Dakarmidi – « Pourquoi ils ont déserté l’espace public pour le laisser à des sophistes de la modernité ? » Ainsi, se demande Pape Sadio Thiam sur sa page Facebook. Et il cite ces grands noms, ces grands débatteurs, ces grands intellectuels qui firent les débats et interventions de haut style dans la presse sénégalaise des années 80 et 90. Thiam cite, sans prétendre être exhaustif, les Abdou Salam Fall, Makhtar Diouf, Kader Boye, Dieydi Sy, Ousseynou Kane, Fallou Ndiaye, Jacques Mariel Nzouankeu, Moussa Samb, Maguèye Kassé, Pathé Diagne, Mame Moussé Diagne, Buuba Jop, Maguette Thiam.
« Il faut absolument, plaide Thiam, faire revenir tous ces universitaires et les vrais intellectuels qui ont préféré laisser le terrain médiatique à des ‘’intermittents du spectacle politique ou intellectuel’’, de peur d’être stigmatisés, puisqu’on est dans un contexte où certains journalistes, par des procédés peu catholiques, somment souvent leurs invités à déterminer leur camp.‘’ On sent dans le plaidoyer du journaliste une légitime nostalgie attisée par ces interlocuteurs et sources que l’actuelle presse fait intervenir avec une fréquence qui n’est pas sans rappeler cette corde dont on use et qu’on use.
Comment se fait-il que tel personnage ait été invité autant de fois à telle émission de la Radio futurs médias, comme s’il était le seul à pouvoir dire quelque chose de pertinent et d’intéressant dans ce Sénégal ? La lassitude de Thiam se comprend et ne s’apprécie que dans une comparaison entre ce qui fut naguère et ce qu’il y a aujourd’hui. Certes, il y a des interlocuteurs très intéressants, mais il y en a d’autres dont on ne retient rien à la fin de l’intervention ou pourquoi le journaliste a choisi d’interviewer un personnage aussi peu consistant. Tout cela pour dire qu’il y a de ces individus qui ne méritent pas d’être invités à répétition.
Bien sûr, être nostalgique des interlocuteurs de jadis ne va nullement à contre-courant de l’invite lancée aux jeunes journalistes par le doyen Mademba Ndiaye, pour ainsi dire, renouveler les carnets d’adresse et interroger de nouveaux interlocuteurs qui peuvent être aussi pertinents que ceux fort courus par la presse dans les années 80 et 90. C’était lors d’un de ces « Cas d’école » que tient le Conseil pour l’observation des règles d’éthique et de déontologie dans les médias (Cored). Ce renouvellement peut dépendre de circonstances, de la perspicacité du journaliste, de son inspiration, de son carnet d’adresses et de sa capacité à persuader de parler ceux-là qui sont réticents à le faire.
Oui, il y a de ces interlocuteurs qui peuvent être très intéressants, mais très méfiants vis-à-vis de la presse. Le tact professionnel du journaliste peut aider ce dernier à vaincre les réticences de celui qui a quelque chose d’intéressant à dire, mais voudrait être rassuré par le professionnalisme qui sera mis en œuvre pour mettre en valeur les informations qu’il aura à communiquer ou les questions qui lui seraient posées. Nous avons souvenance du refus de telle personnalité à être l’invitée d’une émission que, entre-temps, l’animateur – talentueux journaliste – pour des raisons indépendantes à sa volonté confia à un tiers confrère. L’invité préférait être interrogé par le titulaire de l’émission plutôt que par un intérimaire qu’il estimait ne pas faire le poids. Ça arrive !
Post-scriptum : Juste pour partager deux boutades véridiques lues ces jours-ci sur Facebook. La première est de l’intellectuel Lat Soucabé Mbow qui dit que « l’alchimiste cherche à faire du plomb de l’or et l’auteur de fake news à faire prendre des vessies pour des lanternes ». Et d’un autre côté, sur sa propre page, le journaliste Habib Demba Fall se gausse tout en attirant l’attention des journalistes sur le risque qu’il y a à vouloir « recycler une fausse information ». Je soupçonne que cette mise en garde s’adresse à ceux qui tentent de tartiner leur pain rédactionnel avec cette machine qui transformerait les eaux usées en breuvage potable. Une machine dont la rumeur dit qu’elle devrait entrer en service au Sénégal !
Attention au recyclage d’une fausse information !
La rédaction