Dakarmidi- La passion de ces deux (2) hommes pour la politique et leurs parcours similaires d’inspecteurs des impôts et des domaines apparaissent comme leur trait d’union. Les deux hauts fonctionnaires ont également en commun la commune de Khombole, l’Université Gaston Berger (UGB) et la Direction générale des impôts et des domaines (DGID). Toutefois, les positions qu’ils défendent chacun à sa façon les éloignent l’un de l’autre.
A. Cinq ressemblances majeures :
1. Les mêmes origines
Ousmane SONKO et Maguèye BOYE sont tous les deux nés dans la première moitié des années 1970 dans le département de Thiès et originaires de Khombole, une petite commune du centre du pays. Ousmane a passé une partie de son enfance à Khombole là ou Maguèye y a passé toute son enfance. En poussant plus loin, on retrouve leurs origines lointaines dans le Gandiol, cette province du Walo du nord du Sénégal. Khombole est aussi la ville de naissance du Président Mamadou DIA, un homme d’Etat et de convictions, leur référence commune.
2. La référence à Mamadou DIA :
Les deux jeunes leaders politiques s’identifient à la pensée politique et l’engagement républicain de l’ancien Président du Conseil du Gouvernement du Sénégal. Ce n’est pas étonnant si Ousmane SONKO et Maguèye BOYE veulent réhabiliter leur référence, le Président DIA, et l’offrir en exemple. Si SONKO et ses camarades de parti lui ont donné le nom du siège de leur formation politique, Maguèye BOYE et ses compagnons de la plateforme citoyenne « APPEL de Khombole », et candidat à la mairie de Khombole, ont fait de Mamadou DIA le parrain des journées de l’excellence qu’ils organisent chaque année pour les élèves de la commune. Mieux, il ambitionne même de lui donner le nom d’ouvrages et de rues à Khombole, s’il est élu maire de la commune.
3. Deux sanarois produits de l’UGB
L’Université Gaston Berger de Saint-Louis, à Sanar, a accueilli au milieu des années 90 Maguèye et Ousmane. L’UGB était considérée pendant cette période comme une université d’excellence qui accueillait les meilleurs élèves de terminale et ceux qui ont eu de bons résultats au baccalauréat. On peut supposer que les deux portraits présentés ici ont été excellents en terminale avec de bons résultats. Si Ousmane était à l’UFR Sciences juridiques, Maguèye était à l’UFR Lettres et sciences humaines, à la section Géographie. A la sortie de l’université, bien qu’ayant fait des filières différentes, nos portraits ont travaillé dans des domaines identiques. Ousmane était à l’Institut des Sciences de l’Environnement (ISE), là où Maguèye partait encadrer les collectivités locales dans leur administration et dans la conception de leur plan de développement avec une forte dimension environnementale.
4. L’École Nationale d’Administration (ENA) deux majors
Bien que nos deux portraits soient entrés à l’École Nationale d’Administration en des périodes différentes, chacun des deux a été le major de sa promotion au concours d’entrée à la prestigieuse école. Si la plupart des candidats entrés major au concours de l’ENA choisissent de s’engager pour la section Douane, nos deux Khombolois ont préféré s’engager pour la section Impôts et domaines pour des raisons peut être différentes. Ils ont donc été formés pendant deux ans dans cette section pour sortir en tant qu’inspecteur des impôts et des domaines.
5. Une bonne maîtrise technique
Nos inspecteurs des impôts et des domaines sont réputés comme étant de très bons techniciens en matière de fiscalité, selon l’avis de certains collègues et collaborateurs qui ont travaillé avec eux à la DGID. Mieux encore, même si des personnes interrogées préfèrent garder le silence sur certains points, des témoignages s’accordent sur un trait commun : l’éthique dans la gestion des dossiers. Selon certains agents rencontrés Ousmane SONKO et Maguèye BOYE, en dehors d’avoir une bonne maîtrise de leur travail, font partie des inspecteurs des impôts les plus vertueux qui exercent leur profession sans concession aux pratiques corruptives.
B. Cinq dissemblances majeures
Au plan politique, les deux faisaient partie du groupe de réflexion qui devait mettre en place le parti politique PASTEF, en 2013. C’est à partir de ce moment que les différences commencent à se faire sentir, se traduisant par des divergences dans les modes d’intervention et les formes d’engagement politique. Sur plusieurs points, on peut remarquer bien des dissemblances.
