Dakarmidi – Il est au-devant pour la reconstruction du marché Sandaga de Dakar. Dans cet entretien accordé à L’Observateur, le ministre de l’Urbanisme, du logement et de l’hygiène publique, Abdou Karim Fofana, est revenu sur le recasement des commerçants, l’option du Gouvernement pour la construction du nouveau marché, la durée des travaux, entre autres.
Après plusieurs reports, la démolition du marché Sandaga a démarré hier. Pouvez-vous nous faire le point de la situation ?
Nous avons entamé les opérations de démolition aujourd’hui (hier, Ndlr). D’abord, il y a une première partie avec les cantines qui occupent la voie publique. Le président de la République avait tenu à ce que la Ville de Dakar et la commune de Dakar-Plateau soient impliquées dans le processus. Nous l’avons fait. Le 3 juillet dernier, on avait lancé un ultimatum pour la démolition et la libération des emprises, mais les commerçants nous avaient demandé une nouvelle date et on leur avait donné un nouveau délai jusqu’au 2 août 2020, c’est-à-dire deux jours après la Tabaski. Les commerçants ont tenu parole et ils ont respecté leurs engagements. Hier (avant-hier, Ndlr) à 17 heures, 325 commerçants sur 383 avaient déjà récupéré leur clé et transféré leurs bagages au site de recasement, le Champs de Course. Ce matin (hier, Ndlr) nous avons fait deux visites à 10 heures et à 13 heures, et le déménagement a continué. Nous avions prévu la démolition à 17 heures, mais avant cette heure, tous les commerçants avaient enlevé leurs bagages et les opérations ont démarré entre 17 heures 30 minutes et 18 heures.
Est-ce qu’il y a eu des blocages ?
Non, il n’y a pas eu de blocages. Les négociations se sont bien terminées. On nous dit que depuis 1962, le Président Senghor lui-même a cherché à transférer Sandaga hors du Plateau, mais le marché est toujours là. Sandaga a été construit en 1933. C’est un marché central, historique et emblématique. Mais aujourd’hui, il s’agit d’une modernisation parce que le marché reçoit trois fois plus de commerçants qu’il peut en accueillir. Aujourd’hui, il y a des exigences en termes d’infrastructure, assainissement, parking mais surtout de sécurité parce que c’est un bâtiment de 87 ans qui a subi deux incendies. Nous avons travaillé de façon consensuelle parce que je n’aime pas le dialogue paralysant. Au Sénégal, on a souvent l’habitude de dialoguer, discuter, rediscuter, mais parfois ça ne mène à rien. Mais pour ce cas, nous avons tenu avec fermeté et courtoisie parce que les commerçants sont nos compatriotes qui ont une activité économique.
Combien de commerçants ont rejoint exactement le site de recasement ?
Hier (avant-hier), ils étaient 325 commerçants, mais aujourd’hui (hier) les 383 cantines qui étaient concernées ont été entièrement libérées. On ne s’arrêtera pas là. Nous sommes en train de travailler avec la Ville de Dakar et la commune de Dakar-Plateau pour le marché Kermel. Aux alentours de ce marché, il y a beaucoup de marchands d’art pour lesquels la Ville de Dakar avait construit un centre commercial en relation avec un partenaire privé. Et ils doivent rejoindre ce centre commercial. Il n’est pas question qu’en 2020, un centre commercial moderne soit prêt et que les marchands dictent leur loi en indiquant qu’ils ne veulent pas entrer dans le marché parce que les cantines sont étroites ou autre. Ils sont recasés de façon gratuite. Ils occupaient de façon irrégulière la voie publique. Si on leur donne des cantines, ils doivent les regagner. Le Préfet de Dakar a reçu des instructions pour les recevoir dans la semaine afin d’indiquer un délai raisonnable de façon à pouvoir les recaser dans ce centre commercial et libérer tous les espaces occupés illégalement.
Est-ce que vous avez trouvé des bagages dans les cantines ?
Nous n’avons pas trouvé de bagages, juste des débris dont ils n’avaient plus besoin et de la ferraille. Nous les avons accompagnés et tous les commerçants ont déguerpis. L’Etat a pris en charge leur abonnement qui est de 6 000 FCfa par commerçant.
La démolition des cantines a démarré. Mais pour ce qui est du bâtiment central, s’agit-il d’une démolition totale et une restauration ?
L’option de l’Etat du Sénégal est une démolition totale et une reconstruction. Parce que les études que nous avons, montrent que le bâtiment central est dans un état très préoccupant. Et la meilleure des solutions, c’est la démolition-reconstruction parce que la réhabilitation pourrait être aléatoire. On ne sait pas combien ça pourrait coûter et le Building administratif en est une bonne illustration. On a commencé avec un montant, mais on a fait deux avenants pour avoir 30% du projet en plus. Il y a beaucoup d’expériences en la matière. Mais les bâtiments historiques sont assez particuliers en termes de réhabilitation. On parle même de restauration profonde. Aujourd’hui, nous avons des experts qui sont capables de le reconstruire. Maintenant, il y a un débat entre spécialistes et nous leur laisseront un peu de temps pour nous convaincre de le réhabiliter, mais dans une portion de budget raisonnable. Nous gérons des deniers publics et devons être responsables parce qu’on ne peut pas se permettre de tout faire. Il faut un débat serein, un dialogue qui ne serait pas paralysant. Nous allons prendre nos responsabilités même si nous sommes dans une démarche inclusive.
Quand est-ce que les travaux de Sandaga vont démarrer ?
C’est dans le trimestre. Nous avons démarré les consultations entre la Ville de Dakar, la commune de Plateau et le ministère de l’Urbanisme. Nous voulons, dans 24 mois, donner aux commerçants un nouveau marché, leur permettre de revenir sur place et mener leurs activités.
L’entreprise qui doit effectuer les travaux du marché est-elle déjà connue ?
L’entreprise n’a pas encore été désignée. Il faut des évaluations puisque le choix entre réhabilitation et reconstruction n’est pas encore fait. Le dossier est prêt et on va y aller, et dans trois mois, les travaux doivent démarrer.
Quel est le budget du projet ?
Nous avons un budget estimatif. Au Sénégal, quand on parle de budget, certains diront que c’est trop, d’autres pas assez. Mais nous avons un budget estimatif et l’Etat a prévu, en relation avec la Ville de Dakar, une enveloppe de 10 milliards de FCfa. Maintenant, nous attendons de voir ce que l’appel d’offres va donner. Et un appel d’offres peut sortir avec un prix supérieur ou inférieur. C’est un appel à concurrence transparente et les entreprises intéressées vont déposer leur offre en fonction des spécificités techniques du projet.
Pour la prochaine occupation du nouveau marché, est-ce que les déguerpis seront prioritaires ?
Il n’y a pas de priorité. Eux, ils sont les ayants droit naturels. Il y a un bâtiment historique et il y a une extension (un centre commercial). Nous avons décidé qu’il n’y ait plus de cantines à l’extérieur. Tous les commerçants vont être relogés à l’intérieur du centre commercial. Dans ce centre commercial, il est prévu 600 espaces de six mètres carrés. Et eux sont les ayants droit naturels parce que ce n’est pas une opération où on cherche à faire de l’argent ou avoir une rentabilité. C’est une opération d’utilité publique.