Jean Pierre Adams, qui a formé avec le Martiniquais Marius Trésor la charnière centrale des Bleus (1972-76) appelée aussi « la garde noire », venait de fêter une semaine auparavant ses 34 ans et débutait sa retraite.
« C’était un mercredi, le jour des enfants. Laurent, l’aîné, était au foot. Frédéric, le plus jeune, était avec moi au magasin de sport que nous avions à Chalon », raconte Bernadette, son épouse, dans un entretien avec des médias français, assurant se souvenir de ce jour funeste « chaque instant, comme si c’était hier ».
Son mari l’avait appelée la veille pour la rassurer que tout allait bien, un énième appel, « le cinquième de la journée », le lendemain, va bouleverser sa vie.
« Madame Adams, il est arrivé quelque chose de grave. Il faut que vous veniez », lui a-t-on dit au téléphone depuis l’hôpital, sans lui spécifier la nature de cet accident qui depuis maintient depuis lors son mari dans un état végétatif.
Un appel qui a bouleversé la vie de ce désormais septuagénaire, qui n’a jamais cessé de s’occuper de son homme. « Oui, je suis toujours à cran. Mes enfants n’ont pas eu la vie qu’ils auraient dû avoir », dit-elle.
Les enfants « (…) disent que j’ai été une sainte. J’avais sans doute un prénom prédestin », ajoute-t-elle en allusion à la religieuse française Marie-Bernadette Soubirous, canonisée en 1933.
Plus connue sous le diminutif Bernadette, cette religieuse née le 7 janvier 1844 à Lourdes, et morte le 16 avril 1879 à Nevers -, a affirmé être témoin de dix-huit apparitions mariales à la grotte de Massabielle entre le 11 février et le 16 juillet 1858.
Bref, depuis l’accident de son époux, Bernadette Adams est toujours restée seule ou presque, et ne reçoit par exemple plus la visite des anciens coéquipiers de Jean-Pierre.
« Ce n’est pas de l’oubli. Beaucoup parlent de lui dans les journaux quand ils en ont l’occasion. Je sais que Marius Trésor n’est pas capable de le voir dans cet état », affirme-t-elle au sujet de l’ancien arrière central de Bordeaux, actuellement encadreur au sein de l’académie du club français.
Sur les détails de sa « deuxième vie entièrement dédiée » à l’accompagnement de son époux dans le coma, elle rappelle qu’après l’accident, Jean-Pierre Adams est resté un an dans un centre de rééducation avant qu’elle ne prenne la décision de l’installer auprès d’elle.
Si elle s’accorde une « semaine par an seulement, le temps d’aller en Corse fêter l’anniversaire d’un de ses trois petits-enfants », elle n’a du temps que pour son mari.
Le reste du temps, elle est à la maison, aidée dans sa tâche, cinq jours sur sept, par une aide-soignante et un kiné. Le week-end, elle fait tout toute seule.
« Le matin, détaille-t-elle, il reste dans son lit où je lui donne son petit-déjeuner. On lui fait sa toilette, je le coiffe, le rase et l’habille. A midi, on le met au fauteuil avec le kiné. Je lui donne à manger, des légumes notamment que je mixe et cuisine. Le kiné revient en début d’après-midi pour une séance d’exercices et on le recouche. Le soir, je lui donne son dîner ».
Bernadette se dit convaincue que Jean Pierre Adams ne la voit pas mais l’entend. « Il sursaute d’ailleurs au moindre bruit. Son visage change parfois en fonction de son humeur. Il est sensible aux odeurs, comme celle de mon parfum », dit-elle.
Pas une seule fois, elle n’a envisagé se séparer de son époux ou encore moins « d’abréger ses souffrances », comme le recommandent certains médecins.
« Le faire mourir consisterait à le priver de nourriture. Il n’est branché à rien. Quelle souffrance voudriez-vous abréger », lance-t-elle.
Jean-Pierre Adams a quitté Dakar sa ville natale à l’âge de 8 ans pour Montargis (France), une commune française située dans le département du Loiret, où il a été confié à une école religieuse.
Des parents adoptifs ont permis à l’ancien arrière droit des Bleus d’échapper à l’assistance publique. Le football a fait le reste.
Marié à Bernadette en 1969, il fait ses débuts à l’Entente Fontainebleau, un club amateur à l’époque. Il signe ensuite à Nîmes en 1970, club qu’il va conduire à la place de 2-ème du championnat de France.
Jean Pierre Adams va intégrer l’équipe de France par la même occasion en constituant avec Marius Trésor, la redoutable « garde noire » tant admirée sur les terrains européens.