Heureusement ou malheureusement ? L’un et l’autre, car le nouvel élu se révélera rapidement un politicien pur et dur, dont la gouvernance est au moins aussi catastrophique que celle du vieux prédécesseur.
Il faut le rappeler constamment : notre président-politicien s’est engagé, sans état d’âme vraiment, à « réduire l’opposition à sa plus simple expression ». C’est l’un des rares, des très rares engagements qu’il a pris et qu’il s’emploie à respecter à la lettre. Il a ainsi, après avoir éliminé Khalifa Sall de la manière que l’on se rappelle et de nombreux autres par la voie du parrainage, quelques mois après sa réélection, réussi à mobiliser le milliardaire Idrissa Seck et son parti Rewmi, ainsi que Oumar Sarr, qui était des vingt-cinq (25) présumés s’être enrichis sur notre dos. Nous l’avons entendu jubiler, après cette ‘’prouesse’’, d’avoir réuni autour de lui 85% de l’électorat sénégalais.
Á quelle fin ? On l’imagine aisément, en vue l’élection présidentielle de 2024 où il sera candidat si nous le laissons faire. Si nous nous y opposons catégoriquement, il va sûrement enfourcher le cheval du multimilliardaire Idrissa Seck qui, élu, ne lui demandera jamais de rendre compte de sa nébuleuse gouvernance. Ce dernier ne quitterait sûrement pas le pouvoir avant 2034, et pourrait même déverrouiller la loi des deux mandats. Nous ne serions pas alors loin des cinquante (50) ans pronostiqués par leur ‘’père’’. Scénario catastrophe contre lequel le peuple devrait se mobiliser dans son écrasante majorité. J’ai beaucoup écrit sur le ‘’père’ comme sur les deux ‘’fils’’ et je vais dresser ici leurs brefs portraits, pour que nul n’en ignore sur le danger qu’ils représentent pour notre pays.
On se rappelle que ce 19 mars 2000, les Sénégalaises et les Sénégalais debout et déterminés ont mis un terme à la longue gouvernance des Socialistes, et porté au pouvoir celui qui avait pour slogan le Soppi (changement) pendant vingt-trois (23) ans. Installé le 1er avril 2000, il ne tarda pas à décevoir nos attentes de ruptures profondes. La gouvernance qu’il mit en œuvre n’était en rien différente de celle des Socialistes. Elle s’avéra même pire au fur et à mesure qu’elle se déroulait sous nos yeux. Je rappelais souvent, dans mes livres (quatre) comme dans mes nombreuses contributions, que sa gouvernance était jalonnée de scandales de toutes sortes, dont le moins grave est infiniment plus grave que l’Affaire du Watergate, qui coûta au Président américain Richard Nixon, sa démission forcée en 1974.
J’en propose au moins trois aux lecteurs et aux lectrices, sans trop les développer.
Je commence par la rocambolesque rénovation de l’avion de commandement La Pointe de Sangomaar. En effet, l’une des toutes premières préoccupations du nouveau président de la République a été, dès son entrée en fonction, de disposer d’un avion neuf. Arguant de raisons d’économie budgétaire, il opta finalement pour une révision générale de l’avion de commandement, La Pointe de Sangomaar.
Une révision qui se déroula dans l’opacité la plus totale. Quelque temps après, un très luxueux palais volant est réceptionné avec pompe à Dakar, en présence de toute la République, avec une très large couverture de la télévision nationale, sa télévision alors. Le Président de la République aux anges déclare au peuple sénégalais, pour le rassurer, que « la rénovation n’a pas coûté un seul franc CFA au contribuable sénégalais, et que ce sont des amis qui ont préféré garder l’anonymat qui lui ont avancé l’argent ».
