Dakarmidi – L’Islam est une religion de paix et d’amour par excellence; l’éthymologie même du mot vient de la racine: S.L.M , dont découle: Istislâm (soumission) et Salâm(paix), ce qui veut dire: soumission au Créateur et paix avec les créatures.
Le soufisme ou l’effort spirituel continu
Le Djihad (ou le grand Djihad) se définit comme étant l’effort spirituel continu pour acquérir les caractères nobles et se purifier. Ce combat contre l’âme charnelle (et contre Satan) doit être mené avec l’aide d’un maître spirituel vivant, qui connaît les vicissitudes de l’âme et les remèdes des cœurs. Le but est de parvenir à Sa connaissance: « Je n’ai crée les Djinns et les hommes que pour qu’ils M’adorent » (Coran,51 verset 56 ), l’adoration selon Ibn ‘Abbass (l’interprète du coran) est synonyme de la connaissance.
Le soufisme est de ce fait une méthode par laquelle le comportement du disciple se transforme et s’adoucit pour avoir une âme apaisée et des caractères nobles (divins) grâce à l’invocation et à l’accompagnement du maître accompli;
Ibn Abass, que Dieu les agrée tous deux (son père et lui ) rapporte : quelqu’un demanda : Ô Prophète, quelle est la meilleure personne auprès de laquelle on s’assoie ? Il dit : » Celui dont la vue vous rappelle Dieu, dont les paroles ajoutent à votre science et dont les actes vous rappellent l’au-delà ».
Le respect de la vie et l’amour sont les deux ailes du disciple dans le cheminement vers Dieu. En effet, l’être humain selon le saint coran est le souffle de Dieu : « Il lui donna sa forme parfaite et lui insuffla de Son esprit » (Coran, 32 verset 9). L’homme doit être ainsi l’objet de tout respect , considération et miséricorde sans distinction de race ou de religion.
L’Islam est venu pour unir les cœurs et faire régner la paix dans l’univers. «O hommes, Nous vous avons créés d’un mâle et d’une femelle, et nous avons fait de vous des nations et des tribus, pour que vous vous entre-connaissiez»(Coran,49, verset 13)
L’essentiel du message du bien aimé Prophète Sidna Mohammed (paix et bénédiction sur lui) réside dans la communication des valeurs humaines les plus nobles pour que l’être humain soit en harmonie et en paix avec lui même et avec l’univers. « J’ai été envoyé pour parfaire l’excellence du comportement » (parole du Prophète,Hadîth sahîh: rapporté par Al-bukhârî dans « Al-adab Al-mufrad » (273) et Ahmad Ibn Hanbal dans le Musnad (2/381). )
L’Amour notre Capital« L’amour le plus indispensable, le plus élevé et le plus sublime est l’amour de Celui pour qui les cœurs s’inclinent naturellement d’amour, que les créatures aspirent spontanément à adorer. Allah est adoré pour Lui même sous tous les rapports tandis qu’autrui n’est aimé qu’accessoirement par rapport à Son amour. En effet, Son amour est attesté par tous Ses livres révélés, par l’appel de tous Ses envoyés, par la disposition originelle et l’intelligence qu’Il a placé en Ses créatures, et par Ses Bienfaits en leur faveur. En fait, si les cœurs s’inclinent en général à aimer leur bienfaiteur, qu’en est-il de Celui qui est le Dispensateur suprême de toute faveur ?. Si les cœurs s’inclinent vers l’amour de toute chose belle qu’en est-il de Celui qui a créé la » beauté » ? » Al Ghazali
L’Amour au sens arabe du terme comprend onze étapes: allant de la relation (‘alâqa) jusqu’à l’amitié intime(Kholla: qui veut dire l’amour qui rend le cœur pur et dévoué à l’aimé ou le fait que le cœur ne soit infiltré ( lam yatakhallalhu) par aucune autre chose si ce n’est l’Aimé) en passant par l’amour passionnel(ou le désir), l’adoration, l’extinction de l’amant dans l’Aimé…On trouve ainsi selon le degré de l’attachement de l’amant à l’Aimé: Al ‘Alâqa (la relation) – Al hawâ (la passion amoureuse) – Al rharâm (l’amour qui incite à la reconnaissance comme s’il s’agissait d’un crédit : le désir ardent) – Al hobb (un amour qui pousse dans le cœur comme le grain dans la terre : la familiarité et la relation entre la terre et le grain fait allusion à cette station ) – Al ‘Ichq (l’amour qui rend l’amant ravi et éblouit ou la spire d’amour) – Al Sabâba ( l’amour qui coule « yata s abbabu » du cœur ou encore l’affection vive) – Al Sharhaf (l’amour qui s’est introduit au noyau du cœur « shighâf alqalb» ) – Al Widâd (l’attache et la liaison proche) – Al ttatayyum (le fait que l’aimé possède son amant jusqu’à la folie et la perte de conscience) – Al tta’abbud (l’adoration) – Al kholla (l’amour qui rend le cœur pur et dévoué à l’aimé ou le fait que le cœur ne soit infiltré « lam yatakhallalhu » par aucune autre chose si ce n’est l’Aimé) , cette dernière station est spécifique au prophète Abraham et au prophète Sidna Mohammad (paix et bénédiction sur lui et sur sa descendance).
