Dakarmidi – Jammeh peut-il être ceinturé par une force que pourrait incessamment déployer la CEDEAO sous l’égide de la communauté internationale? Tout paraît si simple à dire, mais la réalité sur le terrain est tout autre. L’on apprend de source militaire, que depuis quelques jours, l’armée de Jammeh est en alerte maxi, les frontières de la Gambie qui donnent sur Kaolack et toute la bande de la Casamance sont sous haute surveillance militaire, des ex membres du Mouvement des forces démocratiques de la Casamance, (MFDC) sont venus renforcer les milices de Jammeh, qui s’élargissent de jour en jour et qui sont d’attaque pour entrer en combat à tout moment et en tout lieu avec qui que ce soit.
Plus grave encore, dans certaines zones qui peuvent servir de passage à l’adversaire, les hommes de Jammeh, très avertis et lourdement armés, y ont placé des alarmes et des mines anti personnelles. Le dictateur gambien, conscient que son petit pays est une sorte de « banane dans la bouche du Sénégal », a dû chercher des renforts hors de ses frontières, en contactant d’autres hommes qui maîtrisent bien le nord du Mali et des réseaux « djihadistes », qui pourraient lui prêter main forte, en cas d’attaque de la CEDEAO.
Cette organisation sous régionale mise en branle pour destituer l’armada de Jammeh n’a toujours pas encore trouvé de consensus en son sein, puisque dans la forme, il est évident qu’il faut installer Adama Barrow dans les plus brefs délais et sans transaction mais dans le fond, l’heure est à la mobilisation. La France a utilisé le terme « transaction » avant-hier, lors de la conférence conjointe de Hollande et Macky Sall dans les salons de l’Elysée.
Par définition on pourrait retenir que « transaction » est un échange, entre deux ou plusieurs parties, basé sur la négociation pour un but donné. Hors pour la communauté internationale, il ne saurait y avoir de discussion avec Jammeh. « Il doit quitter » reste le slogan brandi par plusieurs dirigeants qui fustigent l’attitude de Jammeh dont celui du Nigéria, grande puissance africaine qui va jusqu’à lui promettre le même sort que Gbagbo.
D’aucuns pensent que négocier avec Jammeh serait considéré comme une injure au peuple gambien, qui par la voie des urnes, a légitimement choisi Adama Barrow pour présider à sa destinée. Dakarmidi l’annonciait hier, les propos provocateurs de l’homme de Kanilai, qui rejette d’un ton ferme, tous les appels qui lui sont adressés par des voies autorisées. Jammeh est en train de gagner du temps par cette démarche, il attend le verdict de la cour suprême, sans réellement vouloir se fier à ce qui sera prononcé car il a clairement indiqué qu’il ne quitterait pas le pouvoir tant que d’autres élections ne soient pas tenues.
Sur un tout autre registre, Dakarmidi pense que la situation géographique de la Gambie doit pousser le Sénégal, à réfléchir de manière profonde sur la stratégie à adopter pour arriver à bout de Yaya Jammeh. Dans la sous-région, tous les hommes de tenus sont convaincus qu’il faut attaquer Jammeh par surprise et l’extirper du territoire national sans effusion de sang, personne ne souhaite voir la Gambie devenir un théâtre d’affrontements et d’atrocités comme Alep.
Le Ghana, le Nigéria, le Libéria sont secoués par des crises profondes qui ont perforé leurs tissus sociaux, socles de leur stabilité d’antan et si rien n’est fait la Gambie file droit vers le chaos et des pays comme le Sénégal ne peuvent nullement être épargnés. La Côte d’Ivoire, le Mali, les deux Guinée, sont en train de leur côté de mener des luttes terribles pour faire revenir la sécurité dans leurs pays respectifs.
Le Sénégal, ce voisin direct de la Gambie, a aussi son Mfdc, un dossier épineux, une organisation que Jammeh finance régulièrement, dans le but de prendre le Sénégal en otage, et vivre dans une division qui facilite sa stabilité à lui. Pour toutes ces raisons, les chefs d’Etat de la CEDEAO doivent analyser la situation avec minutie et tenir compte du facteur temps qui est déterminant dans ce contexte où les jours deviennent trop précieux.
