Chroniques du Midi
By Gentle Mara
Dakarmidi- El Hadj Abdoul Aziz Sy, quatrième fils d’El Hadj Malick Sy, est né en 1904, de Sokhna Safiétou Niang. Il eut la chance d’être éduqué par son père, ses grands frères. Fort de sa formation à l’université de Tivaouane où professaient tout ce que comptait le Sénégal de meilleurs enseignants. El Hadj Abdou Aziz Sy fit comme son père des voyages afin de voir ce qu’il y a dans les autres contrées du pays .
Ainsi il partit voir un des compagnons de Maodo Serigne, Hady Touré, pour parfaire sa culture. Ce dernier n’hésitera pas plusieurs années plus tard à lui consacrer un poème pour louer ses qualités de guide : « su fékoon serigne si dagnou doon ourus, yaw la fi guiss nga di Ngalam » . Il fréquenta plusieurs centres d’excellence, notamment celui de Mbacoumé, dans le Cayor. Puis en 1930 à l’âge de 26 ans, il partit à Saint-Louis qui était un passage obligé pour tout érudit, chez Serigne Birahim Diop. Il entreprend le pèlerinage à La Mecque avec son ami Lamine Guèye en 1947. Il acquiert rapidement une réputation de poète et de chanteur en dirigeant les Chœurs des talibés de son père, ce qui contribuera à lui assurer une solide popularité parmi les membres de la confrérie. Rassembleur des forces sociales ; philosophe, moraliste et poète, il faisait autorité de par sa sagesse et sa culture.
Dans ce Sénégal pré et post-indépendance traversé par tous les courants et où tout le monde cherche à se mettre devant, « Dabakh » (qui est bon) a choisi d’être à l’écoute et au service des hommes. Donc à équidistance des leaders politiques selon certaines sources proches de la famille, tout en lui était simplicité, humilité, générosité et disponibilité. En somme, il rassurait.
Serigne Abdoul Aziz Sy, c’est aussi le républicain qui n’hésite pas à s’impliquer en temps de crise pour aplanir les divergences entre forces sociales. Le sage de Tivaouane n’était pas un homme qui se taisait quand sa société était en danger. Face aux menaces qui guettent ses compatriotes, il a toujours demandé aux chefs religieux de tenir un langage de vérité à leurs fidèles. Au pouvoir temporel, il a toujours rappelé que rien n’allait plus dans ce pays en raison des hommes faux, corrompus et malhonnêtes exploitant honteusement les populations.
Dans le domaine économique, Abdoul Aziz n’échappe pas à la règle et tire de ses fonctions d’appréciables subsides. Il possède plusieurs concessions agricoles, en particulier dans la région de Saint-Louis, dont l’exploitation est assurée par ses talibés. Il s’illustra non seulement par son érudition mais aussi par ses prêches, son engagement pour la cause islamique, ses nombreux écrits en arabe et une importante biographie de son père, El Hadj Malick Sy.
Pacifique dans l’âme, humble, courtois et discret, Serigne Abdou Aziz a su tisser dans les pays arabes, notamment au Maroc et en Arabie Saoudite, un tissu relationnel très dense, avec un seul et unique objectif : cimenter la Umma islamique. Il s’est toujours considéré, preuve d’une rare modestie, comme un simple disciple parmi ceux de son vénéré père. Par son attachement à l’esprit et à la lettre du Coran et de la sounah, il fut l’exemple achevé du soldat de la foi. Par sa présence rassurante, il a su relever, avec beaucoup d’humilité, le défi de son illustre prédécesseur.
Par la grâce de Dieu, il a été un des serviteurs du Prophète qui ont élevé la tolérance au rang de sacerdoce. S’étant toujours préoccupé de la formation religieuse et de l’éducation de base des croyants, Serigne Abdou s’est fait un honneur de contribuer à l’unité et à la concorde entre confréries. Fervent partisan de la paix, il s’est personnellement investi pour en appeler à l’union des coeurs et des esprits.
Parler de Serigne Abdou, quelque angle que l’on puisse prendre, ne revient qu’à une chose : « daa baakh » (c’est un homme de bien). Après avoir veillé quarante (40) ans sur l’héritage et le temple de Maodo, il est rappelé à Dieu le 14 septembre 1997.