Mais l’Amour dans toutes ses stations reste avant tout le fruit de la grâce divine et de l’invocation abondante du Seigneur en compagnie d’un maître spirituel réalisé. L’Amour se transmet du cœur d’un maître qui a déjà savouré les plaisirs de la proximité « al qurb », au cœur du disciple prédisposé à recevoir cette grâce. L’amour est le ciment par lequel le maître construit sa forteresse impénétrable aux ennemis (Satan et les passions): l’ensemble des disciples qui malgré leur nombre et leurs différences physiques, culturelles et raciales ne font qu’un seul cœur, celui du maître.
C’est pourquoi le Prophète compare dans ses enseignements les vrais croyants à la seule main ou au même corps qui souffre en entier si un de ses membres souffre.
Le prophète précise dans ses enseignements que tout acte pieux fait par le fidèle est limité dans le temps et l’espace et conditionné par l’intention sauf l’Amour qui est au-dessus même de la piété et permet au disciple de devenir entre deux battements de cœur parmi l’élite de l’élite en compagnie des prophètes dans les paradis les plus hauts. Le prophète (PSL) dit à un compagnon qui venait demander sa proximité au paradis alors qu’il savait que ses actes ne lui permettait pas une telle station : « l’homme est avec celui qu’il aime ». Autrement dit: » Si tu m’aimes, tu seras avec moi ».Et les compagnons ont dit : On a jamais été plus heureux que lorsqu’on pris connaissance de ce Hadîth.
L’histoire rapporte que les grands martyres de l’amour pur (shuhadâa almahabba alkhâlisa) se sont détachés d’abord du bas monde (la grande mort)avant d’être porté par leur désir de voir Leur Seigneur bien Aimé vers la petite mort : la mort physique car le cœur ne pouvait plus supporter l’éloignement….Voici la fille du Prophète (PSL) qui mourut peu après la mort de son père : elle s’était préparé en se lavant et en priant puis l’âme remonta vers Son Seigneur…Bilâl de même avait le cœur si sensible qu’il mourut aussi peu de temps après la mort de notre bien aimé prophète (PSL), et il dit : « demain on rencontrera les bien aimés Muhammad et ses compagnons »……
Notre maître Sidi Hamza dit à propos de l’amour:
– L’Amour est le diadème des œuvres.
– Je tiens à l’amour plus qu’à toute autre chose. Prions pour que Dieu ne nous le retire pas.
– L’amour entre les disciples et entre les fuqaras et le maître est infini, il grandit sans cesse. On voudrait ne jamais se séparer. Cet amour est dû au secret spirituel (sirr) et existe car nous ne sommes réunis que pour Dieu. Cet amour fait tomber toutes les différences culturelles.
– C’est l’amour qui met les coeurs à l’oeuvre, en mouvement, qui fait agir.
– L’amour est la monture des esprits , c’est à travers lui que l’on connaît toute chose.
– Quand l’amour habite le coeur, plus rien ne paraît difficile et on tire profit de tout ce qui nous arrive. Ceci provient du fait que, grâce à l’amour, le voile qui nous sépare de la Réalité devient de plus en plus ténu, on éprouve alors une joie profonde du fait de cette proximité et on est envahi par la perception de la beauté.
– Le défaut et la laideur ne sont pas dans les choses et les êtres, mais dans l’impureté de notre regard sur elles. Plus l’âme est apaisée, parfaite et pure, plus elle sera disposée à voir dans tout être une manifestation de la Lumière Divine : tout est beau, seul le coeur non poli du disciple rend les choses laides.
