Dakarmidi – Conseiller du Président de la République sur toutes les questions juridiques, Ismaïla Madior Fall est devenu Garde des sceaux, ministre de la Justice à la faveur du dernier remaniement. Longtemps vu comme un universitaire de grande valeur, constitutionnaliste aguerri qui participait à trancher le débat sur nombre de sujets à forte dose de polémiques, M. Fall, a surpris son monde.
En effet, il est apparu à la face des Sénégalais comme un homme qui a changé sa trajectoire après qu’il ait été nommé comme conseiller du Président de la République. Et pour cause, nombre de dossiers qui ont créé et suscité des débats contradictoires avec des impacts assez discutables ont été son œuvre selon plusieurs hommes politiques. À titre d’exemples, l’on peut citer l’Acte 3 de la décentralisation encore et toujours au cœur des débats, le maintien du mandat présidentiel à sept ans poussant le Président Macky Sall à se dédire. Mieux encore, les dernières modifications intervenues dans le Code électoral sans oublier certaines questions posées aux Sénégalais lors du dernier référendum.
Nommé ministre de la Justice, d’aucuns ont perçu cette promotion comme une démarche consistant à désamorcer une bombe qui menaçait d’exploser à tout instant dans les couloirs du système judiciaire. À ce sujet, il faut revenir sur plusieurs cas qui ont concerné la marche de ce pouvoir sans oublier de faire allusion à la sortie de quelques magistrats pour dénoncer des faits et des actes. D’ailleurs, l’Union des magistrats du Sénégal (Ums) est montée au créneau plusieurs fois pour prendre la défende de certains de ses membres. Comme pour dire, que le pouvoir judiciaire réclame encore son «indépendance».
Aussi, pour d’aucuns, le professeur Ismaïla Madior Fall a tout pour être cette personne de consensus qui pouvait participer à faire appliquer certaines réformes qui concernent la justice. Homme d’expérience qui maîtrise bien le secteur judiciaire, ce constitutionnaliste avait peut-être plus de chance de faire mieux que nombre de ses prédécesseurs. S’il est avéré que tout part et que tout revient au Président de la République, par ailleurs président du Conseil supérieur de la magistrature, il n’est pas totalement faux de dire qu’un ministre peut faire mieux que l’autre.
Mais, est-ce que ce sera maintenant le cas pour M. Fall. Du moins, depuis qu’il a osé (enfin) prendre la carte de l’Alliance pour la République (Apr) pour devenir membre. Dorénavant homme politique ou politicien – c’est selon le comportement qu’il aura – il fausse un peu les calculs. Car, à vrai dire, il ne l’a pas fait au moment où les interprétations auraient été moins critiques, moins percutantes au vu du poste qu’il occupait. Comme pour dire que dans ce pays, être technocrate signifie ne pas goûter au plaisir du pouvoir, sinon on fera tout pour y rester.
Là, tout change puisqu’il a attendu d’être nommé ministre de la justice pour devenir militant-responsable à l’Apr. Pour se faire une base politique, avoir ses militants, essayer de plaire aux Sénégalais, tout faire pour faire réélire son mentor, il reste évident qu’il adoptera une posture politicienne dans les habits d’un ministre de la…justice. Madior à osé !
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