Dakarmidi – Le 5 mars 2017, j’ai pris un transport en commun, communément appelé au Sénégal « car rapide » pour me rendre dans une mairie, afin de m’inscrire pour l’obtention d’une carte d’identité biométrique. Les inscriptions relevant d’un parcours du combattant, il fallait que je me sacrifie en charcutant ne serait-ce qu’une nuit pour espérer être servi parmi les premiers. Il faisait exactement 4h 5minutes quand je montais dans le « car rapide ». À ma grande surprise, j’étais le seul de sexe masculin à bord. Il n’y avait que des femmes. Les unes avaient des bassines sous les pieds, les autres des paniers vides.
Face au froid matinal qui régnait en cette période de fraicheur, des pagnes qui résistaient à peine au vent leur servaient de couvertures. Arrivée à hauteur du marché Castor, elles descendirent toutes du véhicule. C’est là que j’ai compris qu’il s’agissait de commerçantes qui allaient à la recherche de marchandises. Pour mon cas, j’ai été spécialement matinale ce jour, juste pour une cause bien précise, alors que pour ces braves dames, braver le froid de l’aube est une routine.
Le lendemain, 6 mars 2017, quand je me suis réveillé, je n’étais pas du tout en forme. Alors, puisque mon ami sportif m’avait conseillé de faire du sport à chaque fois que je ne respirais pas la forme, je me suis mis en tenue de sport et je suis sorti courir le long de la plage de Diamalaye. Il faisait 6h du matin et les seules personnes que je croisais étaient encore des femmes, qui venaient du quai de pêche de Yoff, portant chacune sur la tête une bassine remplie de poissons. Je me dis qu’il s’agissait certainement de revendeuses de poissons. Dieu seul sait à quelle heure elles se sont pointées sur ce quai de pêche, afin de pouvoir être déjà de retour à 6h du matin.
De retour à la maison, vers 7h30, je croise mon voisin avec son bébé qui pleurait à chaudes larmes sur lui. Mais que se passe-t-il ? lui demandai-je.
« Je dormais tranquillement et les cris du bébé m’ont réveillé. Quand j’ai demandé après sa mère, on m’a dit qu’elle est au robinet. Là je lui amène le bébé, pour pouvoir revenir et récupérer tranquillement » répondit-il.
Le 7 mars, on me rappelle que la journée de la Femme sera célébrée le 8 mars.
Mon Dieu ! De quelle femme parle-t-on ?
Celles que j’ai croisées sur la route du marché Castor à 4h du matin ?
Celles que j’ai croisées sur la plage à 6h du matin ?
Celles qui portent toutes seules leurs grossesses pendant 09 mois, accouchent seules et élèvent parfois toutes seules leurs enfants ?
Celles que je dépasse aux camps militaires en faction à des heures impossibles ?
Celles qui laissent époux et enfants à la maison toute une nuit pour aider des enfants à venir au monde ?
Celles qui arrivent dans les rédactions à 5h du matin pour ne rentrer que tard dans la soirée ?
Ou celles qui… pffffffff ? Non mais de quelle femme s’agit-il ? S’il vous plait.
Ho, quelle injustice envers ces braves femmes !
Une seule journée ?
Pas une décennie, ni un siècle ou même une vie entière, mais une seule journée ?
Oh mon Dieu ! Pardonne cette société, car elle ne sait pas ce qu’elle fait.
Pardon mon Dieu, pour avoir pensé qu’au lieu de toute une vie, seules 24h pourraient suffire pour rendre hommage aux femmes.
Toi femme, pardon de ne pas t’avoir accordé tout le mérite qui te revient.
Sans toi, rien n’est possible. C’est pourquoi moi je te chanterai jusqu’à la fin des temps.
Ousmane Kadior Cissé – dariss.net