1. Discrétion professionnelle et liberté d’expression
Ayant suivi les deux hommes depuis un certain temps, leur différence fondamentale réside dans le respect des normes déontologiques et professionnelles. Si Ousmane SONKO s’est permis souvent une grande liberté dans les thèmes ayant trait à sa profession, Maguèye BOYE lui, se garde dans ses interventions à connotation politique d’aborder les questions se rapportant à la politique fiscale, domaniale ou autres questions relevant de l’autorité de la Direction générale des impôts et des domaines. Nous avons plusieurs fois demandé à Maguèye BOYE de se prononcer sur ce genre de questions, mais il nous renvoie toujours au bureau de communication de la DGID.
2. Entre syndicalisme et développement local, un mode d’intervention politique différent
Ousmane SONKO a opté pour un mode d’intervention politique au niveau national ayant comme porte d’entrée le syndicalisme tandis que Maguèye BOYE a préféré le développement local comme mode d’intervention dans le champ politique commençant ainsi au niveau local dans sa commune.
SONKO a créé ainsi le Syndicat autonome des Agents des Impôts et Domaines (SAID). Ainsi, c’est le mode d’intervention du syndicat qui commençait à avoir des orientations politiques de l’avis de certains agents de la DGID. Ceci constitue un point de divergence entre les deux. A partir de ce moment, Maguèye BOYE a commencé à s’opposer aux décisions et positions du syndicat dirigé par Oumane SONKO et ses proches. De l’avis de certains inspecteurs, le refus de Maguèye BOYE de suivre le mot d’ordre de grève lui a même valu, de la part des proches de SONKO, le retrait illégal de son nom de la liste des attributaires de terrains auquel il avait pourtant bel et bien droit.
En outre, si SONKO a préféré entrer en politique par agissement syndical, BOYE a pris l’option de mener des activités de développement local pour matérialiser son engagement politique. Interrogé sur son choix, Maguèye BOYE n’a pas fait mystère son admiration pour le Président DIA concernant l’autonomisation des communautés locales (endogènes), leur évolution par cercles concentriques et enfin leur épanouissement dans la communauté nationale. Cette option s’éloigne de l’esprit corporatisme propre aux syndicats. Ce choix est corroboré par les témoignages de membres du bureau du SAID.
Il se dégage l’opinion que le mode opératoire en politique reste le point de séparation entre les deux hommes, chacun mesurant certainement ses forces et faiblesses dans les approches qui les diffèrent. Maguèye BOYE, n’étant pas toujours à l’aise dans l’activisme syndical, a préféré prendre ses distances tandis que Ousmane SONKO ne nous a pas présenté d’état de service dans le développement local. Du moins, pas encore dans la commune de Khombole.
3. L’élection présidentielle de 2019 révélatrice d’une opposition de styles
Si Ousmane incarne l’opposition radicale au régime du Président Macky SALL, Maguèye BOYE, en toute liberté, a pris position en faveur du candidat sortant, tant au niveau local, Khombole et le département de Thiès, que national.
A cet égard, Maguèye a essuyé les attaques des partisans de SONKO même, s’il faut l’admettre, elles étaient moins virulentes que celles servies aux membres du régime ou aux autres soutiens du Président SALL. L’on ne saurait donner une explication à cette tempérance envers Maguèye.
4. L’orientation du PASTEF une autre différence
Maguèye BOYE au même titre que Ousmane SONKO faisaient partie, en octobre 2013, d’un groupe de réflexion pour le mise en place d’un parti politique qui prendra plus tard le nom de PASTEF-Les Patriotes. Si SONKO est resté pour en devenir le Président, Maguèye BOYE a décliné en 2014 la poursuite de l’aventure avec PASTEF, à l’instar d’autres amis, au prétexte que l’orientation donnée au parti n’était pas conforme à sa vision de la conquête et de l’exercice du pouvoir. En cause : l’activisme politique à travers la presse, des révélations tous azimuts, l’absence de stratégie nationale de maillage du territoire national par la conquête et le contrôle des conseils locaux, etc. Fidèle à cette vision lointaine et progressiste –le local d’abord, le national ensuite, Maguèye BOYE mène une course assumée pour la mairie de Khombole.
5. Une priorité présidentielle devant une concentration locale
Il est clair que les deux hommes partagent autant de points de congervence simple que de divergence profonde sur fond de priorisation du local (« Maguèye-la mairie-d’abord ») et du national (« Ousmane-le palais-d’abord ») dans la conquête et l’exercice du pouvoir politique. Il faut cependant continuer de bien entretenir les points de rencontre des deux hommes politiques, parents de surcroît. A la mairie de Khombole ou au palais de la République ?
Abdoulaye GUEYE