Le magal de Touba se tient chaque année, le 18 du mois lunaire de safar, dans la cité, berceau de la confrérie mouride, fondée par Cheikh Ahmadou Bamba Mbacké. L’importance de cet évènement multidimensionnel se traduit par le fait que des musulmans convergent massivement dans la ville sainte de Touba et par l’engagement des fidèles de cette branche de l’islam soufi. Au départ, l’évènement symbolisait uniquement la commémoration de l’anniversaire du départ du fondateur de la mouridiya, au Gabon où ce dernier s’était exilé en 1895. Mais, aujourd’hui il a pris des dimensions multiples, marquées par des orientations socio-économiques, politiques, culturelles et stratégiques. Par conséquent, célébré depuis 1928, le magal qui était alors local, s’est ensuite régionalisé et enfin mondialisé. Les fidèles mourides ont fait de cette célébration un évènement de renommée internationale, de par ses enjeux divers. Ce qui retrace la montée fulgurante de cette confrérie à travers plusieurs horizons de la planète. Ainsi, la mouridiyya participe non seulement, au développement socio-économique du pays de Bamba, mais aussi à sa cohésion sociale, à sa stabilité politique, et au rayonnement de la diplomatie sénégalaise dans les principaux grands ensembles régionaux du monde. D’où, l’évènement du magal de devenir international.
En effet, lequel évènement, à l’image des autres évènements religieux islamiques qui se tiennent au Sénégal, tel que le gamou symbolisant la célébration de l’anniversaire de la naissance du Prophète Muhammad (PSL), devenu une tradition culturelle musulmane qui s’organise annuellement à Tivaouane, Médina Baye, Thiénaba, Ndiassane, Keur Mame El Hadj Ndiéguène (Thiès), etc., est suivi aujourd’hui, de très près, par la quasitotalité des représentations diplomatiques présentes dans le pays de la téranga. D’ailleurs de nombreux diplomates, notamment de la ummah islamique y prennent régulièrement part. Ce qui leur permet de découvrir en profondeur le mode de pratique de l’islam au Sénégal et plusieurs facettes de la société sénégalaise. Cela permet surtout de disséquer le sens du concept de téranga qui est la marque de référence de la diplomatie sénégalaise qui se déploie sur la scène internationale. Grâce au sens du vocable de « téranga », nombreux sont ceux qui souhaitent découvrir le Sénégal dont on entend parler partout, à travers le monde.
Le Sénégal se singularise par sa cohésion sociale se caractérisant par le dialogue intrareligieux (inter-confrérique) et interreligieux (islamo-chrétien) et sa stabilité politique, faisant du pays un exemple à exporter à travers le monde, surtout dans les pays en conflits, où se notent une mauvaise cohabitation interreligieuse et une absence de dialogue entre les différentes communautés qui y vivent. L’édition 2022 du magal, comme celle du gamou d’ailleurs, s’est tenue dans un contexte particulier, marqué par une crise économique et financière qui se manifeste par une cherté de la vie, causée par les conséquences du Covid-19 dont le monde entier ne s’est pas encore relevé, et la guerre russo-ukrainienne qui a dégénéré en crise énergétique bouleversant l’économie mondiale. Même si laquelle crise n’a épargné la population sénégalaise qui souffre de la cherté des denrées de première nécessité, le magal garde encore son aura socio-économique.
La tenue de l’évènement annuel du magal permet de pénétrer le sens, la symbolique et les différentes dimensions socio-économique, diplomatique et stratégique du Sénégal. Si le magal est bien conçu stratégiquement par l’Etat du Sénégal, ce dernier gagnerait à imposer le sens de cet évènement des mourides, de même que celui des évènements religieux annuels des autres confréries musulmanes, ainsi que la symbolique du pèlerinage de Popenguine, sur la scène internationale, dans la mesure où, en dehors de leur caractère religieux, lesquels évènements comportent des enjeux géostratégiques, notamment économiques et humanitaires. En clair, l’Etat du Sénégal aurait pu réorienter stratégiquement ces évènements religieux en incluant leur sens et importance au centre de ses stratégies de mise en œuvre de sa politique étrangère à travers le monde, à l’instar d’Israël ou de la Palestine qui profitent, tous les deux, à la fois, de la symbolique de la ville trois fois sainte de Jérusalem, à travers leurs approches diplomatiques respectives. Il sied de rappeler que la ville de Jérusalem demeure tiraillée entre Israéliens et Palestiniens, en conflit depuis plusieurs décennies.