– C’est l’amour qui provoque une blessure, un cri. Ne crie que celui dont le maître est ivre.
– Lorsque Dieu aime son serviteur, il recouvre ses qualités de Ses Qualités. C’est comme si un roi nous invitait chez lui et que nous n’ayons pas de vêtements suffisamment propres et convenables pour nous rendre digne de sa demeure, le roi nous revêt alors de ses vêtements et nous introduit chez lui.
– Aimez toutes les créatures , quelles que soient leur religion, leur race ou leurs opinions ! Chacun est à la place où Dieu l’a mis et il ne nous appartient pas d’en juger.
– L’amour permet de voyager du temps des mortels vers le temps spirituel infini: c’est la bonne œuvre qui dure dans le temps et l’espace et est en réalité indépendante du temps et de l’espace. L’Amour rend les actes d’adorations et les pratiques spirituelles de tous les jours plus faciles et même de plus en plus apaisantes. Le fidèle souhaite être en permanence dans la proximité de son Seigneur par la prière, par l’invocation…Ce n’est plus des charges, mais une nourriture de l’esprit qui ouvre de plus en plus l’appétit à celui qui l’aborde. Le prophète, à chaque fois que l’heure de l’appel à la prière arrivait, demandait à Bilal d’appeler à la prière en lui disant: O Bilal repose-nous avec la prière! Et il disait aussi: « …L’éclat de mes yeux (mon grand bonheur) est dans la prière rituelle ».
– L’amour est pour ainsi dire les deux ailes du disciple qui le charge d’énergie et donne à son existence une valeur, une lumière qui éclaire son chemin pour parvenir à Son Amour: Car, en fait, l’essentiel ce n’est pas que tu L’aime mais qu’Il t’aime…
Mais ce qu’il faut savoir surtout est que l’Amour a des conditions et des signes: L’obéissance, la soumission inconditionnée au Seigneur, la servitude, la communication de la bonne parole, du bon comportement aux créatures qui sont « l’image de l’Aimé ». Celui qui aime, ne peut voir à travers ses yeux que la beauté de son Aimé qui se manifeste partout où il pose ses yeux, que Sa miséricorde par laquelle Il a concilié entre Ses créatures. La condition ciné qua non de l’Amour est d’aimer sans conditions, sans attendre aucun retour, aucune contrepartie de l’Aimé. C’est l’Amour pur. Et cet amour est conditionné par l’attachement à Lui, qui est lui-même conditionné par le détachement de toute autre chose. C’est l’expression pure de la servitude: donner (de son temps, de son argent, de sa force…) sans attendre de récompense car ce n’est qu’une reconnaissance des faveurs de l’Aimé. Et la récompense sera alors de réussir à communiquer sa miséricorde à tout le monde, de partager le bonheur et cette jouissance tout intérieure et permanente avec les autres. Ce qu’il faut savoir aussi, c’est que ce bonheur ne peut avoir lieu sans cette reconnaissance d’abord. Ce n’est qu’en allant vers Ses créatures qu’on peut Lui être reconnaissant, Le Connaître et par-là L’aimer. Et la loi divine veut qu’on communique d’abord, qu’on fait l’effort, les premiers pas, Il décidera après de ce qu’Il va nous donner, et Dieu est juste et miséricordieuxL’Amour dans les sagesses d’Ibn ‘Atâ Allah:
« Quand Il t’inspire de l’éloignement pour les créatures sache qu’Il veut t’ouvrir la porte de Son intimité confiante » (1)« Tu n’aimes pas une chose sans en être l’esclave, or Lui ne veut pas que tu sois l’esclave d’un autre que Lui » (2)
L’amour comporte quatre degrés : l’amour pour Dieu, qui est commencement, l’amour venant de Dieu, qui est parachèvement ; quant à l’amour en Dieu et l’amour par Dieu, ils occupent des positions intermédiaires. L’amour pour Dieu consiste en ce que tu le préfères à tout ; l’amour en Dieu à ce que tu aimes celui qui Lui est proche ; l’amour par Dieu à ce que tu aimes qui Il aime et ce qu’Il aime, sans accorder d’importance à tes propos penchants ; l’amour venant de Dieu, quant à lui, est qu’Il t’arrache à toute chose pour que tu n’aimes que Lui. L’amour pour Dieu a pour indice l’invocation perpétuelle que tu fais de Lui, et celui de l’amour en Dieu est que tu aimes les hommes de bien qui ne t’apportent aucun profit matériel. L’amour par Dieu se traduit par l’extinction de tes appétits personnels sous l’action de la lumière divine, et l’amour venant de Dieu par le fait qu’Il t’attire à Lui et voile à tes yeux tout autre que Lui. C’est aussi le sens de la sagesse :