Á l’époque, il n’était venu à l’esprit de personne qu’il nous racontait des histoires : il était encore en période de grâce et nombre d’entre nous étaient loin de soupçonner la véritable nature de l’homme. Il nous avait donc tous roulés dans la farine et ce n’est que trois ans après que nous nous rendrons compte que notre tout nouveau Président de la République nous racontait carrément des histoires. La lumière nous viendra de notre compatriote Abdou Latif Coulibaly, alors journaliste d’investigation (il ne l’est plus). C’est lui qui jeta un pavé dans la mare, en publiant, le 17 juillet 2003, un véritable brûlot : « Wade, Un opposant au pouvoir. L’alternance piégée ? », Les Éditions Sentinelles, Dakar. Il y révéla, avec preuves à l’appui, que l’opération de rénovation a plutôt coûté 31 milliards de francs CFA au contribuable sénégalais.
Après la parution du livre, l’hebdomadaire Jeune Afrique/L’Intelligent n° 2225 du 31 août au 6 septembre 2003, revenait avec le Président de la République sur cette nébuleuse affaire de la rénovation de La Pointe de Sangomaar. Le journaliste de l’hebdomadaire lui avait notamment demandé ce qu’il pensait de la révélation de M. Coulibaly. Le vieux président prédateur répondit, en s’imposant un aplomb qui lui faisait cette fois-ci cruellement défaut, que le journaliste sénégalais racontait des histoires et que la facture ne s’élevait qu’à 17 milliards de francs CFA.
Facture trop lourde pour le Sénégal selon lui, ce qui l’emmena à faire jouer ses relations. C’est ainsi que Taïwan a mis à sa disposition l’équivalent de 6 milliards de francs CFA qu’il remit directement, selon lui, aux sociétés contractantes, entre avril et juin 2001. De l’Arabie saoudite, il dit recevoir un chèque de 1,5 milliard de francs CFA qu’il remit au Ministère de l’Économie et des Finances. Enfin, poursuit-il, ses autres amis qu’il a sollicités ne s’étant pas manifestés, il s’est retrouvé face à un gap de 10 milliards.
Cette somme n’étant pas prévue au budget, il a fallu trouver la rubrique au sein de laquelle la dégager. On a mal quand on lit la suite de l’interview où il expliquait comment il a trouvé la rubrique où dégager la somme nécessaire (cf. à l’hebdomadaire cité). Les Sénégalais découvraient avec stupeur que leur nouveau Président leur avait menti, leur avait menti solennellement et publiquement. ‘’Ses amis’’ qui lui avaient avancé de l’argent n’existaient que dans son imagination : la rénovation s’était bien faite avec l’argent du contribuable, et dans des conditions des plus opaques, qui foulaient aux pieds toutes les règles budgétaires.
Les Sénégalais découvriront de nombreux autres scandales – car celui-là en est un –, de nombreux autres comme l’odyssée des quinze (15) millions de dollars de Taïwan.
L’Affaire du Watergate est vraiment une peccadille, comparée à ce scandale gravissime des quinze (15) millions de dollars de Taïwan. Le vieux président ne devrait donc jamais survivre à cette honteuse affaire : la sanction la plus légère qui devrait lui être infligée dans ce scandale, c’est la destitution pour haute trahison. Il n’en a malheureusement rien été et le gros délinquant, le premier des délinquants de la République, s’en était sorti indemne. Il n’avait même pas été égratigné, sinon peut-être sur le plan moral. Même pas d’ailleurs, puisque l’homme ne se gargarise pas de ces choses-là.
Pourtant, l’affaire a été portée sur la place publique : l’écrasante majorité des Sénégalaises et des Sénégalais étaient au courant que leur Président avait détourné, pour son propre compte, pour celui de sa famille et de son clan, quinze (15) millions de dollars (7 milliards de francs CFA) de Taïwan, « destinés à la réalisation de projets sociaux au Sénégal». Ce n’était pas des rumeurs, c’était une vérité qui crevait tous les yeux et perçait violemment tous les tympans. Toute la presse (les quotidiens, les hebdomadaires, le net, etc.) en a rendu compte avec, à l’appui, des informations et des documents irréfutables.
En particulier, un grand professionnel de la communication, Mamadou Oumar Ndiaye en l’occurrence, a consacré un texte très fouillé, très documenté à cette immonde affaire des 7 milliards de francs CFA de Taïwan. Ce texte, intitulé « Comment de l’argent destiné au Sénégal s’est retrouvé dans un compte privé à Chypre ? », a été publié dans ‘’Le Témoin’’ (alors hebdomadaire) et repris par Nettali.com le samedi 16 décembre 2006. Le journaliste reviendra d’ailleurs à la charge dans un autre texte : « Le scandale des fonds taïwanais (suite) », repris lui aussi par Nettali.com.
