Alors que la date de début du ramadan sera connue dans la soirée du jeudi 23 avril, l’Organisation mondiale de la santé (OMS) a émis des recommandations afin que les musulmans du monde entier puissent vivre ce mois de jeûne, de prière et de partage dans les meilleures conditions.
L’objectif de cette série de conseils de santé publique est de «concilier les pratiques du ramadan et la sécurité des personnes lors de la pandémie de Covid-19». Et afin de limiter la propagation du coronavirus, l’OMS appelle à limiter les célébrations religieuses collectives.
Le contact étroit entre les personnes facilite la transmission du virus
Le mois sacré du ramadan est marqué par des rassemblements sociaux et religieux au cours desquels les familles musulmanes et leurs amis se réunissent pour rompre le jeûne ensemble, après le coucher du soleil («l’iftar») ou juste avant l’aube (« suhour »).
L’OMS rappelle que le contact étroit entre les personnes facilite la transmission du coronavirus qui se propage «par des gouttelettes respiratoires et par contact avec des surfaces contaminées».
Pour l’agence onusienne, ces mesures constituent «des mécanismes essentiels» pour maîtriser la propagation de maladies infectieuses, en particulier d’infections respiratoires, associée aux grands rassemblements de personnes. « Les mesures visant à maintenir une distance physique, notamment la fermeture des mosquées, le contrôle des réunions publiques et les restrictions des déplacements, auront des conséquences directes sur les rassemblements sociaux et religieux au cœur du ramadan », a reconnu l’OMS.
Envisager l’annulation de rassemblements sociaux et religieux
Pour ce présent ramadan, l’annulation des rassemblements sociaux et religieux doit être «sérieusement envisagée». L’OMS recommande par conséquent de se fonder sur une évaluation standardisée des risques pour prendre toute décision tendant à restreindre, à modifier, à retarder, à annuler ou à maintenir un rassemblement de masse. Il s’agit notamment des prières volontaires faites en groupe pendant le mois sacré du ramadan.
Dans tous les cas, l’agence onusienne estime que les décisions doivent faire partie d’une approche globale engagée par les autorités nationales pour répondre à la flambée épidémique. Et si les rassemblements sociaux et religieux sont annulés, des solutions de remplacement virtuelles (télévision, radio, plateformes numériques, médias sociaux) sont possibles. Si les rassemblements du ramadan sont autorisés, des mesures pour atténuer le risque de transmission de la Covid-19 doivent être appliquées.
De façon générale, l’OMS invite les pays à considérer les autorités sanitaires nationales comme la principale source d’informations et de conseils sur la distanciation physique et les autres mesures visant à enrayer la Covid-19 dans le contexte du ramadan. Une façon de rappeler aux Etats de veiller au respect des dispositions qu’elles ont prises.
De plus, les responsables religieux doivent être associés aux décisions en amont, afin qu’ils relaient activement toute décision susceptible d’affecter les événements liés au ramadan. De toute façon, l’OMS estime qu’une solide stratégie de communication est essentielle pour expliquer aux populations les motivations des décisions des autorités. Et des messages sur les comportements à adopter doivent faire partie de la stratégie de communication.
Les malades du Covid-19 devraient ne pas jeûner
A ce stade, aucune étude n’a été réalisée sur le jeûne et le risque d’infection par le virus de la Covid-19. Si les personnes en bonne santé devraient pouvoir jeûner pendant ce ramadan, comme les années précédentes, les patients atteints de Covid-19 devraient toutefois «envisager de ne pas le faire». « Ils doivent suivre les dérogations prévues par la religion, en concertation avec leur médecin, comme pour toute autre maladie », note l’OMS. « Les gens doivent consommer chaque jour un ensemble diversifié de produits frais et d’aliments non transformés, et boire beaucoup d’eau », insiste l’agence onusienne.
En revanche, la consommation de tabac est vivement déconseillée quelles que soient les circonstances, en particulier lors du ramadan et pendant la pandémie de Covid-19. Selon l’OMS, il se peut que les fumeurs réguliers aient une maladie pulmonaire préexistante ou des capacités pulmonaires réduites, ce qui augmente fortement leur risque de développer une forme grave de la Covid-19.
