L’acteur s’est éteint à l’âge de 88 ans, a annoncé ce lundi son avocat. Une personnalité hors norme à la carrière exceptionnelle disparaît.
Accroché à l’hélicoptère qui accompagnait sa légende d’acteur casse-cou, Jean-Paul Belmondo est monté au plus haut du ciel à l’âge de 88 ans, a annoncé son avocat ce lundi. La planète cinéma perd une étoile et le firmament en gagne une. Inutile de dire qu’il faudra du temps, ici, pour se faire à l’idée. Bébel, notre As des as, notre Magnifique, notre Marginal, notre Tendre Voyou, notre Animal, notre Pierrot le fou, n’avait pas besoin de coupole pour être immortel.
En guise de consolation, disons-nous que l’histoire du septième art, mais aussi celle du théâtre ne pourraient pas tenir debout sans lui. Belmondo, alias Bébel, un surnom qui lui venait de Pépel, le personnage de Gabin dans « les Bas-fonds » de Jean Renoir en 1936, laisse dans son étincelant sillage 80 films et 30 pièces, dont les triomphes de « Kean » en 1987, et Cyrano » deux ans plus tard.
Adepte des défis
Né à Neuilly-sur-Seine (Hauts-de-Seine) dans une famille d’artistes, d’un père sculpteur et d’une mère peintre qu’il révérait l’un comme l’autre, petit-fils d’un forgeron piémontais dont il avait hérité carrure et biscotos, le môme Belmondo n’était pas fait pour la méditation. Ni pour la concentration requise pour les études. Mais pour se battre, en revanche, se pendre au balcon de l’appartement familial du 5e étage, grimper sur les statues du jardin du Luxembourg ou fréquenter les rings, il était le premier. Et jamais à bout de souffle pour les facéties.
Prendre la vie au sérieux, excepté dans les coups durs, le Guignolo n’a jamais su. Quand son copain de Conservatoire, Jean-Pierre Marielle, l’a mis au défi de bondir des cintres sur scène, Bébel s’est jeté dans le vide en s’accrochant au rideau. C’est encore lui, sur le tournage de « l’Homme de Rio » au Brésil, qui jette du talc dans les gaines de climatisation de l’hôtel ou garnit les baignoires des chambres de bébés crocodiles.
Les coups du sort ne l’ont pas épargné : la mort de sa fille Patricia dans un incendie en 1993 à l’âge de 40 ans, puis l’accident cérébral en 2001 qui a bien failli faire de la suite de sa vie un film sans paroles. Mais il s’en est remis… « Réussir, ne cessera-t-il de répéter plus tard, c’est insister. » Dont acte. Bébel a insisté.
Fou de sport
Voilà tout Belmondo. Faisant de l’existence une histoire d’amour et d’humour. Une scintillante cascade. Sur ce plan, il aura donné de sa personne. Les hélicos, les filins, les bagnoles, le toit du métro, les ailes d’avion, rien n’aura jamais empêché cet oiseau d’aller plus vite et plus fort dans le risque. Sportif accompli, il adorait la boxe, qui lui faisait enjamber l’Atlantique pour assister à des matchs mythiques. Mais il adorait aussi le cyclisme et le football, qu’il pratiquait dans les cages pour mieux s’envoler.
Enveloppé dans son franc sourire, sculpté jusqu’au bout comme un héros — il ne se séparait pas de ses haltères —, l’homme qui nous quitte n’avait pas d’ennemis. Ni de clan. Avec lui le cinéma montrait ses deux visages. Intello et populaire. Il ne faut pas oublier que c’est Jean-Luc Godard qui l’a révélé avec « A bout de souffle » et pour 40 millions d’anciens francs.
Côté grand public, il faut ajouter, au fil des cartons chez Melville, Oury ou Verneuil, chez de Broca, Lautner et consorts, 148 millions de spectateurs. Bébel est mort. Toc toc badaboum ! Ça va swinguer dans les nuées.