Les deux textes donnent des détails précis : des dates, des comptes bancaires, les noms des différents protagonistes parmi lesquels le sulfureux Pierre Aïm (alors conseiller spécial du vieux président prédateur) et son fils Emmanuel, Jérôme Godard, feu Salif Ba, l’ancien Ministre Cheikh Tidiane Sy, M. Huang et M. Bruno Shen, alors respectivement ambassadeur et 1er conseiller de l’Ambassade de Taïwan à Dakar et de nombreux autres. C’est le sulfureux Pierre Aïm qui est allé à Taïwan avec une lettre signée du vieux président où, s’adressant à son homologue taïwanais, il écrit notamment ceci : « (…). J’ai également instruit mon Émissaire en lui conférant les pleins pouvoirs à l’effet de négocier, dans tous ses aspects, le Nouvel Accord quinquennal de Coopération entre la République de Chine et la République du Sénégal. Je vous remercie de bien vouloir recevoir mon Émissaire et Vous prie d’accorder foi et créance à tout ce qu’il Vous dira de ma part (…) » C’est ce Pierre Aïm qui négocie à notre place et qui a quitté Taipeh avec quinze (15) millions de dollars initialement « destinés à la réalisation de projets sociaux », et qui est allé les planquer d’abord à Chypre.
Le dossier de cette honteuse affaire a été porté sur la place publique par les fonctionnaires de l’Ambassade de Taïwan encore à Dakar. On se rappelle que le Sénégal avait rompu brutalement ses relations diplomatiques avec Taïwan pour les nouer pompeusement avec Pékin. Les Taïwanais l’avaient très mal pris. On se souvient aussi du surprenant communiqué du Conseil des ministres du 05 janvier 2006 qui portait à notre connaissance que le Président de la République informait le Conseil « avoir reçu d’un ami un don personnel de 6 milliards de francs CFA », don qu’il « avait décidé de réinvestir dans les secteurs sociaux ». En réalité, avec l’affaire portée sur la place publique, il avait pris peur.
En tous les cas, une dizaine de jours plus tard, le vieux président et son Gouvernement nous jouaient le plus enfantin des cinémas (ils nous en jouaient pratiquement tous les jours) : le Premier Ministre de l’époque, Macky Sall, organisait une cérémonie de « remise d’attestations » à un certain nombre de « ministres gérant des secteurs sociaux », pour mieux nous jeter de la poudre aux yeux. Cette mise en scène grotesque n’avait, évidemment, trompé personne. Quels sont les ministres destinataires de ces fameuses attestations ? Combien ont-ils effectivement reçu et qu’ont-ils réalisé avec ? Tout cela était trop facile. Interrogé par les journalistes présents à la cérémonie, l’ancien Premier Ministre plus ou plus énervé, répondait laconiquement : « Aller vous dire par où est passé l’argent pour arriver là, je ne le sais pas et cela ne m’intéresse pas. »
Nombre d’autres scandales allaient jalonner la gouvernance meurtrie du vieux président-politicien. On peut en retenir : l’affaire dite des cinq (5) milliards de ‘’Sénégal Pêche’’, le ‘’relookage’’ du CICES, le fameux ‘’Protocole de Reubeusse’’ dont personne ne doute plus de l’existence, l’assassinat (oui l’assassinat) du juge constitutionnel Me Babacar Sèye, la calamiteuse gestion de ses fonds spéciaux, ses scélérats décrets de déclassement de nos réserves foncières et la distribution des terres, après sa famille et son parti, à une minorité déjà fort nantie au détriment de l’écrasante majorité de la population, son décret plus scélérat encore pris à 24 heures de son départ du pouvoir, pour gracier Johanna Susurah Meiring, une Sud-Africaine trafiquante notoire de drogue, condamnée en mars 2011 à dix ans de prison par la Cour d’Assises de Dakar.