En effet, symbole de ce conflit, cette ville reste toujours sans statut consensuel et fait encore l’objet de revendications effrénées entre les deux peuples au sommet du conflit israélo-arabe. Chacun d’eux revendique exclusivement l’apanage de Jérusalem qu’il place également au centre de ses stratégies diplomatiques, à travers le monde. En fait, la vielle ville de Jérusalem représente pour l’Etat hébreu, le berceau du judaïsme et une terre fortement sacrée pour la Palestiniens, avec la mosquée al-Aqsâ qu’elle abrite. Cette stratégie de diplomatie religieuse autour des villes saintes, est aussi expérimentée par le Maroc qui se sert de l’aura de la ville de Fès pour le rayonnement de sa diplomatie dans la ummah islamique, par le renforcement de ses relations avec d’autres pays où la tijaniyya est très en vogue, tels que le Sénégal, le Nigeria, le Ghana, le Niger, etc. En effet, le royaume chérifien valorise et exploite la dimension religieuse de Fès où est enterré le fondateur de la tijaniyya, Cheikh Ahmeth Tidjany Chérif (RTA). A cet effet, cette ville marocaine reçoit régulièrement des pèlerins venant de nombreux pays où il y a des fidèles musulmans d’obédience tijane. Ces voyages de pèlerinage de fidèles tijanes au Maroc renforcent le secteur du tourisme dans le pays, donc l’économie marocaine en général. Qui plus est, la ville de Fès renforce la visibilité et la représentativité du Maroc sur la sphère mondiale. A preuve, grâce à la confrérie tijane qui est très prisée au Maroc et au Sénégal, les deux pays entretiennent des relations bilatérales profondément solides et qui sont constamment au beau fixe, avec une convergence de positions sur beaucoup de question internationales.
Cette approche de redéfinition et de revalorisation du sens multidimensionnel des cités religieuses sénégalaises, notamment Touba, Tivaouane, Médina Baye, Keur Mame El Hadj Ndiéguène, Thiénaba, Ndiassane, Madina Gounass, Popenguine, etc. permettra à l’Etat du Sénégal de renforcer sa diplomatie religieuse, non seulement dans la ummah islamique, mais aussi, à travers le reste du monde, dès lors que la religion fait partie de la culture sénégalaise. En effet, la culture de façon générale constitue un facteur d’interconnexion des différentes nations de la planète. Elle interconnecte l’ensemble des Etats du monde par le biais de la mondialisation. Laquelle se présente aujourd’hui comme un cadre permettant à l’ensemble des Etats et des peuples du monde de cohabiter et de s’embrasser dans la concorde. Si les religions étaient bien exploitées par leurs fidèles respectifs, tous les peuples du monde pourraient être dans un véritable vivre ensemble, au sein du village planétaire que construit la mondialisation. Certes, le Sénégal est un Etat laïc, mais la mise en œuvre des politiques relatives au développement socio-économique nécessitent l’exploitation à bon escient de l’ensemble des facteurs sociaux qui favorisent aussi bien les interactions entre les individus, que les relations de coopération entre les Etats dans le système-monde.
Les enjeux économiques du magal se déterminent par la diversité et le dynamisme des secteurs socio-économiques qui entrent en jeu, se redynamisent et s’optimisent, avec la croissance des nombreuses activités économiques qui s’opèrent dans plusieurs domaines, avant, pendant et après l’évènement. Parmi ces secteurs, se note le transport se révélant très prisé au niveau local, avec les nombreux pèlerins qui quittent toutes les régions du Sénégal, pour Touba. Au niveau international, se remarque une augmentation du chiffre d’affaire des compagnies aériennes qui assurent le déplacement des nombreux émigrés sénégalais vivant en Europe ou en Amérique. En fait, ces derniers convergent massivement vers leur pays natal, notamment à Touba, pour prendre part à ce grand rendez-vous religieux. Au surplus, on assiste également au niveau local, à une augmentation du niveau du commerce des matières de première nécessité. L’avènement voit également des offres de services sanitaires, de dons et des œuvres de bonne volonté qui déterminent le caractère social et humanitaire du magal.
