Dakarmidi – Si les pays africains ne tirent pas profit des ressources pétrolières et gazières, c’est parce qu’ils ne réussissent pas à signer de bons contrats avec les industries extractives. L’Afrique manque de ressources humaines capables de bien négocier avec ces firmes internationales. D’où l’intérêt de former les cadres du futur sur les métiers du pétrole et du gaz.
Le Nigeria, le Cameroun, l’Angola ou le Mozambique sont parmi les plus grands pays producteurs de pétrole en Afrique. A côté de ces géants, va bientôt trôner le Sénégal, un petit pays de l’Afrique de l’Ouest où ont été faites d’importantes découvertes de pétrole et de gaz. D’ici quelques années, le pays sera dans la liste des nations pétrolières et gazières. Un enjeu économique de taille qu’il faut préserver pour éviter de piquer le syndrome hollandais. L’exploitation pétrolière et gazière en Afrique engrange beaucoup d’enjeux. C’est d’ailleurs le thème du colloque pluridisciplinaire organisé par le Comité sénégalais de l’Initiative pour la transparence dans les industries extractives (ITIE). Cette rencontre de deux jours (26 et 27 mai) a réuni, à Dakar, plusieurs experts pour débattre de la problématique de l’exploitation pétrolière en Afrique.
Le Sénégal, qui sera bientôt dans le cercle ‘’restreint’’ des pays producteurs, a besoin de tirer des leçons des réussites et échecs des plus grands producteurs de gaz et de pétrole du continent. Même si le pays a déjà signé des contrats d’exploration ou d’exploitation avec certaines sociétés notamment Kosmos, Cairn Energy, BP, Total…, il n’est pas entré dans la phase active de la production. Mais, c’est toute une polémique qui a entouré la signature de ces contrats. Certains estiment que le Sénégal a été roulé dans la farine par les multinationales. Le président du Comité national ITIE, Ismaïla Madior Fall, reconnaît que la négociation des contrats est une question très complexe.
À son avis, ces firmes sont souvent accompagnées d’experts très calés dans le domaine du pétrole et du gaz avec qui même certains Etats sont incapables de rivaliser. Le Premier ministre Mahammed Boun Abdallah Dionne qui a présidé la cérémonie d’ouverture de cet atelier reconnaît que la plupart des pays africains n’ont pas suffisamment de ressources humaines qualifiées pour mener les négociations des contrats complexes de l’industrie extractive. ‘’Face à des sociétés accompagnées des meilleurs experts de l’économie minière et pétrolière, son excellence le président de la République, dans le cadre du NEPAD, a invité à veiller à traduire dans les contrats un équilibre entre les intérêts de l’investisseur, des populations locales et de l’Etat’’, dit-il.
Formation sur les métiers du pétrole
Le Premier ministre qui gère le département de l’Énergie et du Développement des Énergies renouvelables, depuis le limogeage du ministre Thierno Alassane Sall, suite à l’affaire Total, rappelle que c’est pour parer à ce déficit de ressources humaines dans le secteur du pétrole et du gaz que le chef de l’Etat Macky Sall a pris l’initiative de mettre sur pied l’Institut de formation sur les métiers du pétrole et du gaz (INFPG). Un établissement qui, à son avis, va s’occuper de tout ce qui est renforcement de capacités. ‘’L’industrie du pétrole et du gaz connaît des spécificités qui poussent les Etats à mettre en place des schémas directeurs capables de préserver les intérêts des pays abritant les gisements’’, poursuit-il.
L’autre disposition prise par le Sénégal pour mieux tirer profit de ces ressources pétrolières est la rénovation du code qui régit ce domaine. Le Code pétrolier sénégalais date de 1998. Après bientôt 20 ans de mise en œuvre, certaines dispositions ne répondent plus aux bonnes pratiques internationales. Une nouvelle révision va ainsi permettre de répondre aux exigences de l’heure, c’est-à-dire aux meilleures pratiques en matière de gouvernance.
Publication de toutes les conventions
En outre, suite à l’affaire Petro-Tim où Aliou Sall, le frère du président de la République et maire de Guédiawaye, avait été cité, certains acteurs politiques et de la société avaient fait de la publication des contrats passés avec les sociétés minières une exigence. Le gouvernement avait répondu favorablement en rendant publics beaucoup de contrats. Cette fois-ci, l’Etat veut aller plus loin. Le Premier ministre Mahammed Boun Abdallah Dionne, par ailleurs ministre de l’Energie, a donné la garantie hier, que ‘’toutes les conventions, tous les contrats, tous les accords seront publiés’’, écrit EnQuête Plus.
Selon lui, la volonté du gouvernement est que le Sénégal entre dans le ‘’cercle restreint des pays qui divulguent la totalité de leurs conventions minières et pétrolières’’. En plus, révèle-t-il, le gouvernement compte aller beaucoup plus loin, en mettant en place une loi d’orientation pour une ‘’répartition équitable des ressources pétrolières et gazières’’. Cette loi, dit le chef du gouvernement, ‘’va s’inspirer des meilleures pratiques en cours en Afrique et dans le monde, en vue de garantir une valorisation optimale des ressources et préserver les intérêts des générations futures’’.
La Rédaction