait faciliter la tâche au chef de l’État qui trouverait ainsi un terrain déjà déminé. La visite mouvementée de la Première Dame est de ce point de vue tout à son honneur. De toutes les visites celle de la Présidente de la Fondation Servir le Sénégal est la plus virale. Pour reprendre la fameuse boutade du célèbre griot El hadj Mansour Mbaye, elle n’est pas la « première Première Dame » à avoir fait entrer… le cuuraay (lire thiouraye – encens en wolof) au Palais pour rien ! Stratégie payante, disions-nous. Couteau à double tranchant aussi. Le retard accusé par le Président pour aller au chevet des populations sinistrées peut être interprété comme une indifférence à leur malheur.
Quand on a le temps de s’envoler pour un sommet à l’étranger, on doit avoir le temps de descendre dans le pays profond. Quel symbole et quel message au peuple angoissé si le chef de l’État himself, toutes affaires cessantes, l’avait fait le soir même des fortes pluies ! Sa démarche aurait été authentique, légitime et crédible. Dans certaines circonstances, la seule présence physique vaut plus que les milliards. « Nous ne saurons jamais tout le bien qu’un simple sourire peut être capable de faire », disait Mère Teresa, grand cœur et symbole achevé du don de soi.
Et puis une interrogation loin d’être superflue : à quoi a servi finalement la suppression du poste de Premier ministre ? Un PM n’est pas un luxe. Il est celui qui va au charbon à votre place et qui vous sert de couverture ou de fusible. Il y a dans l’air une sensation de vide et plus sérieux, d’inertie et d’immobilisme dans le pays. La perception est là et bien têtue : « un Président de la République qui gouverne par procuration et un Chef de l’opposition – de facto Idrissa Seck – qui s’oppose par procuration. »
La nature, on le sait, a horreur du vide. Le troisième au classement, Ousmane Sonko veut bousculer la hiérarchie. L’ancien prisonnier Khalifa Ababacar Sall tente, tel le phénix, de renaître de ses centres. Tous deux occupent le terrain. Pouvoir et opposition même sentence : le premier qui glisse est un homme noyé. En temps d’inondations une glissade est vite arrivée. Monsieur le Président, vous êtes plus que jamais attendu sur le terrain. Par des populations obligées de vivre comme des lagunaires