1963 aura été l’une des plus belles années du football sénégalais. C’était à l’occasion des Jeux Africains de Dakar qui réunissaient des représentants de la presque totalité du continent plus la France. Pendant près de deux semaines, notre pays était la capitale du sport international avec les plus grands ténors de l’athlétisme mondial. La plus grande attraction de ces jeux était sans aucun doute le football, connu pour être une nouvelle religion à laquelle s’est convertie toute l’humanité. Le team Sénégalais composé en partie de Lamine Coura Fall, Bouba Diakhaw, Souleymane Diop, Blé Guèye, Domingo Mendy, Cheikh Thioune, Youssou Ndiaye, Malick Sy Souris, Yatma Diouk, Ablaye Diop « Pelé », le feu follet Demba Thioye, grand héros de la finale, avait dominé le tournoi avec un remarquable brio. Que se soit au Parc Municipal des Sports, au Stade Iba Mar Diop, au Stade Des Abattoirs et au Stade de l’Amitié, devenu Demba Diop, les Lions avaient rugi de toute leur fureur pour marquer leur territoire.
Le Cameroun de Mbappé Lepe, la France de Budzinsky, la Haute Volta, le Niger et la Tunisie de Chetaly, se mirent à genoux devant les Lions du Pays de la Téranga, ambitieux, dominateurs et survoltés. La finale devant la Tunisie fut belle, enivrante, indécise et palpitante de bout en bout. Menés à la marque par une grande équipe tunisienne, le Sénégal égalisa de la tête par Abdoulaye Diop « Pelé » après une combinaison d’un grand art dont on se souviendra longtemps encore. L’arbitre français qui dirigeait la partie refusa le but pour une faute de main imaginaire. La peur de perdre, l’angoisse persistante, un public anxieux, telle fut instantanément la peinture caractérisée des spectateurs y compris les Présidents Senghor et Lamine Guèye, plus les membres du gouvernement et des corps constitués. C’est en ce moment précis, que le vire voltant Demba Thioye, avec toute l’audace qui le caractérise, engagea une action individuelle, faite de feintes et de dribbles, élimina toute la défense y compris le gardien de but mais, au moment de tirer dans le but vide, le goal se jeta sur lui et le plaqua au sol. Le penalty, incontestable, fut accordé dans un énorme brouhaha. Aucun joueur ne voulut exécuter la sentence de peur de passer à côté. Seul, Cheikh Thioune surnommé le maréchal, se résolut à tirer le penalty qui acheva sa course en pleine lucarne. Les deux équipes durent se séparer au nombre de corners obtenus et ce fut la victoire du Sénégal trois contre deux. Ce fut une victoire obtenue certes à l’arraché, mais largement méritée. Les deux équipes avaient dû jouer pendant 140 minutes faute de règlement précis.
Cet épisode est unique en football et pendant longtemps, on se le racontera. Cette chronique est un hommage collectif adressé à toute cette belle génération de footballeurs qui ont honoré leur pays de la plus belle des manières. Nos pensées affectueuses à ceux qui nous ont quittés en priant que le paradis soit leur terminus.
Majib Sène