La question de l’autonomie et de la souveraineté économiques de nos pays est un débat qu’il nous faut aborder avec raison et avec lucidité. Dès lors que nous partons du constat fondamental que le fameux compte d’opérations logé à Paris garantit la stabilité de notre monnaie, nous ne sommes plus en mesure de revendiquer une souveraineté économique quelconque, qui nous épargnerait de nous ouvrir aux partenaires stratégiques choisis parmi les pays avec lesquels nous entretenons des relations diplomatiques privilégiés.
En effet, la puissance d’une économie se définit par celle de sa monnaie dont la crédibilité forge le leadership, et lui permet d’occuper une place dominante sur l’échiquier économique mondial, où nous sommes parmi la dernière catégorie de menu fretin.
Nos états en Afrique ont beau avoir les meilleures stratégies possibles et connaitre sur le bout des doigts les enjeux liés au défi de leur émergence, nous états ont beau mener une politique rigoureuse et hardie de conquête de nouvelles parts de marchés de leurs produits phares sur l’international, nous n’avons pas encore les moyens de voler de nos propres ailes dans un environnement économique mondial si concurrentiel que même l’ensemble du continent africain peine à exister. Moins d’1 % du commerce mondial intéresse l’Afrique entière en effet.
Il y a quelques dizaines d’années d’ailleurs, le réseau téléphonique de la seule ville de Tokyo était plus étendu que celui de l’Afrique toute entière !
Dans un tel contexte, il nous faut certes être fiers de ce que notre pays a accompli en terme de bons qualitatifs pour atteindre l’émergence, depuis l’expérience douloureuse des plans d’ajustements structurels jusqu’ à la première alternance survenue dans la période de l’embellie économique, mais nous ne pouvons perdre de vue que les besoins énormes de notre pays en termes de financements pour son développement ne pourront être couverts immédiatement, d’autant plus que la création interne de richesses est insuffisante pour porter une croissance tendue qui se traduirait par une relance de l’autofinancement de notre économie, et l’augmentation, consécutivement, du niveau de vie des populations.
Notre économie est tirée par un secteur primaire encore fortement dépendant des pluies, et elle est portée par un secteur tertiaire entièrement sous contrôle de partenaires stratégiques qui disposent de moyens considérables hors de portée de nos capitaines d’industrie qui peinent à animer un secteur secondaire qui n’existe que symboliquement, l’essentiel de sa sphère d’activités étant la transformation de produits alimentaires pour la plupart importés.
Tant que la valorisation de nos richesses extractives dans un tel contexte ne pourra être portée par les acteurs nationaux, du fait de l’inexistence de mécanismes de financement internes, nous ne pourrons nous passer de l’expertise extérieure et donc de partenaires techniques et financiers étrangers.
Dans un tel cadre, il convient de reconnaitre, même si cela est souvent sujet à polémiques que l’une des meilleures approches en matière d’impulsion du développement économique et social de nos pays pauvres demeure le partenariat public-privé, dès lors qu’il garantit un traitement équitable entre les différents acteurs et prend en compte les intérêts hautement stratégiques de notre pays pour ce qui nous concerne.
Il convient d’insister sur les PPP sachant que dans un tel contexte les investissements réalisés impactent directement la vie des populations cibles, et cela ménage la souveraineté de nos états, qui peuvent en effet mobiliser par la valorisation de ces infrastructures les ressources nécessaires à leur remboursement, dans des conditions plus souples et moins contraignantes aussi.
Avoir les ressources minières, gazières etc. est un fait. Avoir la technologie pour les extraire en est une autre. Avoir les moyens de les valoriser et de les exporter aussi est important.
Il y a toute une chaine de valeur qui se développe autour des ressources naturelles dont nous disposons que nous ne pouvons pas intégrer pour le moment.
Nous n’avons ni les capitaux ni la technologie pour cela.
De fait, le Sénégal est dans l’obligation de rechercher sur l’échiquier économique mondial les partenaires stratégiques les plus intéressants pour la valorisation de son potentiel économique, tout en intégrant dans la démarche les considérations politiques et géostratégiques qui commandent avec lucidité le choix des uns et non des autres, dans un contexte où les états n’ont que des intérêts et où aussi les grandes entreprises internationales agissent comme des requins qui dévorent, pillent et exploitent sans états d’âme toute vache à lait potentiellement mal protégée.
L’une des seules alternatives qui s’offre à notre pays pour parvenir à améliorer durablement les conditions de vie de nos concitoyens est une politique toujours plus responsable de gestion budgétaire, pour réaliser dans ce domaine encore plus de performances, un encadrement accru du secteur primaire, et une plus grande présence de l’Etat aux côtés de nos capitaines d’industrie, pour les aider davantage à prendre en charge, en collaboration avec les acteurs du système financier national et régional les besoins en termes de réalisations d’infrastructures à fort impact social et la mise en place d’un tissu industriel compétitif, de nature à tirer la croissance nationale.
Il s’agira pour ce de ne nullement négliger les acteurs intermédiaires qui sont fortement pourvoyeurs de main d’œuvre et qui sont porteurs d’une croissance endogène qui se traduit immédiatement par une augmentation de la consommation locale et donc une meilleure répartition de la richesse tirée de la valorisation de nos ressources locales : les PME et les PMI.
La question qu’il convient de se poser est donc de savoir si le PSE atteindra cet objectif.
A mon avis, oui !
Cissé Kane NDAO
Président A.DE.R
Diplômé de Sciences PO
Executive MBA Management Public Territorial
Master 2 Professionnel Gestion de projet, Gestion axée sur les résultats, Pilotage du changement