Dakarmidi- La vieille dame Aïta Diagne avait sollicité un prêt de deux millions auprès de la mutuelle d’épargne et de crédit Afepes dont elle est membre, mais elle a découvert plus tard que son titre foncier a servi de caution pour mobiliser un prêt de 100 millions destiné à ladite mutuelle. Un subterfuge de la présidente de la mutuelle, en l’occurrence Oulimata Dioum, condamnée en première instance à six mois avec sursis pour escroquerie et à payer 70 millions à la plaignante à titre de dommages et intérêts. Une décision qui vient d’être infirmée, contre toute attente, en appel. Ce, en dépit de la demande de renvoi sollicitée par le conseil de la partie civile, pour des raisons de maladie.
Au crépuscule de sa vie, la vieille dame Aïta Diagne, 81 ans, espérait obtenir gain de cause, après un long feuilleton judiciaire qui l’opposait à la présidente de la Mutuelle d’épargne et de crédit de l’Association des femmes pour la promotion de l’entreprise au Sénégal (Mec-Afepes), Oulimata Dioum. D’autant plus que la décision d’instance, rendue le 27 juillet 2017, par la première chambre du tribunal correctionnel présidée par Maguette Diop, l’avait rétablie dans ses droits, en condamnant la prévenue, Oulimata Dioum en l’occurrence, dans un jugement par défaut, à six mois avec sursis et à payer à la plaignante 70 millions à titre de dommages et intérêts. Malheureusement, pour la vieille dame, cette décision vient d’être infirmée par la Cour d’appel, le 11 mars dernier. Une décision surprenante, que la sexagénaire n’arrive pas à comprendre. Aussi, a-t-elle décidé de se pourvoir en cassation, par l’intermédiaire de son avocat, en vue d’obtenir gain de cause.
Comment la dame de 81 ans a été abusée
En attendant, cette bataille suprême, «Les Échos» vous plonge dans cette affaire d’escroquerie, dont la principale mise en cause est accusée d’avoir fait main basse sur le titre foncier d’un membre de sa mutuelle. En effet, Aïta Diagne, commerçante et membre de la Mutuelle d’épargne et de crédit Afepes, avait sollicité un prêt de deux millions pour les travaux d’extension de sa maison, sise à la Médina, rue 25×30. C’est ainsi qu’elle s’est présentée à la présidente Oulimata Dioum avec son titre foncier. Seulement, à peine a-t-elle remis le document à la dame que celle-ci a quitté la salle. La présidente a ainsi gardé le titre foncier par-devers elle, avant de mettre en rapport la propriétaire du TF avec son adjointe Marième Diouf, aux fins de l’obtention du prêt. Lasse d’attendre, Aïta Diagne avait réclamé la restitution de son titre foncier. C’est à la suite de ce coup de colère qu’elle sera convoquée par Marième Diouf, à l’étude du notaire Boubacar Seck, pour finaliser le prêt. Analphabète et illettrée, elle avait signé sans arrière-pensée tous les documents du notaire. Cependant, devant empocher l’argent du prêt le 26 décembre 2005, la vieille dame n’a jusqu’à présent pas vu la couleur de cet argent.
Pis, après plusieurs démarches, elle finit par découvrir – à sa grande surprise – que son titre foncier 2175/DG a été subtilisé par Oulimata Dioum et avait servi de caution à la mutuelle d’épargne et de crédit de l’Afepes pour l’obtention d’un crédit de 100 millions auprès de l’Agetip. Elle découvre dans la foulée que l’acte qu’elle avait signé devant le notaire est un acte de cautionnement hypothécaire pour garantir le prêt de la mutuelle et non un acte de prêt qui lui est fait. Son sang ne fit qu’un tour, mais elle n’était pas encore au bout de ses peines. En effet, faute de paiement, l’Agetip avait trainé la propriétaire du TF et la mutuelle en justice. Une procédure à l’insu de Aïta Diagne, qui a été condamnée par défaut et à payer solidairement avec la mutuelle 115,9 millions à l’Agetip à titre de dommages et intérêts, le 3 septembre 2008. En sus, l’hypothèque provisoire sur son titre foncier a été transformée en hypothèque définitive. C’est à la suite de cette décision que la commerçante a, à son tour, déposé plainte contre la présidente de la mutuelle, Oulimata Dioum. La mise en cause a ainsi été auditionnée au courant de l’année 2009 par le juge d’instruction Mahawa Sémou Diouf. La prévenue considérée, à tort ou à raison, comme une femme influente, ce dossier a souffert dans les tiroirs avant d’être plaidé, huit ans plus tard, suite à l’entregent du juge Maguette Diop. De son côté, Oulimata Dioum a toujours contesté les faits et livré sa part de responsabilité dans cette affaire. C’est la mutuelle qui avait sollicité un prêt, narre-t-elle, avant de révéler que la dame Aïta Diagne, membre de la mutuelle, avait offert de cautionner son titre foncier pour garantir le prêt. Un prêt de cent millions destiné à payer les tickets et les frais de voyage des pèlerins membres de l’association. Seulement, ce prêt devait être recouvré avant le prochain pèlerinage. Mais, à cause des mauvais débiteurs, la dame n’a pu récupérer son TF.
Ce qui est troublant dans cette affaire, c’est la précipitation avec laquelle elle a été évoquée devant la Cour d’appel. Ce, en l’absence du conseil de la plaignante. La robe noire, alitée, avait pourtant adressé une correspondance au juge d’appel pour solliciter le renvoi de cette affaire à au moins un mois, le temps qu’elle soit en mesure de plaider. Mais, cette juridiction est passée outre. Mieux, lorsqu’il s’est agi de rendre le délibéré, l’avocat a encore sollicité le rabat du délibéré pour qu’il puisse plaider. Une fois de plus, sa demande est tombée dans l’oreille d’un sourd. Toutefois, avec le pourvoi devant la Cour suprême, cette affaire est loin de connaitre son épilogue.
Avec les Echos