Au plan politique, le magal offre une plateforme de communication à tous les leaders politiques du Sénégal qui y convoitent des opportunités électorales et convergent vers la cité religieuse de Bamba. Aujourd’hui, la convergence des hommes politiques vers Touba, tout comme vers les autres cités religieuses, à l’occasion d’évènements religieux annuels qui s’y organisent, est devenue une stratégie commune pour l’ensemble des leaders politiques. Au Sénégal, pendant l’organisation des évènements religieux, on assiste à une sorte d’islamisation de la politique ou à une politisation de l’islam. En effet, il sied de noter que dans le pays de la téranga, la société est animée par une cohabitation entre le spirituel et le temporel, qui assoit la cohésion sociale et renforce la stabilité politique. Ce qui traduit l’impact de l’islam sur la politique au Sénégal, même si l’Etat sénégalais ne fonctionne pas sur des leviers à caractère islamique. Car le pays est laïc. Toutefois, cette laïcité n’exclut pas la prise en compte des religions dans la gouvernance socio-politique, dans la mesure où celle-ci dépend des réalités sociétales, la société sénégalaise étant ancrée dans la religion.
De nos jours, la mouridiyya constitue un outil de résolution de crise politique. Ce point de vue peut se justifier par la réconciliation entre l’ancien président, Abdoulaye Wade et son successeur, Macky Sall, à l’occasion de l’inauguration de la grande mosquée Massolikoul Djinane, le vendredi 27 septembre 2019. Il se note d’autres cas du genre, telles que les médiations menées par Serigne Abdoul Aziz Sy Dabakh dans des contextes de crises socio-politiques au Sénégal. A titre d’exemple, nous pouvons citer le rapprochement des points de vue des leaders de classe politique du Sénégal, durant les années 1990, plus précisément entre l’ancien président de la République, Abdou Diouf et son opposition d’alors. Serigne Abdoul Aziz Sy Dabakh intervenait également sur des crises sociales, comme celle ayant affecté le milieu scolaire dans les années 1988 et 1989, au cours de laquelle une réunion a été tenue à Tivaouane, en vue d’en trouver une solution globale et durable.
Au Sénégal, la religion ne peut pas être dissociée de la politique. A preuve, le pays a élu son tout premier président, Léopold Sédar Senghor, grâce au soutien infaillible de chefs religieux, musulmans et chrétien, notamment Serigne Babacar Sy, Seydou Nourou Tall, Serigne Fallou Mbacké et le cardinal Hyacinthe Thiandoum, d’où l’imbrication de la religion dans la politique au niveau du pays. Même si ce n’est pas évidemment le cas aujourd’hui, avec le changement de mentalité chez les jeunes, dans l’histoire récente du Sénégal, on peut soutenir l’idée selon laquelle, tout candidat à une élection, qui bénéficie d’un grand soutien de chefs religieux, peut espérer avoir des résultats probants.
Le magal de Touba voit également la convergence de nombreux représentants diplomatiques et consulaires présents dans le pays, auxquels l’évènement s’offre en tribune de communication diplomatique, comme à l’occasion d’une conférence internationale ou forum international. La présence marquante de l’ambassadeur de France au Sénégal, son Excellence Philippe Lalliot à l’édition du magal de 2021, considérée comme un satisfécit par ce diplomate, en est une parfaite illustration. Lors de cette édition du magal, lequel ambassadeur était en visite à Touba où il a rencontré le khalife général des mourides à qui il a exprimé le profond respect que la France porte à sa personne, à sa fonction, en tant que digne vicaire de Cheikh Ahmadou Bamba, mais également à la communauté mouride qu’il dirige et à la religion musulmane. En sus, des délégations de nombreux pays musulmans tels que le Maroc, l’Egypte, la Palestine, etc. par l’entremise de leurs représentations diplomatiques au Sénégal, se rendent régulièrement à Touba, à l’occasion du magal. D’ailleurs, toutes les représentations diplomations qui se trouvent au Sénégal ont toujours souhaité être invitées aux grands évènements religieux qui se tiennent régulièrement dans le pays, notamment le grand magal de Touba, le gamou de Tivaouane, de Médina Baye, etc. ainsi que le pèlerinage marial de Popenguine. Cette attraction des représentations diplomations à ces évènements religieux constitue un grand atout stratégique et un facteur d’influence pour le Sénégal. Toutefois, l’exploitation par les autorités sénégalaises, de ces avantages qu’offrent les différentes cités religieuses du pays, laisse à désirer.
Alors, la mouridiyya en particulier, et les confréries en général, en tant que remparts face à l’extrémisme et au radicalisme violents, constituent un facteur qui renforce cette dimension ou cet atout du Sénégal, pouvant servir de levier de cohésion sociale, de stabilité politique et de sécurité socio-économique. Ces attributs du Sénégal constituent des facteurs de rayonnement diplomatique à travers le monde. La cohésion sociale et la stabilité politique du Sénégal sont des marques de référence très prisées et citées en exemples à travers le monde.