Toutes ces questions, comme les deux que j’ai passées partiellement en revue, sont largement développées dans mes contributions comme dans mon livre ‘’Le Clan des Wade : accaparement, mépris et vanité’’ publié au Sénégal par les Éditions Sentinelles, septembre 2011 et, un mois plus tard, à Paris par L’Harmattan, octobre 2011, chapitre VI, « Une corruption nourrie et entretenue au niveau le plus élevé de l’État », pp. 87-168.
C’est ce vieux président prédateur qui a allaité Idrissa Seck et Macky Sall, le premier pour quatre ans et le second pour huit, avant de les sevrer brutalement. Pour le malheur du Sénégal, ils ont eu le temps d’assimiler les leçons de mal gouvernance.
M. Seck a été fortement impliqué dans les scandales qui ont jalonné la gouvernance du vieux président entre 2000 et 2004, notamment dans la gestion calamiteuse de ses fonds spéciaux. On se souvient que M. Seck a été traduit devant la Haute Cour de Justice, suite à une mise en accusation votée promptement par l’Assemblée nationale, dont certains membres bien connus dansaient pour leur ‘’victoire’’. Il a fait alors des révélations fracassantes devant la Commission de ladite Cour. Pour mesurer la gravité de ces révélations, je renvoie le lecteur et la lectrice intéressé(e) au chapitre VI de mon livre cité plus haut (pp. 141-149).
Le nom de M. Seck renvoie aussi à l’affaire dite des cinq milliards de ‘’Sénégal Pêche’’ et surtout au fameux ‘’Protocole de Reubeuss’’ qui l’opposait à son ‘’père’’. Protocole qui ne fait plus l’objet d’un doute, en tout cas qui n’en fait point aux yeux d’un Samuel Sarr, et peut-être d’un Mame Mbaye Niang. Le ‘’conseiller financier’’ du vieux président prédateur n’avait pas supporté que M. Seck qualifiât la grâce accordée à Karim Wade de ‘’deal international’’. Il lui répondit ainsi sèchement dans une interview accordée au quotidien ‘’Libération’’ du samedi 25 juin 2016, page 5. « Nous étions là quand Idrissa Seck faisait ses conneries », lâcha-t-il comme entrée en matière, avant de cogner encore plus fort : « Il ment, il parle de deal, c’est lui le dealer. C’est lui aussi le voleur. Il a volé 74 milliards de francs CFA planqués dans un compte qu’il a manipulé avant de le clôturer. » Et notre ‘’conseiller financier’’ de poursuivre, plus catégorique que jamais : « Je pèse mes mots : il a volé 74 milliards de francs CFA avant de fermer le compte bancaire. Il sait très bien que je sais et il sait pourquoi il a été viré de son poste de Premier Ministre. » Et, à titre de coup de grâce et pour enfoncer encore plus son ancien camarade, il conclut en ces termes : « Nous étions là quand il faisait ses conneries. Nous savons tout et nous savons exactement ce qu’il a fait. »
Le jeune ministre républicain Mame Mbaye Niang en a rajouté en publiant une contribution dans Dakaractu (et repris par de nombreux autres sites) où il charge copieusement Idrissa Seck qu’il traite de tous les noms d’oiseaux. Pour se faire surtout plus convaincant dans sa volonté de prouver l’authenticité du ‘’Protocole de Reubeusse’’, il cite le très sérieux Pr Abdoulaye Bathily et lui fait dire : « Á l’approche de la présidentielle de 2007, le président Wade avait lancé un dialogue avec les partis de l’Opposition. J’étais parti le rencontrer avec d’autres personnes. C’était lorsqu’il y avait les problèmes des Chantiers de Thiès. Alors j’ai interpelé le président Wade sur cette affaire entre lui et son ancien Premier Ministre Idrissa Sek. Je lui avais dit que cette polémique n’était bonne ni pour lui, ni pour l’image du pays. Il m’a répondu en me disant, il (Idrissa Seck) m’a pris mes 74 milliards. Je lui ai dit Monsieur le président je suis à l’Assemblée nationale mais les fonds politiques que nous avons votés ne font pas 74 milliards. Et il me dit qui vous a dit que ce sont les fonds politiques. C’est lui qui le dit. Mais il y a même des chèques du Koweït ». Et, toujours pour enfoncer encore plus M. Seck, il révèle, vers la fin de son texte : « Aux accusations de Samuel Sarr, je vais ajouter des preuves tangibles qu’Idrissa Seck ne saurait nier, et qu’il lui est loisible de tirer au clair par une saisine de la justice. » Ces preuves tangibles sont une longue liste de « dix-sept (17) comptes bancaires éparpillés à travers le monde » et attribués à l’homme politique le plus controversé au Sénégal. Il l’est encore plus quand les Sénégalaises et les Sénégalais découvrent, après sa toute récente déclaration de patrimoine, qu’il est multimilliardaire, après seulement quatre ans au pouvoir, et sans qu’on ne lui connaisse aucun travail depuis qu’il l’a quitté.
