Amadou Bâ, ministre de l’Economie, des Finances et du Plan était à l’Assemblée nationale, ce vendredi pour présenter le Projet de loi n°22/2018 portant loi de Finances rectificative pour l’année 2018. Ousmane Sonko, l’ancien inspecteur des impôts et domaines, n’a pas fait de cadeau à l’argentier de l’Etat notamment sur les dispositions fiscales du projet de la Lfr 2018. Il a dévoilé «ce que cache cette loi de finances rectificative»
Nouvelles taxes impertinentes
«Vos nouvelles taxes, je disais que ces mesures sont impertinentes pour plusieurs raisons: d’abord, elles sont improductives et inefficaces dans la mesure où les écarts entre les prévisions de recettes et les réalisations sont davantage plus importants malgré une succession de décision de cette nature. Depuis, un an quatre nouvelles taxes ont été introduites dans la Loi fiscale apparemment sans effet; ensuite, ces mesures sont négatives en ce sens que ce sont des taxes sur la consommation qui entrainent forcement une hausse des prix (phénomène de l’inflation par l’impôt). Elles rétrécissent la consommation et conséquemment les impôts sur la consommation, principalement la TVA qui est le pilier des recettes fiscales ; enfin ces mesures sont injustes car faisant reposer la charge de l’impôt particulièrement sur le consommateur final, c’est à dire la grande majorité des Sénégalais»
La Cst, une fausse solution
«La contribution spéciale du secteur des télécommunications (Cst) qui remplace le Prélèvement spécial sur le secteur des télécommunications et de la contribution pour le développement économique est une fausse solution face au défi d’une juste fiscalisation d’un secteur aussi rentable que celui des télécommunications. Le gouvernement se plie et cède une fois encore aux lobbies des entreprises de télécommunications. La preuve est que cette taxe vient remplacer une autre (la Contribution pour le développement économique), qui a été instituée par la Loi de finances pour l’année 2017. Pire, le gouvernement aménage une exigibilité particulière pour les entreprises de télécommunications. En effet, dans le Code Général des Impôts toutes les taxes indirectes ont une exigibilité mensuelle. Pour la première fois, il est aménagé un « paiement sous forme de versements a? effectuer dans les quinze premiers jours suivant la fin de chaque trimestre de l’année civile » pour une taxe indirecte. C’est totalement inédit.
Le souci avec le Prélèvement sur les assurances
« Le Prélèvement sur les compagnies d’assurance (Pca) pose les mêmes problèmes que ceux soulevés ci-avant à savoir l’inflation par l’impôt. Aucune étude documentée n’est faite sur la contribution intrinsèque du secteur des assurances aux recettes fiscales. Cette taxe de 1%, en sus de la taxe sur les conventions d’assurance, va renchérir le coût de l’assurance au Sénégal et peut conduire à des comportements déviants. La véritable problématique que le gouvernement n’a pas osé affronter c’est la taxation des profits des sociétés d’assurances ou leurs importantes distributions de dividendes au lieu de toujours faire peser la charge de l’impôt sur les consommateurs.»
Prélèvements taillés sur mesure
«Prélèvement sur les opérations de consignation de produits pétroliers et d’avitaillement en hydrocarbures des navires battant pavillon étranger. A la suite de nos investigations, il semblerait que ce prélèvement est taillé sur mesure pour la société de droit suisse Adax Energy S.a, coupable de fraude fiscale à hauteur de plusieurs dizaines de milliards. Ce prélèvement serait un petit arrangement entre amis pour absoudre cette société de cette forfaiture qui fait suite à l’autre affaire, celle là de la Sar. Oubliez-vous autant que la loi, de manière générale, et la loi fiscale en particulier, doit être générale et impersonnelle ? Pire, en plus de ce cadeau fiscal, le président Macky Sall a même décoré le patron de cette société malgré ces affaires pendantes devant la justice et le fisc.
Addax Energy et les remous de la Sar
Les services de Macky Sall ne mentionnent pas, évidemment, que la société de Gandur, Addax, est au cœur des remous à la Société africaine de raffinage (Sar), lesquels ont abouti au limogeage d’Oumar Diop de son poste de directeur général de la Raffinerie. Il lui est reproché d’avoir octroyé à la société suisse, sans l’aval du Conseil d’administration, un marché de fourniture de 8 cargaisons de brut pour 400 milliards de francs CFA. L’un des actionnaires majeurs de la Sar, Locafrique (34%), dénonce ce contrat. Il a annoncé deux procédures judiciaires. Une à Londres pour, notamment, obtenir l’annulation du contrat, et une autre à Dakar contre Oumar Diop et X.»
La Rédaction