« Au connaissant jamais n’échappe le sentiment de son besoin extrême (de Dieu) ; jamais il ne s’attache à un autre que Dieu » (3). Mais enfin : « Les élus ne parviennent pas tous à la délivrance » (4) et le cheminement vers l’amour qui mène à la délivrance continue -sans jamais finir- dans l’océan de Sa connaissance. Il ne faut donc se satisfaire d’aucune station et ni d’aucune récompense : « N’est pas amoureux véritable celui qui espère de l’aimé une compensation et recherche en lui un profit. T’aime qui se donne à toi, et non celui pour qui tu te dépenses » (5)
Râbi’a al-Adawiyya : l’exemple de l’amour inconditionné
Une Sainte Musulmane du VIII è siècle La Mère du Bien « Ummu al khayr »
Considérée comme l’une des grandes saintes de l’Islam, Rabi’a al-‘Adawiyya (m. 185H./801 J.C.) est la figure qui illustre par excellence la sensibilité de l’amour spirituel féminin. Elle fut parmi les autres saintes, celle qui a le plus exprimé son Amour pour Le Seigneur par ses actes, ses paroles et ses poèmes.Elle refusa la demande en mariage, faite par de riches et pieuses personnes, et mena une vie de célibat consacrée exclusivement à la dévotion, à la contemplation et au pur Amour de Dieu. Et en ce sens, elle contribua grandement à l’apparition de cette piété féminine qui allait marquer de son empreinte toute la postérité.
Grâce à ses nombreux disciples, son rayonnement spirituel demeure vivace et son expérience personnelle continue de susciter bien des vocations jusqu’à nos jours.Ces disciples ont su transmettre sa doctrine d’Amour que résume cette confidence de Rabi’a :
« Mon Dieu, si je T’adore par crainte de Ton Enfer, brûle-moi dans ses flammes, et si je T’adore par crainte de Ton Paradis, prive m’en. Je ne T’adore, Seigneur, que pour Toi. Car Tu mérites l’adoration. alors ne me refuse pas la contemplation de Ta Face majestueuse ».
La Générosité du Cœur
Elle ne se conformait pas aux vérités acquises.
Sa mission était d’éveiller ses compagnons et leur apprendre la sincérité avec Dieu.
Un disciple posa la question à Râbi‘a :– En quoi consiste la générosité ?
– Elle répondit :
• La générosité consiste à L’adorer par amour pour Lui-même,
sans avoir en vue des récompenses ni des rétributions !La Joie du Jugement Dernier
On demanda à Rabi’a : « Quelle grâce veux-tu obtenir en priant avec une telle fréquence et avec tant d’ardeur ? »
Elle répondit : « Je ne désire aucune récompense pour mes bonnes actions. Je le fais pour que, le jour de La Résurrection, le Prophète Muhammad – que Dieu lui accorde le salut et la paix – éprouve de la joie et dise à tous les autres Prophètes – que Dieu leur accorde le salut – : « Regardez bien cette femme de ma communauté ! Voici ses bonnes actions ! »La Pudeur d’une Ascète
Quelques dévots allèrent trouver Rabi’a, la voyant couverte d’un vêtement déchiré, ils lui dirent :
« Bien des gens te donneraient une aide si tu la leur demandais ! »Elle regarda le ciel et leur répondit : « Je rougirais de demander des biens de ce monde à qui que ce soit. Ces biens n’appartiennent à personne en vérité. Ce sont des prêts entre les mains de leurs propriétaires ! »
L’Amour
« Entre l’amant et le bien-aimé, il n’y pas de distance, ni de parole, que par la force du désir, ni de description, que par le goût. Qui a goûté, a connu. Et qui a décrit ne s’est pas décrit. En vérité, comment peux-tu décrire quelque chose, quand en sa présence tu es anéanti ? En son existence, tu es dissout ? En sa contemplation, tu es défait ? En sa pureté, tu es ivre ».
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