Le magal demeure une plateforme d’échanges et de discussions sur des questions socio-politiques. En effet, au-delà des enseignements religieux islamiques et de la promotion des valeurs cardinales, les questions phares du moment sont au menu des débats. Ces questions d’actualité socio-politiques et économiques sont profondément discutées et analysées le jour de l’évènement. Elles sont abordées dans le discours du khalife, ainsi que dans les communications des principaux invités de marque qui ont l’opportunité d’être présents à ce grand rendez-vous religieux. Le message du khalife général des mourides est adressé à l’ensemble de la communauté musulmane sénégalaise, à tous les Sénégalais et à toute la ummah islamique que le saint homme invite au renforcement des valeurs morales dans tous les domaines socio-économiques. Ce qui fait de son message un viatique pour toute la population sénégalaise.
Au plan géopolitique, la mouridiyya peut constituer un facteur d’influence du Sénégal sur d’autres Etats, car Touba, une ville sainte sénégalaise est l’épicentre de cette confrérie unipolaire et unicentrée qui joue un rôle de taille dans l’environnement socio-économique sénégalais et de la sous-région ouest-africaine. En ce sens, ladite confrérie ouvre le Sénégal sur d’autres pays, à l’occasion du grand magal que les fidèles mourides considèrent comme un évènement à ne pas rater. En effet, la présence de délégations des communautés tidjanes algérienne et marocaine lors de l’édition du magal de 2022, en est un exemple d’illustration du renforcement des relations que cet évènement religieux peut occasionner, avec une ouverture de perspectives diplomatiques pour le Sénégal. En sus, laquelle édition a également vu la présence à Touba d’un des chefs religieux maliens, en la personne de l’imam Mahmoud Dicko qui incarne une cohabitation forcée entre le temporel et spirituel au Mali. A noter que le voyage dudit imam au Sénégal, dans la cité religieuse de Serigne Touba, est intervenu sur fond de crise politique au Mali, s’animant par des tensions socio-ethniques, des clivages identitaires et des violences armées, avec la montée en puissance des réseaux terroristes qui tissent leur toile sous l’effet de l’instabilité politique du pays. En effet, depuis plus d’une décennie, le Mali se trouve miné par un conflit armé qui touche de plein fouet ce pays frontalier du Sénégal, d’où celui-ci d’être aux aguets de la croissance de la menace terroriste. Le terrorisme rend l’environnement socio-économique de l’Afrique de l’Ouest et du Sahel très délétère, au regard de la persistance des attaques armés dans lesdits espaces.
Alors, l’évènement du magal peut être vu comme une plateforme de dialogue et de diplomatie appliquée à la résolution des conflits armés qui existent à l’extérieur du Sénégal. A preuve, une délégation de la communauté musulmane rohingya de la Birmanie a pris part à l’édition du magal de 2017, sur invitation du khalife général des mourides d’alors, Serigne Cheikh Sidy Makhtar Maty Lèye Mbacké, au moment où le sort des musulmans de laquelle communauté faisait la une des journaux internationaux. La question des rohingya est non seulement d’ordre mondial parce que inscrite à l’agenda des Nations unies, mais aussi a une dimension humanitaire, d’où l’engagement d’organisations caritatives et de communautés religieuses autour de ce dossier encore brûlant. Alors, Touba s’est montré fortement préoccupé par ce conflit armé qui mine la Birmanie, d’où le khalife général d’avoir jeté son dévolu sur cette communauté birmane très persécutée, parmi ses invités de marque.
Alors, la place et le rôle de Touba dans l’environnement socio-politique et économique du Sénégal est de nos jours un cas d’école à exporter à travers le monde. Car la cité religieuse, principal pivot de la mouridiyya fournit constamment un apport conséquent dans la gestion et résolution des crises politiques au Sénégal, et occupe une place centrale dans la mise en œuvre de politiques de développement. En guise d’illustration, nous pouvons citer l’importante contribution financière du khalife général, Serigne Mountakha Mbacké, à hauteur de plusieurs centaines de millions de FCFA, dans le cadre de la politique de résilience face au Covid-19. Qui plus est, le discours du saint homme sur le port du masque a également eu un impact réel sur les fidèles mourides, en particulier et sur les Sénégalais, en général. En effet, le fait que le khalife a prononcé ce discours avec un masque au visage a encouragé surtout les jeunes à faire leur son geste plein de sens et d’enseignements. Par ailleurs, le khalife est également intervenu financièrement sur la problématique des inondations en 2021. En outre, il a invité les jeunes sénégalais candidats à l’émigration clandestine à renoncer à leur projet de voyage par la mer, etc.
