Dakarmidi – La longue pause pluviométrique dans certaines régions du Sénégal met de nombreux paysans dans l’expectative. En bons croyants, certains travailleurs de la terre, comme au temps des prophètes, voient dans cet arrêt des giboulées une colère divine. Dieu se serait retiré des Sénégalais, tellement ils sont dans l’usage excessif et déréglé des plaisirs interdits. Très bien ! Brûlons donc les bars et les bistrots, les cinémas qui n’existent plus ; qu’on arrête l’ l’émission « Sen Petit Gallé » et les sabars nocturnes…pour le retour des averses, conformément aux recommandations de certains imams et marabouts. Mais il va falloir se crever la cervelle ensuite pour créer des emplois afin de caser nos pauvres compatriotes qui travaillent dans ces établissements. Et ce n’est pas fini ! Il faudra également dédommager nos courageux compatriotes qui ont investi leur argent dans le business de la vente des boisons alcoolisées.
Si celle-ci n’est pas bonne, une autre solution existe: arrêter le football et la lutte pour tenter d’amadouer le ciel d’ouvrir ses vannes. Pourquoi pas ? Mais qu’est ce qu’on va faire de Dakar Aréna, ce complexe sportif multifonctionnel de 15.000 places, récemment inauguré par le président de la République et dont les travaux ont englouti des milliards ? Youssou Ndour, lui aussi, devrait arrêter de chanter, si on suit la logique des sages de ce pays. Enfin bref…si nous pensons sincèrement que ce sont nos péchés qui sont à l’origine de la longue pause pluviométrique, retournons nous vers Dieu dés demain matin, à l’aube. Reconnaissons nos fautes et faisons l’aveu devant témoin. Prions pour que le tout Puissant puisse nous pardonner nos graves transgressions qui empêchent en ce moment même la pluie d’arroser nos terres sèches et les quelques pousses, encore à ras du sol implorant la miséricorde du Très-Haut. S’il ne tombe pas d’eau dans la saison des pluies, il y aura des calamités. Prions donc et vite ! Mais n’oublions pas qu’il y a un temps pour la prière et un temps pour l’action.
Reboiser tout le Kayor
Pour commencer dans l’action, nous devons nous poser la question de savoir pourquoi le sud du pays, contrairement au centre et au nord, est bien arrosé. Ha oui, les Sénégalais de la Casamance qui considèrent le Coran comme un verbatim écrit de Dieu, révélé au travers du très vénéré prophète Mouhammed (PSL) sont plus proches de la Providence que nous les « Ceddo » de Thiès et Diourbel, probablement. Si c’est bien cela, pourquoi pleut-t-il des cordes en Côte d’Ivoire et en Guinée alors que ça picole dans ces pays ? Ne me dites surtout pas que nos frères ivoiriens et guinéens sont tous des saints. Le problème ne se situe pas à ce niveau. Il se trouve ailleurs.
On n’a pas besoin d’être géographe pour savoir que la région la plus boisée du Sénégal se trouve en Casamance. D’ailleurs, c’est la raison pour laquelle cette partie du pays enregistre chaque année de fortes précipitations, contrairement au centre du pays, là où les ressources forestières ont quasiment disparu. Qu’-est-ce qu’on attend pour reboiser tout le Kayor? Les sceptiques me diront que la mise en place de plans d’aménagements et de gestion des forêts n’est pas la meilleure solution par ce que celle-ci prend trop de temps avant d’être effective. Soit ! Mais en attendant, cultivons la graine d’un nouveau mode de production agricole mieux adopté aux faibles précipitations, de nouvelles pratiques agricoles moins dépendantes de la clémence du ciel. Somme toute, l’agriculture sénégalaise, essentiellement pluviale et saisonnière, doit obligatoirement faire sa mue ou mourir. Concrètement, il s’agira de faire une sélection de variétés cultivables là où il y a fréquemment des retards de pluie et, avec les prières de nos hommes saints, Insha Allah, nous aurons de meilleurs rendements.
Khadim MBAYE, Journaliste sénégalais à Casablanca
La rédaction