Il faut reconnaître que Jammeh s’est préparé à cette guerre depuis plus d’une décennie et Dakarmidi vous livre ici les raisons. Déjà en 1999, il avait acheté un aéronef « Iliouchine IL-62M » à Viktor Bout, surnommé le « marchand de mort », célèbre trafiquant d’armes russe qui purge désormais une peine de vingt-cinq ans de prison aux Etats-Unis.
En 2001, le groupe d’experts de l’ONU sur le Liberia a prouvé l’implication de l’aéronef gambien dans des livraisons d’armes à Charles Taylor, condamné en 2012 à cinquante ans de prison pour crimes contre l’humanité et crimes de guerre par le Tribunal spécial de la Sierra Leone. En 2000, les autorités françaises ont alerté l’ambassadeur de la Gambie à Paris, M. Bocar Essa Sy, aujourd’hui réfugié aux USA, sur l’Iliouchine IL-62M et ses trafics ».
Et l’arrestation il y a un, an d’un trafiquant d’armes en Espagne a relancé les soupçons sur l’illégalité des activités aériennes du président gambien. En 2006, Jammeh fait l’acquisition d’un Boeing 727 pour remplacer l’Iliouchine qui n’avait plus le droit, pour des raisons de sécurité, de se poser dans certains aéroports occidentaux. Tout récemment, le 26 juillet 2016, Pierre Dadak, ce richissime franco-polonais, a été arrêté dans sa villa d’Ibiza.
Il est accusé par Interpol d’avoir livré 200.000 kalachnikovs, des lance-roquettes et des chars au Soudan du Sud, en utilisant un passeport diplomatique de Guinée-Bissau et d’un second titre de voyage gambien, selon la police espagnole, cet homme connu des services secrets européens, se déplaçait souvent à bord de l’avion présidentiel gambien. En décembre 2016, ce même Pierre Dadak introduit Franck Barresi, homme d’affaires français et figure présumée de la pègre marseillaise, chez Jammeh, pour l’ouverture d’un vaste réseau de trafic d’armes en Europe de l’Est.
Selon Niklas Hutlin, chercheur à l’université américaine George Mason (Etats-Unis) et spécialiste de la Gambie, au cours de ce quart de siècle, Jammeh détient le plus d’armes lourdes et légères dans la sous-région, et ce, d’une manière officieuse. Tout le monde se souvient de l’arraisonnement en 2010, d’un navire iranien, rempli d’armes, en route vers la Gambie, dans les eaux nigérianes.
Jammeh évolue dans le business lucratif du transit, et entre le transit et le trafic, il n’y a qu’un seul pas! Ainsi, même avec toutes ces interdictions, il fait revoler l’Iliouchine discrètement, dans des voyages mystérieux, se préparant à affronter sérieusement la CEDEAO et la communauté internationale, pour enfin tester son potentiel en armement lourd.
Toutes ces informations, prouvent à suffisance qu’il est impossible que Jammeh puisse avoir un sort autre que celui de Gbagbo, de Ben Ali, de Hosni Moubarak, ou encore de celui de ces grands dictateurs, qui avaient fini un jour, sans y avoir été préparés, par être les principaux ennemis de leurs peuples, de leurs voisins et de la communauté internationale en général. En définitive, Jammeh n’est pas un homme courageux, car le courage consiste à s’arrêter un jour et à passer à autre chose.
Le temps s’est arrêté pour lui, coincé dans sa paranoïa, ses sentiments et ses ressentiments, il est seul, isolé, mal-aimé par un peuple qui ne l’a jamais adulé. Dans sa chute, inéluctable, car l’histoire n’admet aucune nouvelle édition, elle fonde ses principes dans la réédition, il emportera ses hommes, que rien ni personne ne pourront sauver.
La Rédaction
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