Et la question que l’écrasante majorité de la population se pose, c’est comment le Président de la République a pu faire appel à cet homme, pour devenir ‘’mburóok soow’’ avec lui. Cela ne devrait évidemment pas surprendre, si on considère les neuf ans de gouvernance du président-politicien qu’il est rapidement devenu.
Nous avons commencé à nous poser des questions sur l’homme qui nous gouverne dès sa première déclaration de patrimoine, en 2012. Des compatriotes en situaient le montant à huit (8) milliards de francs CFA. Personnellement, je crois que ce montant est exagéré, malgré l’accusation catégorique de Samuel Sarr (encore lui) qu’il a planqué 7,5 milliards dans des banques américaines. Raisonnablement, le montant pourrait se trouver autour de trois à quatre milliards.
Même à ce niveau, il pose problème. Comment M. Sall a-t-il pu accumuler trois ou quatre milliards en huit ans, dans un pays qui est en bonne place parmi les vingt-cinq (25) les plus pauvres et les plus endettés ? Comment est-ce possible si on le compare au montant du patrimoine de Jacques Chirac, quand il quittait le pouvoir en 2007, après avoir été Secrétaire d’État (dès 1967), plusieurs fois Ministre, Premier Ministre, Maire de Paris pendant dix-sept ans, Président de la République pendant douze (12) ? Au total, le couple Chirac avait déclaré un patrimoine d’environ 1.413.000 euros, répartis en biens immobiliers, valeurs mobilières, comptes bancaires, meubles, véhicules, etc.
Le patrimoine sortant de l’ex-Président de la 5ème ou 6ème puissance mondiale dépassait donc à peine un milliard de francs CFA. Que signifie un milliard face aux dizaines d’autres de ‘’mburu ak soow’’ ?
Une autre question à se poser est relative à la présence, dans le patrimoine entrant de Macky Sall, d’un appartement à Houston. Ses courtisans ont essayé de le justifier en prétendant qu’il l’a acheté à crédit. Houston, c’est une grande ville dans le Texas, au Sud des États-Unis. Faire plus de sept mille (7000) kilomètres au-dessus de l’Atlantique entre Dakar et New York ! Prendre ensuite un ou deux avions pour se rendre à Houston ! Tout cela pour acheter un appartement à crédit alors qu’on aurait pu l’acheter plus près de nous à Paris, à Bordeaux, à Nantes, à Londres, à Berlin ou à Madrid ! Et encore ! Qui va croire à cette histoire ?
Rappelons quand même que Macky Sall a été conseiller spécial du Président de la République chargé des Mines et de l’Énergie, Directeur général de PÉTROSEN, Ministre des Mines, de l’Énergie et de l’Hydraulique. Il aurait travaillé, en tant qu’expert consultant, avec Forteza international, entreprise basée à Houston. C’est cette entreprise qui exploite le gaz de Ngadiaga. C’est Macky Sall, en tant que Directeur général de PÉTROSEN ou Ministre des Mines et de l’Énergie, en tout cas l’un des deux, qui aurait signé à Forteza le contrat qui lui permet d’exploiter le gaz de Ngadiaga. Ne peut-on pas penser raisonnablement que c’est Forteza qui lui a offert le fameux appartement. Dommage que nous ne comptions pas beaucoup de journalistes d’investigation au Sénégal !
