S’il y a des musiciens africains que l’on adore grâce à leur musique douce et violente comme la vie, Baaba Maal est installé royalement dans les premières loges. Il y a un peu plus d’une quarantaine d’années, nous découvrions ce génie en herbe grâce à feu Samba Thiam qui était animateur à Radio Sénégal. La voix de rossignol de ce prodige de la musique Halpoular, insinuait dans tous les cœurs une forte sensation mêlée de bonheur ineffable. Tous les animateurs de l’époque, se faisaient le plaisir de passer les enregistrements de ce garçon avec souvent des commentaires dithyrambiques imposés par la volupté de cette voix juvénile.
En 1981, dans mon émission nocturne qui passait à la télévision nationale, j’invitais Baaba Maal. Avec son orchestre de fortune composé de Mbassou Niang et Ndongo Mbaye etc…, il interprétait des aires qui surgissaient des abyssales du royaume des torodos. Ce soir-là, l’artiste s’était surpassé, se donnant à merveille comme pour prouver que la valeur n’attend point le nombre des années. Baaba Maal a une voix capable de se muer en plusieurs variations plus des sonorités qu’elle distille à volonté. Quand Baaba Maal chante, ses veines se gonflent, son teint devient plus noir et sa guitare tremble entre ses mains nerveuses. Pour s’apprivoiser, il entamait « Tara », l’hymne du Foutanké Oumar Foutyou Taal, cet homme de Dieu disparu miraculeusement dans les falaises de Bandiagara au Mali le vendredi 12 février 1864, après la prière de Jummah. Depuis ces instants où il bouscula la télévision, je concluais avec certitude qu’il deviendrait un jour, une star mondiale de la musique. Ma certitude s’est confirmée avec les nombreuses distinctions qui l’ont honoré à l’échelle mondiale. Viscéralement sénégalais et profondément ancré dans les valeurs halpoular, il a eu tous les honneurs dont un musicien peut prétendre.
Son trente-huitième anniversaire organisé samedi 7 octobre 2023 au Grand Théâtre Doudou Ndiaye Coumba Rose, a connu un succès au-delà de toutes les espérances. C’est parce que l’hôte de ces lieux, avec sa dimension planétaire, sa gentillesse sans tâche et son amour profond pour son pays, en sont véritablement la cause.
Il n’a jamais varié dans ses sentiments pour le Sénégal, pays d’honneur et d’hospitalité, carrefour de rencontre et de germination des plus belles fraternités. Il a toujours chanté le Fouta, son terroir d’appartenance qu’il aime d’un amour ardent. Il fait partie des meilleurs fils de ce pays qui lui a tout donné mais, tout compte fait, il le lui rend bien. C’est cela qu’on appelle reconnaissance, fidélité et loyauté .
Dans ce Sénégal qui chemine assurément et sûrement, à l’instar du prophète Moïse conduisant son peuple vers les terres promises, Baaba Maal vivra toujours de sa belle voix, douce, immuable et inaltérable comme ce beau soleil qui inonde chaque jour, le bel univers sénégalais. Baaba est l’image de cette ravissante adolescente qui, dans l’incendie de l’aube gravitant le Sénégal, chante pleine d’espoir, le jour nouveau qui s’annonce.
Homme d’honneur ouvert aux alizés des vents fécondants, il prône sans répit, le dialogue, la paix et la cohésion sociale qui sont les adjuvants d’un développement économique durable.
Majib Sène