La diplomatie islamique appliquée à la résolution des conflits en Afrique est une approche diplomatique stratégique qui peut aboutir sur des résultats concrets. L’initiative et la volonté du khalife général de Médina Baye, Cheikh Mouhamadou Mahi Ibrahim Niass qui s’est rendu au Darfour, au Soudan en 2022, pour tenter de rapprocher les points de vue des protagonistes du conflit soudanais, constitue un exemple d’illustration, car le vicaire de Baye a réussi sa médiation, même si on peut constater que ce pays de l’Afrique centrale vit aujourd’hui dans un chaos total, à cause de la guerre qui prévaut au sein de l’armée soudanaise et qui sévit les populations soudanaises. En effet, Cheikh Mouhamadou Mahi Ibrahim Niass a réconcilié les chefs tribaux dans la région du Darfour qui traverse une guerre interethnique depuis environ deux décennies. Cela dénote l’influence du courant niassène de la tijaniyya sur de nombreux pays de la sous-région ouest-africaine, tels que le Nigeria, le Niger, le Ghana, ainsi qu’au Cameroun dans la partie centrale de l’Afrique. L’œuvre de Baye Ibrahima Niass et ses enseignements à l’avantage de la communauté tidjane de ces pays n’est pas à démontrer. Le gamou annuel de Kano et de Zamfara au Nigéria en donnent des précisions.
Alors, le Sénégal est très connu pour la place qu’il occupe dans l’islam confrérique ou soufi dont il constitue l’un des bastions. Les pays qui organisent des évènements religieux sont très nombreux dans le monde. Nous pouvons en citer comme exemples, l’Arabie saoudite (petit et grand pèlerinages), l’Irak (pèlerinage principal des chiites à l’occasion du achoura), Iran ( achoura), Pakistan (pèlerinage de Sehwân Sharîf, Sindh), Indonésie (lailat ul Miraj, une célébration en l’honneur du Prophète Muhammad (PSL), l’Inde (la Kumbh Mela ou Kumbha Mela), Cachemire (le pèlerinage hindou d’Amarnath), Israël (pèlerinage), Turquie (pèlerinage), Rome en Italie (pèlerinage). Mais, comparé à ces pays, le Sénégal présente une particularité. Laquelle s’exprime par la téranga sénégalaise, sa cohésion sociale, sa stabilité politique, la paix et la sécurité qui y règnent, son niveau démocratique, la nature de son Etat, l’ancrage du dialogue intrareligieux et interreligieux qui y prévaut, son ouverture le reste du monde, avec sa participation aux affaires internationales, etc. qui en font un pays exemplaire parmi tant d’autres.
Le Sénégal représente un des points de repère de la politique étrangère française en Afrique, en général, notamment, en Afrique de l’Ouest. A l’évidence, le Sénégal, de par sa situation géostratégique se symbolisant par son ouverture sur l’océan Atlantique et la place que sa capitale, Dakar, hub diplomatique, occupe dans l’environnement géopolitique africaine, voire mondiale, demeure un point de convergence de l’ensemble des grandes puissances étrangères qui y investissent dans tous les domaines économiques.
En définitive, au Sénégal, les confréries connues pour la place qu’elles occupent dans le pays et le rôle qu’elles jouent pour les Sénégalais, peuvent fournir le même apport que le Vatican et la Communauté Sant’Egidio dans la résolution des conflits armés à travers le monde, notamment en Afrique, continent qui est touché de plein fouet par la guerre.
Centré au Sénégal, la mouridiyya demeure une confrérie fortement ancrée dans plusieurs pays, à travers le monde, notamment en Europe où vit une forte communauté mouride. Le Bamba day célébré le 28 juillet de chaque année aux Etats-Unis, constitue une détermination de l’ancrage de cette confrérie qui peut véritablement permettre à l’Etat du Sénégal de rayonner dans la sphère mondiale.
Souleymane BA, spécialiste de la Méditerranée et du Moyen-Orient
Expert-consultant en relations internationales et stratégiques et en analyse géopolitique et diplomatique
Associé au Centre d’Etudes Diplomatiques et Stratégiques (CEDS) de Dakar