Macky Sall affiche sa volonté pour la relance de MédiS Sénégal. Tout le contraire de ses ministres de la Santé et des Finances qui traînent les pieds.
« Le Président de la République rappelle, aussi, l’urgence de finaliser le processus de relance des activités de l’usine pharmaceutique MEDIS SENEGAL SA ». Cette instruction de Macky Sall, hier en conseil des ministres, est la énième du genre. Et pourtant, presque rien n’a bougé du côté de ses ministres, si l’on en croit les travailleurs de MédiS.
Selon Cheikh Mbacké Tine, délégué du personnel à Médis, le ministre de la Santé Abdoulaye Diouf Sarr et son collègue des Finances Abdoulaye Daouda Diallo doivent signer des conventions avec MédiS, mais tous les deux trainent les pieds. « Depuis trois mois, ces deux ministres n’arrivent pas à signer les conventions », regrette Tine.
Pourtant, du côté des travailleurs de MédiS, on ne doute pas un instant de la volonté affichée de Macky Sall. « Il ne peut pas donner autant d’instructions, s’il n’était pas engagé », déclare Cheikh Mbacké Tine.
En effet, le 21 avril 2020, en plein débat sur l’efficacité de la chloroquine, Macky Sall avait demandé à son gouvernement d’accompagner la relance de MédiS. Le 15 juillet 2020, le chef de l’Etat revient à la charge, toujours en conseil des ministres. A la séance hebdomadaire du 27 janvier 2021, Macky Sall a encore rappelé à ses ministres le poids qu’il attache à la relance de l’industrie pharmaceutique du Sénégal.
Et comme pour prouver encore son engagement, le chef de l’Etat a reçu en audience le président du conseil d’administration de MédiS à deux reprises (Octobre 2020 et Janvier 2021). L’objectif était de discuter de l’opérationnalisation des mesures d’accompagnement.
Il est question ici de moyens financiers mais surtout d’un quota sur la commande publique. « La direction de MédiS souligne qu’elle ne peut pas être livrée à des puissants venus de l’Europe, de la Chine et particulièrement de l’Inde. Il a donc besoin d’une protection », souligne Tine, par ailleurs chef de service à Médis.
Lobbies d’importation de médicaments et multinationales
Seulement, plusieurs mois après la décision de relancer MédiS et malgré les nombreuses instructions du Président Macky Sall, ses ministres se montrent peu pressés pour matérialiser sa volonté. Du côté des travailleurs, l’on estime qu’il y a des non-dits.
« La relance de MédiS n’est pas toujours concrétisée à cause d’une farouche lutte contre la relance de MédiS en particulier et le développement de l’industrie pharmaceutique locale en général par les lobbies d’importation de médicaments et les multinationales pharmaceutiques étrangères qui considèrent le développement de l’industrie pharmaceutique locale comme une menace à leurs intérêts », écrivent-ils.
Ces derniers, à travers Cheikh Mbacké Tine, regrettent également l’attentisme dans lequel s’est inscrite la direction de MédiS. Ils demandent au top management de prendre ses responsabilités. « La direction de MédiS doit parler. Depuis le début, elle nous a laissé le combat. Elle doit sortir de son silence », interpelle Tine. Mais les travailleurs invitent également MédiS à faire plus d’efforts dans la relance, en posant les premiers pas, au lieu d’attendre l’Etat, les bras croisés.
Le marché de médicaments au Sénégal, public et privé réunis, a été estimé à 130 milliards en 2018, d’après Tine. Ce dernier, qui avoue ne pas connaître la part du public, pense que les dépenses annuelles de la Pharmacie nationale d’approvisionnement (Pna) qui a le monopole de la commande publique en matière de médicaments ne devraient pas être inférieures à 50 milliards.
Ce qui lui fait dire que ce que MédiS demande ne représente rien, sachant que l’entreprise a un chiffre d’affaires de 7 milliards environs.