Dakarmidi – J’avoue que j’ai beaucoup hésité, jusqu’à l’heure de bouclage du journal, à publier la présente chronique. Je suis tiraillé entre d’une part le désir d’apporter un témoignage sur des situations que j’ai vécues et qui peuvent renseigner sur la personnalité de la Première Dame, Marème Faye Sall, et la portée de ses actions humanitaires et d’autre part, le souci de ne pas révéler une certaine intimité à laquelle, toute personne tiendrait et qui plus est, arrivée à un certain niveau de l’échelle sociale
Dès l’accession du président Macky Sall au pouvoir, son épouse avait été particulièrement prise en grippe. La Première dame ne semblait pas comprendre ce qui lui arrivait. On lui reprochait tout. Comme par exemple son port vestimentaire, sa coiffure, son maquillage, la façon de se tenir aux côtés de son mari, sa spontanéité naturelle, son sourire débonnaire, son penchant à fréquenter tout le monde, le sac à main qu’elle porte qui, un jour peut paraître bas de gamme et un autre jour peut être vu comme trop cher. Même un sac de 2000 dollars que lui avait offert le chanteur Akon à l’occasion d’un séjour aux Etats unis a fait les choux gras des médias ! On la surprend discrètement dans les rangées d’une mosquée pour faire ses prières et elle est accusée de chercher à faire le buzz ou à attirer l’attention sur elle. On lui reproche de recevoir des amies, des connaissances ou des personnes avec lesquelles elle souhaiterait échanger. On lui reproche de rendre visite à des dames dont les époux ont eu à occuper de hautes fonctions pour chercher sans doute à profiter de leurs expériences.
Maréme Faye Sall avait beau essayer de se montrer indifférente à toutes ces petites méchancetés et même certaines mesquineries, qu’elle n’en était pas moins affectée. Jamais une Première Dame n’avait fait l’objet d’autant d’attention culpabilisante. Justement, c’est parce qu’elle est une curiosité. Cette femme qui s’était engagée sur le terrain politique aux côtés de son époux, participant à la mobilisation des électeurs, en pantalon jean et un t-shirt à l’effigie de son candidat, une casquette vissée sur la tête, ne devrait plus se mêler aux militants, une fois son époux devenu président de la République. Le code de bonne conduite est on ne peut plus absurde. Une Première Dame ne devait pas fréquenter des amies d’enfance ou des voisines de quartier ou des camarades de classe.
Une Première Dame ne devrait pas non plus fréquenter les cérémonies familiales comme les deuils, les mariages, les baptêmes. Maréme Faye Sall a tort de nous ressembler trop. Elle se serait appelée Martine Fayard Sall, que les diatribes l’auraient épargnée, comme ses devancières dans la chambre à coucher présidentielle du Palais de l’Avenue Léopold Sédar Senghor. Des hommes politiques et pas des moindres, Idrissa Seck s’est notamment distingué par sa virulence, ont eu l’inélégance de l’attaquer, d’en faire une cible. Se sont-ils dit que Macky Sall demeure impassible, tout semble lui glisser sur la peau, et que pour l’atteindre il faudrait s’en prendre à sa femme ? Peut être que cette dame renvoie au leader du parti Rewmi une image antagonique de sa propre épouse.
C’est justement à ce niveau que l’on mesure l’élégance et l’altruisme d’un Malick Gakou. Le leader du Grand Parti ne cache pas sa sympathie pour la Première Dame et c’est pour éviter des amalgames qu’il se garde de faire une jonction des actions de sa Fondation Maternité Santé avec celle de la Fondation Servir le Sénégal. A la vérité, l’épouse du président Macky Sall a tort d’être comme nous autres Sénégalais. Une Première dame ne devrait pas trop nous ressembler. C’est à dire être une Sénégalaise authentique. Porter un nom et un prénom communs au Sénégal. Une Première Dame ne devrait pas s’habiller comme une Sénégalaise lambda, encore moins danser comme les Sénégalaises le «ndawrabine» ou le «Ndaga». J’emprunte à un aîné sa formule, «la haine de soi».
Certains la détestent parce qu’ils ne s’aiment pas. Nous ne voulons pas que ceux que nous admirons, les exemples de réussite qui peuvent faire rêver viennent de nous, de nos chaumières. L’étranger qui devient célèbre ou réussit ou qui a sa fortune, ne dérange personne. Mais nous ne souffrons pas que quelqu’un du même profil que nous autres, aux mêmes origines sociales, qui a suivi les mêmes études et fréquenté les mêmes écoles que nous autres, soit donné en exemple. Il suffit de voir combien les journalistes sénégalais sont féroces avec leurs confrères qui ont plus de réussite qu’eux ! Il suffit de voir combien les universitaires sénégalais peuvent se montrer cruels à l’égard de leurs collègues qui brisent le plafond de verre !
