Dakarmidi – Le réalisateur sénégalais Alain Gomis, lauréat du Grand Prix du jury de la 67-ème édition du Festival international du film de Berlinale (9-19 février) pour son film « Félicité », espère que cette récompense va aider d’autres personnes à « transmettre de l’énergie » et à « construire quelque chose sur le long terme ». « Moi, ce à quoi je pense tout de suite, c’est comment on va réussir à transformer ça. Que ce qui se passe autour du film, chacun puisse en profiter et prendre ce petit moment et le transformer dans ce qu’il fait. J’espère que ça va aider d’autres à transmettre de l’énergie. On a besoin les uns des autres », a-t-il dit dans une interview accordée à l’envoyé spécial de l’APS, dimanche.
« Il faut absolument qu’on y arrive, parce qu’au final, les prix c’est bien, mais on ne les mange pas. Ce n’est pas ça qui nous nourrit. Ce qui est important, c’est qu’on arrive à construire quelque chose sur le long terme », a ajouté Gomis, qui était en compétition officielle à Berlin, pour la deuxième fois, après 2012 avec « Tey ». Il dit reconnaître « le plaisir du lendemain » résultant de la réaction de la famille, des amis, des messages des gens, des « petites attentions » et des coups de téléphone « qui touchent beaucoup, parce que tout ça est très long ». « C’est beaucoup de temps de travail, de persévérance ».Félicité (Véro Tshanda Beya), femme libre et fière, est chanteuse le soir dans un bar de Kinshasa. Sa vie bascule quand Samo (Gaétan Claudia), son fils de 14 ans, est victime d’un accident de moto. Ce fait est, pour elle, le point de départ d’une course contre la montre dans les rues de Kinshasa, pour le sauver. Ce « voyage » dans « Kin la belle » offre une lecture exceptionnelle d’une réalité vivante, faite de désillusions certes, mais d’énergie, de passion et de rêves. Les chemins de Félicité croisent ceux de Tabu (Papi Mpaka), autre symbole de cette résolution à croquer la vie, à en profiter pleinement.Pour Alain Gomis, « il faut se dire que ce n’est pas un film ou une personne, de temps en temps, qui compte : ce qui compte, c’est ce qu’on arrive, de génération en génération, à construire ensemble, à prendre conscience de nous-mêmes, à prendre conscience de nos erreurs et de ce qu’on est capables de faire et d’accepter d’avancer ensemble ». Il ajouté : « Qu’on arrête les jalousies trop nombreuses, les séparations, etc. Nous sommes des hommes et des femmes, c’est donc des choses qui arrivent dans toute société, mais que ça ne nous empêche pas d’avancer. Au-delà du manque de solidarité, c’est une volonté de faire tomber l’autre ». Le réalisateur a dit sa foi dans le travail d’équipe. « Je crois au collectif que nous sommes et je sens des choses arriver et c’est le petit espoir que j’ai. C’est cette façon dont je voudrais vivre ce prix. En regardant vers l’avenir ». Il a ajouté que « même sur les réseaux sociaux, le film était porté par beaucoup de gens », estimant toutefois que « le problème n’est pas le film – certains l’aimeront, d’autre ne l’aimeront pas ».« Il est juste de gagner sa place de façon honnête, a-t-il insisté. C’est un film qui a sa particularité. Ce n’est pas un film qui vient tel qu’on voudrait qu’il soit. On n’a pas épousé les formes la ‘réussite’, on est venus avec notre personnalité, notre façon de parler, notre façon de mettre en image, qui est la mienne du coup. Il faut avancer en disant : + on est comme ça. Vous prenez ou ne prenez pas, mais on ne va se plier+ » « Félicité » est le quatrième long métrage d’Alain Gomis, 44 ans, après « L’Afrance » (2002), « Andaloucia » (2007) et « Tey » (2012). Avec ce dernier film, il avait remporté, en 2013, l’Etalon d’or de Yennenga, la récompense suprême au Festival panafricain du cinéma et de la télévision de Ouagadougo (FESPACO).