Le président-politicien pose aussi problème quand il signe un décret, à l’image de ceux que signait son prédécesseur et sosie, pour gracier un trafiquant notoire de faux médicaments, un certain Mamadou Wouri Diallo, condamné en première instance à cinq ans de prison ferme. Grâce posant d’autant plus problème, que le bénéficiaire avait interjeté appel. Il n’était donc pas définitivement condamné. Pourquoi alors le président-politicien avait-il pris, en toute connaissance de cause, son décret scélérat ? Qui était derrière ce Mamadou Wouri Diallo ? En quoi le président-politicien était-il si concerné par cette nébuleuse affaire ? Encore une fois, dommage que nous ne comptions pas beaucoup de journalistes d’investigation dans notre pays !
Je ne terminerai pas sans évoquer le curieux voyage du président-politicien en Eswatini (ancien Swaziland) et de celui du roi de ce pays à Dakar, du 4 au 6 juillet 2019. Un communiqué de la Présidence de la République nous apprenait que ce séjour de Sa Majesté Mswati III s’inscrivait dans le cadre de la volonté de Macky Sall et de son hôte de « raffermir davantage les excellentes relations d’amitié et de coopération entre la République du Sénégal et le royaume de l’Eswatini ». Et le communiqué de poursuivre que le Président Sall aura à échanger avec Sa Majesté Mswati III «sur des sujets d’intérêt commun au plan bilatéral».
Le communiqué nous apprend aussi que ces sujets ont certainement été abordés lors de la visite du Président de la République dans ce royaume en juillet 2018. En effet, après son séjour à Johannesburg, en Afrique du Sud, où il a participé au sommet des pays membres du BRICS (Brésil, Russie, Inde, Chine, Afrique du Sud) en tant que président du Comité d’orientation des chefs d’État et de gouvernement du Nouveau partenariat pour le Développement de l’Afrique (NEPAD), le Président Macky Sall est allé rendre visite au souverain avec qui il a discuté des perspectives de coopération bilatérale entre leurs deux pays.
Quelles perspectives de coopération avec cette monarchie absolue, ce pays pauvre dépendant, sur le plan économique, presque totalement de l’Afrique du Sud, avec un roi marié à 14 épouses et régnant en maître absolu depuis vingt-huit (28) ans ? Ce voyage, nous l’aurions compris au Botswana, en Tanzanie ou à la rigueur au Malawi. Mais en Eswatini, il pose sérieusement problème. Il le pose d’autant plus que ce petit royaume est de plus en plus considéré, à tort ou à raison, comme un paradis fiscal. En République d’Afrique du Sud à côté, on soupçonne l’ancien Président Jacob Zuma, accusé de corruption et en jugement devant les tribunaux du pays, d’avoir planqué de l’argent dans les banques de ce pays. Je n’accuserai pas le président-politicien du même forfait, mais je me pose la question de savoir ce qu’il allait faire dans ce petit et pauvre pays.
Je pourrais continuer de m’interroger encore longuement sur les problèmes que pose la très nébuleuse gouvernance de l’homme sans parole qui règne presque en maître absolu sur notre pays depuis le 2 avril 2012. Ils sont suffisamment connus pour que je m’en dispense. La question, par contre, que je me pose est celle-ci : sommes-nous prêts, vraiment prêts, avec tout ce que nous vivons depuis le 1er avril 2000, à nous morfondre dans notre lourd silence habituel, et à permettre au vieux président-politicien, à son fils biologique, à ses deux fils putatifs et à tous ceux et à toutes celles qui se réclament de leur héritage catastrophique, de gouverner notre pauvre pays au-delà de 2024, et peut-être jusqu’en 2050 ?
Nous leur faciliterions la tâche si nous laissions le président-politicien Jr réaliser son rêve de « réduire l’opposition à sa plus simple expression », en livrant notamment à sa justice, tout adversaire potentiellement dangereux qui se trouverait sur son chemin. Khalifa Ababacar Sall en a fait les frais, Ousmane Sonko pourrait connaître le même sort.
Dakar le 25 février 2021