Dakarmidi – « A person of interest », pour reprendre la formule consacrée des autorités américaines, à ce point digne d’intérêt que le FBI, alors placé sous la férule du raciste décomplexé J. Edgar Hoover, le surveillait très étroitement, Mohamed Ali, l’inoubliable gladiateur des rings, n’est plus mais des documents secrets déclassés en août dernier, deux mois après son décès, et rendus publics récemment font ressurgir un pan de son illustre passé.
C’est à la faveur d’une action en justice intentée par la Judicial Watch (Surveillance Judiciaire), une organisation dédiée à la surveillance des activités du gouvernement américain, que l’espionnite aiguë dont fit preuve le FBI à l’égard du boxeur de légende, converti à l’islam, a été révélée au grand jour, au fil des 142 pages de rapports circonstanciés qui relataient ses moindres faits et gestes.
Pour l’homme de fer du FBI, J.Edgar Hoover, qui livra également une croisade sans merci contre Martin Luther King, usant et abusant de la calomnie à seule fin de discréditer le célèbre pasteur dont le « rêve » d’égalité entre Noirs et Blancs est entré dans l’histoire, le multiple champion du monde des poids lourds méritait une attention vigilante, de tous les instants, pour avoir rejoint les rangs, en 1964, de la Nation of Islam, chapeautée par Elijah Muhammad.
Figurant sous son nom de naissance, Cassius Clay, dans les comptes rendus détaillés des agents du renseignement aux aguets, chargés de le filer et de l’épier quotidiennement, cherchant la petite bête jusque dans ses moindres contraventions, y compris dans sa procédure de divorce avec sa femme Sonja, Mohamed Ali était suspecté d’être un élément séditieux par un FBI en proie à une paranoïa contagieuse sous l’ère Hoover.
Ainsi, une note de service, divulguée dernièrement, stipulait clairement : « Le bureau du FBI de Miami est prié de suivre l’action de divorce entre Cassius Clay et Sonja, en s’attachant à vérifier l’implication de la Nation of Islam en la matière ».
Se retrouvant dans l’œil de Moscou, chez l’oncle Sam, Mohamed Ali, alors au faîte de sa gloire, pouvait se targuer de mettre le FBI sur les dents et de rendre nerveux son directeur tout-puissant, à l’idée que sa célébrité rejaillisse sur la Nation of Islam et que sa fortune personnelle tombe dans son escarcelle.
On n’ose imaginer les sueurs froides de Hoover en apprenant que l’une de ses cibles prioritaires préférait la condamnation à cinq ans de prison plutôt que de s’avilir en menant une guerre injuste, jugée incompatible avec les préceptes de l’islam, contre ses frères du Vietnam qu’il appelait les « Asiatiques noirs »…
L’icône mondiale de confession musulmane, passée depuis à la postérité, a définitivement raccroché ses gants en juin 2016, quittant la scène de la vie, ce ring où tous les coups sont permis, pour rejoindre sa dernière demeure.
A voir ou à revoir les images des funérailles de Mohamed Ali à Louisville, dans le Kentucky, sa ville natale, en présence d’éminentes personnalités, parmi lesquelles figurait le président turc Recep Tayip Erdogan. Ses obsèques ont débuté par une prière mortuaire musulmane ouverte à tous, un « message de paix », ont précisé les organisateurs qui ont exaucé là le souhait du défunt.
Oumma