Un risque accentué par le contact entre les doigts, la cigarette (qui peut être elle-même contaminée) et les lèvres. «Ce qui augmente la probabilité d’entrée du virus dans le système respiratoire », avertit l’OMS. Les utilisateurs de pipe à eau partagent souvent embouts buccaux et tuyaux, ce qui facilite aussi la transmission du virus.
Les personnes malades ne doivent pas participer aux rassemblements physiques
L’OMS appelle fermement aux personnes qui se sentent mal ou présentent des symptômes du Covid-19 à ne pas participer aux événements. Concernant les personnes à risque, comme les personnes âgées et celles présentant une affection préexistante (par exemple, maladie cardiovasculaire, diabète, maladie respiratoire chronique ou cancer), l’OMS les prie « à ne pas se joindre aux rassemblements ». Car de tels rassemblements les exposent à «développer une forme sévère de la Covid-19 ou d’en mourir».
Distanciation physique
S’agissant de la distanciation physique, l’OMS préconise de veiller en permanence à conserver strictement une distance d’au moins un mètre (trois pieds) entre les personnes et d’« utiliser les salutations culturellement et religieusement acceptées n’impliquant pas de contact physique ». Elle recommande par exemple, le salut de la main, le hochement de la tête ou la main sur le cœur.
L’agence onusienne appelle également les Etats à « empêcher les gens de se masser dans les lieux associés aux activités du ramadan, notamment les lieux de divertissement, les marchés et les magasins.
Mesures d’atténuation pour les rassemblements physiques
Durant tout le mois de ramadan, l’OMS plaide pour l’application de mesures pour tout rassemblement organisé dans le cadre du jeûne, notamment la prière, le pèlerinage et les repas en commun. S’agissant des lieux, privilégier, si possible, la tenue des événements en extérieur. « Sinon, veiller à ce que la ventilation soit suffisante et à ce que l’air circule bien », ajoute l’agence onusienne.
Encourager les mesures d’hygiène
Les musulmans pratiquent des ablutions avant la prière, ce qui est bon pour l’hygiène. Mais pour l’OMS, il faut aussi veiller à ce que les installations pour le lavage des mains soient correctement pourvues en eau et en savon. Il s’agit de mettre à disposition des solutions hydroalcooliques (contenant au moins 70 % d’alcool) à l’entrée et à l’intérieur des mosquées.
En outre, l’agence onusienne appelle à mettre à disposition des mouchoirs à usage unique ainsi que des poubelles avec sacs jetables munies d’un couvercle, et à veiller à ce que les déchets soient correctement éliminés.
Pour la prière en tant que telle, l’OMS encourage l’utilisation de tapis de prière personnels, posés sur les moquettes de sol. « Il faut afficher des conseils sur la distanciation sociale, l’hygiène des mains, l’hygiène respiratoire ainsi que les mesures de prévention ».
Les lieux de culte doivent être régulièrement nettoyés « avant et après chaque événement, au moyen de détergents et de désinfectants », recommande l’OMS.
A l’intérieur des mosquées, il faut veiller à la propreté des lieux et des installations réservées aux ablutions, ainsi qu’aux bonnes conditions générales d’hygiène et d’assainissement. « Nettoyer régulièrement les objets qui sont touchés souvent, comme les poignées de porte, les interrupteurs et les rampes d’escalier, à l’aide de détergents et de désinfectants », ajoute l’OMS.
Rassurer les croyants malgré le chamboulement des pratiques sociales
Les croyants qui souhaitent faire des dons (« sadaqat » ou « zakat ») aux personnes touchées doivent respecter les mesures de distanciation physique en vigueur. Pour éviter que les gens se massent lors des banquets de l’iftar, envisager d’utiliser des portions individuelles préemballées. Celles-ci peuvent être confectionnées par des entités ou des institutions centralisées, qui doivent respecter les règles de distanciation physique tout au long du cycle (collecte, emballage, stockage et distribution).