Dakarmidi – En attendant les résultats officiels, contentons-nous d’analyser les résultats officieux, encore disponibles. En effet, le 30 juillet 2017, le Sénégal a connu des élections législatives controversées. La coalition au pouvoir, Bennoo Bokk Yaakaar rafle la majorité des sièges, en obtenant 125 députés sur les 165que comptera l’Assemblée nationale. Elle est suivie de la coalition gagnante Wattu Senegaal (19 sièges), puis de la coalition Mankoo Taxawu Senegaal (07 sièges),vient en 4 ème position, le PUR( Parti pour l’Unité et le Rassemblement) qui a obtenu quelque 03 députés et en 5 ème position ; Kaddu Askanwi d’Abdoulaye Baldé qui a remporté deux sièges, dont celui du département de Kédougou, enlevé de haute lutte par l’ancien Ministre et patron de l’IAM, Moustapha Mamba Guirassy. Les 09 autres partis et coalitions qui ont obtenu, chacun un député, ont bénéficié des largesses du législateur sénégalais, qui a voulu accorder quelques sièges aux perdants ayant obtenu le plus de voix parmi les derniers de la classe( le plus fort reste).
Les élections législatives du 30 juillet 2017 sont qualifiées par certains de mascarade, d’autres de farce ou de cirque, tellement, elles étaient entachées d’irrégularités qui sont aux antipodes de la démocratie et de la transparence.
Un processus bloqué depuis que le gouvernement de M. Macky Sall a opté pour la confection de nouvelles cartes d’identité et d’électeur, dénommées : cartes d’identité incorporées de la Cedeao.
A l’arrivée, plus d’un million de Sénégalais, valablement inscrits sont laissés en rade. D’autres, munis de leurs cartes d’identité biométriques n’ont pu retrouver leurs bureaux de vote. Il y a aussi de nombreuses erreurs que la DAF attribue aux vacataires, recrutés pour la circonstance. Organisées en pleine saison de pluies, les élections législatives de 2017, ont démarré dans plusieurs centres de vote avec un retard de plusieurs heures, dû aux pluies de la veille qui se sont abattues dans la plupart des 14 régions que compte le pays, la diaspora non comprise.
Avant le jour du scrutin, le Sénégal a vécu trois semaines de campagne électorale, marquées par des violences physiques et verbales. Si la tête de liste de la Coalition gagnante, le Maestro Abdoulaye Wade a pu tirer son épingle du jeu, tant dans sa stratégie de communication que dans la manière dont il a maillé l’étendue du territoire national, en se rendant personnellement dans la plupart des localités où sa coalition avait des chances de gagner des sièges, il n’en est pas de même pour les autres têtes de liste, dont notamment Khalifa Ababacar Sall, qui n’a même pas pu se rendre dans son burreau de vote, le jour-J pour accomplir son devoir de citoyen, compte tenu de son statut de prisonnier à Reubeuss ! En revanche, la tête de liste de Bennoo Bokk Yaakar, Mouhammed Boune Abdallah Dione a , pour ce qui le concerne, mené une campagne correcte et pacifique, qui a permis également de couvrir une bonne partie du territoire national. Si, dans la forme, sa communication était bonne, il faut admettre que dans le fond, ce n’est pas le bilan du Président de la République qu’il fallait brandir dans une élection législative. Seulement, l’opposition n’a pu déceler ou en tout cas communiquer suffisamment sur ces failles qui auraient pu leur être fatales.
Beaucoup d’autres coalitions ont râté leur campagne, par paresse ou par manque d’expérience. C’est le cas notamment de la coalition « Joyyanti » d’Abdoul Mbaye dont la tête de liste s’est contenté de se pomener qelque part à Dakar età Saint-Louis, pour une opération de séduction à la hâte. Le jour du scrutin, rares sont les bureaux de vote, où l’on a pu noter la présence concomitante des représentants des 47 listes en compétition. Le record des irrégularités est incontestablement battu par la ville de Touba, où plus d’une centaine de bureaux n’ont pu fonctionner durant toute la journée du 30 juillet. Les saccages des urnes de l’Université Baye Lahad sont venus s’ajouter aux problèmes qui ont émaillé le vote dans la ville sainte. Par ailleurs, la publication des résultats du département de Dakar, par Bennoo Bokk Yaakaar, avant même que l’Autorité compétente ne la fasse, aura été, sans nul doute, une maladresse qui crédibilise la thèse des « ordres de mission » frauduleux , notés çà et là, dans quelques centres de vote de la capitale. En tout état de cause, ce scrutin pourrait servir de leçon à une opposition tâtillonne qui se cherche, comme à la coalition au pouvoir, qui ne s’adapte plus aux réalités du moment. Dans l’un comme dans l’autre camp, il va falloir opérer des réglages en profondeur.
C’est le lieu d’observer que les dérapages notés, ces derniers temps, dans les réseaux sociaux, ne sont pas sans rapport avec ce qui s’sest passé lors des élections législatives voire bien avant. Quelques jours, avant le démarrage de la campagne électorale, de jeunes élèves ont été envoyés en prison et vilipendés, pour avoir trriché lors des examens du baccalauréat, édition 2017. Quelques temps après, des adultes, accusés de fraudes lors des opérations électorales, n’ont nullement été inquiétés, mais se sont mêmes vus félicités et peut-être, promus, par leurs supérieurs ! Un tel paradoxe est susceptible de provoquer un état de choc et de révolte chez certains sujets, peu disposés à avaler les couleuvres de l’injustice . C’est ainsi que les dérapages d’Amy Collé Dieng voire d’Assane Diouf pourraient être analysés et compris sous un angle purement psychanalytique. Dans un Etat dit de droit, les évènements se tiennent et s’expliquent les uns par les autres. Toute infraction impunie, engendre une autre qui revendique, à tort ou à raison, le privilège d’impunité. Les Autorités de ce pays, de 1960 à nos jours, semblent ignorer-malheureusement- cette banale vérité psychanalytique.
Les félicitations que le du Chef de l’Etat aurait adressées au Ministre de l’Intérieur, Abdoulaye Daouda Diallo, alors que les différents contentieux électoraux n’étaient pas encore vidés, ne me semblent pas s’inscrire dans une logique de bonne gouvernance, d’autant que tous les citotyens qui n’ont pu voter, en imputent la responsabilité à « M. élections », qui n’est pas un ministre de l’Apr, mais plutôt un Ministre de la République, chargé, a priori, de satisfaire les citoyens sénégalais, de quelque bord politique qu’ils puissent appartenir, avant de chercher à satisfaire les désideratas d’un militant de son parti. C’est là où le slogan tant galvaudé : « la patrie avant le Parti » revêt tout son sens.
Il est temps de comprendre qu’aucun code pénal, ne peut discipliner les adeptes des réseaux sociaux à travers le monde. Seule une thérapie générale, dont les paradigmes curatifs seraient tirés de notre patrimoine culturel, pourrait sauver notre pays des dérapages et autres insultes cybercriminelles, qui ont eu raison des régimes les plus dictatoriaux du monde. Yahya Diamé, de la Gambie voisine, ne me démentira pas. Et puis, il importe de demander à nos gouvernants, si la promotion d’anciens « insulteurs publics » par les derniers régimes libéraux, n’est-elle pas, au fond, la goutte d’eau qui fait déborder le vase ?
M. Mamadou Bamba Ndiaye
Ancien Ministre Conseiller chargé de la Communication
de la Présidence de la République,
chargé des Affaires Religieuses