Ainsi, on reproche à Maréme Faye Sall d’aider les pauvres par le biais de sa fondation. Peut-être qu’on aurait préféré voir des images de notre Première Dame dans des propriétés de Marbella ou de Saint-Tropez ou faire le shopping dans les grandes boutiques de Paris et d’Anvers, plutôt que dans des images dans lesquelles elle communie avec ses compatriotes démunies qui manquent de tout, dans les quartiers de Dakar, de sa banlieue et des villages du Sine, du Saloum, du Cayor ou du Fouladou. Au final, il peut bien y avoir un gain politique pour son époux. Soit ! Que Maréme Faye Sall soit le meilleur agent électoral de son mari ! Qu’est-ce qu’il y a de plus légitime ? Cela ne devrait offusquer que ceux qui ne peuvent pas obtenir autant d’engagement de leur propre femme.
Et c’est à ce niveau qu’il convient de porter un témoignage sur les subsides de la Fondation Servir le Sénégal. Je vais parler en particulier de la contribution publiée par Mody Niang, flétrissant les actions de la Première Dame. Je crois entretenir avec Mody Niang, depuis de nombreuses années, des relations empreintes d’affection et de respect. J’ai pu douter un instant que cela soit réciproque, il y a quelques semaines de cela, quand je suis allé vers lui à l’occasion d’une rencontre fortuite lors de la soutenance de la thèse de Doctorat d’Etat du journaliste Cheikh Diallo. La fille de Mody Niang était surprise de me voir faire l’accolade à son père et elle n’avait pas pu se retenir de dire avec un brin d’humour : «Je croyais que mon père n’était d’accord avec personne».
Qu’importe ! J’éprouve de la peine de voir Mody Niang s’en prendre avec une hargne, une véhémence stupéfiante, à une dame de l’âge de sa fille. Mais le plus inacceptable reste qu’il accuse, sans la moindre preuve, la Première Dame Maréme Faye Sall de tirer les ressources de ses actions «humanitaro-politiques» des fonds politiques du président de la République ou de «mécènes», moyennant des contreparties intéressées par des marchés publics ou je ne sais quel avantage à attendre du régime de Macky Sall. La Fondation Servir le Sénégal ne reçoit aucun financement tiré des fonds politiques du chef de l’Etat. C’est encore là toute la délicatesse de mon exercice.
On est obligé de le dire ainsi, mais tous les proches du couple présidentiel savent que les fonds politiques ne profitent pas à la Fondation Servir le Sénégal ou à Maréme Faye Sall. Mieux, la Première dame est particulièrement regardante sur cet aspect des choses. «Rien qui pourrait entacher le magistère de mon mari ne viendra de moi !». Elle en fait un point d’honneur. Et ces mécènes ? Nous sommes nombreux à pouvoir témoigner d’avoir été approchés par des personnes ou des organismes qui souhaiteraient soutenir les actions de la Première Dame Maréme Faye Sall. Seulement, cette dernière décline des offres pour avoir refusé systématiquement de formuler des demandes de soutien. C’est comme une paranoïa, la première Dame voudrait éviter qu’un quelconque don ou un soutien sollicité, puisse être utilisé pour ternir l’image ou l’action politique de son époux.
Pourquoi voudrait-on dénier qu’un simple sentiment œcuménique pourrait guider les actions sociales de la Première Dame ? Ils sont nombreux à être nés pauvres. Ils allaient à l’école le ventre vide, les chaussures rapiécées et le pantalon troué. N’empêche, ils étaient toujours les premiers de leurs classes. Aujourd’hui, grâce à Dieu, ils font partie des personnalités qui comptent le plus dans leur pays et sur la scène internationale. Et il peut leur arriver d’aider un élève, un étudiant inconnu, à travers lequel ils projettent leur propre situation. Il peut leur arriver d’aider une vieille personne, de soutenir une personne socialement défavorisée pour simplement projeter ou substituer à travers ce geste, une action qu’ils auraient aimé faire pour leur vieille grand-mère ou un quelconque proche.
Malick Gakou déclare qu’en aidant à sauver une femme en couches, il semble se racheter du décès de sa maman parturiente. Qu’est-ce qui dit à Mody Niang qu’en aidant les vielles personnes à se soigner où à se doter de latrines, Maréme Faye Sall ne peut pas être dans une même situation psychologique ? Après le livre de Valérie Trierweiler, François Hollande s’était dit atteint le plus, par une expression mise dans sa bouche par son ancienne compagne. Valérie Trierweiler écrivait que François Hollande se moquait des pauvres en les appelant «les sans dents». Avec un peu d’humidité dans les yeux, François Hollande répondait : «Je ne laisserai pas mettre la conception de mon action au service des Français, et notamment de la relation humaine que j’ai avec les plus fragiles, les plus humbles, les plus modestes, les plus pauvres, parce que je suis à leur service et parce que c’est ma raison d’être, tout simplement ma raison d’être».
Dans la série télévisée à succès Game of Thrones, un des personnages du nom de Tyrion Lannister, fin stratège et politique, rabroué toute sa vie parce que nain, conseillera à un jeune dans la détresse de ne jamais oublier ce qu’il est. Il poursuit : «Le reste du monde ne l’oubliera. Porte-le comme une armure, et cela ne pourra jamais être utilisé pour te blesser». A tous ces honnêtes gens que d’autres peu courageux et ambitieux chercheraient à discréditer en brandissant l’épée de conditions sociales modestes, la fierté de vos origines et votre motivation intrinsèque à toujours vous dépasser, restent vos armes et boucliers dans ce Sénégal.